Les impacts du “bug” cdH (3). Les pourvoyeurs attendent…

Hors-cadre
Par · 06/07/2017

Petit exercice de politique-fiction: si la composition du gouvernement wallon change (le “si” est plus que probablement superflu mais sait-on jamais…), qui, dans la nouvelle majorité, assumera la responsabilité de détricoter le montage ou l’esprit du Plan du Numérique?

Où en était-on arrivé? A mi-parcours de la législature. A la borne 18 (18 mois et des poussières) de la mise en oeuvre du Plan. A quelques jours du passage en Conseil des Ministres de toute une série de projets qui devaient (enfin) entrer en phase de concrétisation et prouver ainsi que ce Plan avance réellement, concrètement et que les acquis ne se limitent pas essentiellement aux activités du fonds d’investissement W.IN.G., aux prémisses du Digital Wallonia Hub ou encore à quelques préparatifs (inventorisation des ressources et des acteurs, sessions de sensibilisation…). Relire à cet égard notre récent article faisant le point sur le rôle de l’AdN (Agence du Numérique) ou encore cet article datant du début de l’année, sur le bilan du Plan après un an.

Changement de méthode?

La future majorité reviendra-t-elle sur les priorités, sur le budget, sa répartition, sur les axes et lignes de force esquissés? Sur la méthode-même de décision et de gouvernance, au niveau politique?

Pour rappel, la méthode pour le lancement de projets régionaux – qu’il s’agisse d’école, d’industrie, d’économie numérique, de smart cities… – fut celle du “bottom up”. Autrement dit, une parfois longue consultation des acteurs de terrain et de leurs organes d’animation afin de récolter idées et propositions.

On en est par exemple passé par une consultation populaire (le “Printemps du Numérique”) qui aurait certes gagné à être mieux promue pour attirer davantage de contributeurs. Par la constitution d’un Conseil du Numérique, constitué notamment d’entrepreneurs (plus ou moins chevronnés et 2.0). En gros par du “bottom up”: la base propose, le cabinet et/ou le gouvernement soupèse les propositions et dispose. Dans l’ensemble, les propositions de la “base” ont largement été injectées dans le Plan et dans les divers chapitres.

Un exemple parmi ceux qui étaient sur le petit chariot amenant les dossiers sur la table du Conseil des Ministres en ce mois de juin? La “note de cadrage” pour le dossier Smart Region / Smart Cities.

Cette note a été élaborée par un “groupe de gouvernance” où siègent et se réunissent, en moyenne tous les mois, les trois “référents” Smart Cities régionaux (Smart City Institute, FuturoCité, eMetropolitan eCampus), un expert de l’ADN et, chose importante dans cette vision bottom-up, les représentants (responsables Smart Cities) des municipalités.

Quelles sont les municipalités qui y siègent? Les premières furent les 5 villes qui avaient été reprises dans le projet Digital Cities (Liège, Namur, Charleroi, Tournai, Mons) auxquelles sont venues s’ajouter, plus récemment, Andenne, Marche-en-Famenne et La Louvière. Signalons encore qu’Herstal et Waterloo sont également arrivées autour de la table, mais trop tard pour avoir leur mot à dire pour la rédaction de cette note de gouvernance, rédigée fin 2016.

“Nous avons tous mis notre patte dans cette note”, souligne Nicolas Himmer, Smart City manager de la Ville de Namur. “C’est une bonne base pour mettre la Smart Region sur les rails. Elle détaille les besoins, les règles de fonctionnement, certaines choses à mettre en oeuvre au niveau régional pour donner naissance à cette Smart Region.”

Cette note de cadrage, remise au Cabinet Marcourt fin 2016, reprenait donc une série d’avis, de propositions, définissait les besoins et quelques objectifs. A charge pour le Cabinet de se prononcer, de réagir et rediscuter certains points et modalités. Avec la charge aussi de baliser les priorités, le budget. Avant de passer au stade de l’intercabinet (quatre Ministres sont concernés – Economie, Pouvoirs locaux, Aménagement du territoire, Budget) et de présenter le tout à la décision du Conseil des Ministres. C’était prévu pour cette fin juin… Avant le “bug” !

Au-delà de cet exemple de la note de cadrage Smart Region, si l’on reprend de la hauteur pour considérer l’avenir du Plan du Numérique / Digital Wallonia dans son ensemble, qui, dans la future majorité prendrait la responsabilité, à deux ans de la fin de la législature, de remettre tout en jeu, tout à plat, de relancer une nouvelle méthode, un détricotage/retricotage?

On voit mal, en tout cas, la totalité du Plan passer à la trappe. La “marque” Digital Wallonia et, de manière plus fondamentale, l’image-même de la Wallonie et de la nécessaire redynamisation en prendrait un sacré coup…

On avancera quoi qu’il arrive ?

La méthode bottom-up a un double avantage, dans la situation actuelle.

D’une part, celui de donner des arguments en faveur d’une préservation de ce qui a été fait et imaginé – du moins sur les points objectivement positifs. Rien n’interdit bien entendu d’améliorer les choses.

D’autre part, d’offrir la possibilité à ceux qui ont été les pourvoyeurs d’idées, de contenus et de propositions de poursuivre l’action, indépendamment de la mouvance politique. Même si, évidemment, ces “pourvoyeurs” attendent un cadre, une impulsion, des moyens régionaux permettant de donner une réelle envergure – et cohérence – aux projets ou initiatives ponctuels et/ou locaux.

A nouveau, le dossier Smart Region / Smart Cities en est un bon exemple. Comme le soulignait un membre du comité de gouvernance, “des projets ont été démarrés. La bonne nouvelle est que la dynamique a été engagée, coordonnée par les acteurs de terrain. Il sera difficile de l’arrêter.” Difficile? Pas d’un point de vue purement politique. Mais ce serait à tout le moins contre-productif et néfaste pour la dynamique engagée.

Selon notre interlocuteur, le futur gouvernement devrait donc se réinscrire dans la trame existante.

“Il y a une réelle volonté de mutualisation entre les acteurs référents, qui sont très impliqués”, ajoute-t-il. “Ils avancent dans un esprit de partage d’expérience, échangent des informations en amont de la mise en oeuvre de projets.”

Nicolas Himmer confirme, à cet égard, qu’entre participants municipaux, on parle et s’échange beaucoup d’idées et de bonnes pratiques, presque étonnamment, loin des traditionnelles frilosités politiques où chacun défend d’abord son clocher.

Il n’en reste pas moins que l’amplification, la consolidation de ce processus devra venir de la Région. On en revient à la question des éventuelles nouvelles priorités ou du recadrage qui serait décidé…