“Numérique-pour-tous” et littératie: l’asbl DigiFactory entre dans la danse

Article
Par · 09/09/2020

Les chiffres des “Baromètres Citoyen” de l’AdN (relire notre article à propos de la dernière édition, publiée en octobre 2019) tout comme l’étude nationale parrainée récemment par la Fondation Roi Baudouin en témoignent. Le taux de personnes qui, dans leur vie quotidienne voire professionnelle, rencontrent des difficultés pour faire face et s’approprier des compétences numériques, basiques ou plus évoluées, ce taux reste élevé.

La “fracture” numérique semble être une lutte sans fin. Un monstre qui prend sans cesse de nouvelles formes. Coupez-en une tête, il en naîtra cinq ou dix autres, de formes nouvelles.

C’est pour contribuer à dompter ce dragon qu’un trio namurois a lancé, en 2019, une asbl.

Voici en effet un an, un trio de professeurs-chercheurs de l’UNamur – Julie Henry, Fanny Boraita et Benoît Vanderose – créaient l’asbl DigiFactory, qui se définit comme “une fabrique d’idées pour un monde numérique plus accessible”.

L’objectif des trois fondateurs était de mettre sur pied une structure en dehors des murs et indépendamment des mécanismes de fonctionnement (et de financement) de l’université afin de mettre en oeuvre une démarche plus associative et donner naissance à des projets favorisant une appropriation du numérique par le “simple” citoyen via l’“acquisition d’une connaissance active du numérique”. Tout citoyen, quel que soit son âge, sa condition, son environnement socio-économique, est potentiellement une “cible” des actions et activités de l’asbl.

Pour ce faire, les membres de l’asbl imaginent eux-mêmes des projets ou apportent leur expertise et réflexion dans le cadre de projets de tiers.

La structure vient par exemple de remettre un dossier dans le cadre du programme Digital Belgium Skills Fund sur la problématique du genre et du déficit de filles dans les études orientées informatique.

L’asbl DigiFactory a par ailleurs bouclé récemment une réalisation pour Bibliothèques sans Frontières, organisation française qui déploie désormais aussi ses activités en Belgique. Sujet du projet pris en charge: la création d’une formation à destination des “aidants numériques”. Formation “hybride” puisque ce qui a été développé combine contenu pour séances en présentiel, guide d’apprentissage et MOOC.

Source: Aidants Connect (gouv.fr)

“Aidant numérique”, un concept d’outre-Quiévrain

La notion d’“aidant numérique” n’a pas encore percolé jusque chez nous, même si une réflexion préalable et l’identification d’un besoin en ce sens ont été initiés à divers niveaux (notamment du côté des EPN ou dans le cadre du programme Digital Wallonia).

En France, par contre, l’“aidant numérique” a désormais droit de cité – statut et charte à la clé (exemple à consulter ici) – et désigne une “personne capable d’aider tout citoyen à développer sa littératie numérique et contribuer ainsi à réduire la fracture numérique”. Ou, selon l’expression franco-française, pour réduire l’“illectronisme” (terme un peu barbare pour désigner l’illettrisme numérique).

Potentiellement, tout le monde peut devenir “aidant numérique”: enseignant, collaborateur communal, travailleur social… ou citoyen lambda. Encore faut-il disposer ou acquérir des compétences et une connaissance active et pratique suffisante du numérique. Vaste sujet, vaste contenu…

D’où le projet de Bibliothèques Sans Frontières France de constituer un corpus de formation pour futur aidant.

Un Mooc et, demain, un podcast?

Pour les besoins de Bibliothèques Sans Frontières France, l’asbl DigiFactory a donc développé des contenus à donner en présentiel ainsi qu’un MOOC reprenant un ensemble de compétences numériques. Le MOOC est structuré en une série de modules qui couvrent “des aspects techniques, mais également éthiques (bulles de filtre, respect de la vie privée, GAFAM, production de CO2, …) et de sécurité (menaces existantes, gestion des menaces, concepts de base en cybersécurité)”, explique Julie Henry, assistante de recherche en informatique, spécialisée en didactique de l’informatique. “Le MOOC est un condensé de ce que devrait connaître tout citoyen et vise principalement les aidants numériques.”

Il couvre en fait deux besoins ou deux finalités. D’une part, fournir la matière qu’un aidant pourra dispenser pour accompagner une personne ayant des carences de base en termes de connaissance du numérique (dans sa vie quotidienne).

D’autre part, procurer les leviers nécessaires à l’acquisition de compétences quasi-pédagogiques pour amener une personne lambda à être en mesure de transmettre ses propres compétences.

“Si le MOOC que nous avons développé dans le cadre de ce projet est désormais bien entendu la propriété de Bibliothèques Sans Frontières – qui le proposera pour les besoins de ses filières française et belge -, digiFactory reste propriétaire de sa connaissance, issue de l’expérience de ses membres et de leur expertise multidisciplinaire.

Or, le contenu développé pourrait fort bien être proposé à tout citoyen belge. Nous avons déjà commencé à réfléchir à une manière de rendre le contenu disponible en ligne, moyennant une restructuration du contenu, par exemple en revoyant la durée des segments. Une piste possible serait un podcast, plus léger, plus dynamique, avec ajout de vidéos…”

Mais, pour cela, l’asbl aura besoin de dénicher des moyens financiers. “par voie de subsides, d’appel à projets…”. L’asbl cherche des pistes et attend des propositions…