Baromètre “Maturité numérique”: Equipements et processus en légère progression

Pratique
Par · 26/11/2020

Avant d’en venir à l’analyse des tendances qui se dégagent en matière de modification des modes de travail et à l’impact qu’a eu (ou commencé à avoir) le Covid-19 sur certaines pratiques aidées par le numérique, petit détour dans cet article sur quelques chiffres et tendances relevées par le Baromètre 2020 en matière d’équipements et d’adoption de technologies de pointe. 

Pas de grand bouleversement, côté équipement, simplement la poursuite d’une tendance à une adoption de solutions et équipements numériques par les entreprises.

Pour l’édition 2020 de son baromètre de maturité numérique des entreprise wallonnes, l’AdN a pour la première fois intégré l’utilisation de technologies avancées (blockchain, intelligence artificielle, drones, impression 3D…) dans l’axe d’évaluation Infrastructure, jugeant que ce qui n’était encore que relativement ésotérique en 2017-2018 avait désormais toute sa place dans la grille d’évaluation. Même si l’adoption de ces technologies de pointe est encore rarissime et a eu pour effet de faire reculer de deux points la moyenne globale des entreprises (comme nous l’indiquions dans le premier volet de notre petite série d’articles).

Le numérique “de pointe” n’a pas encore réellement la cote

Quid de la mise en oeuvre de technologies d’avant-garde (intelligence artificielle, impression 3D, blockchain, etc.) par les entreprises wallonnes? Pas de grand changement de ce côté là. Les taux de pénétration moyenne (toutes tailles de société confondues) demeurent minimalistes, oscillant souvent entre 2 et 4%. Avec toutefois des pourcentages plus affirmés pour les sociétés de plus de 10 personnes.

Les différences entre TPE et PME se remarquent essentiellement dans les domaines des solutions analytiques et de l’Internet des Objets.

 

Taux de présence des technologies avancées – Source: AdN / Digital Wallonia.

 

Les différentes technologies “de pointe” rencontrent des succès d’estime fort variables selon les secteurs. Exemples?

L’Internet des Objets (et les capteurs en tous genres) convainquent davantage le secteur des industries lourdes et le secteur numérique.
L’analytique est essentiellement pratiqué dans le domaine de la finance et, une fois encore, dans celui du numérique.
La technologie blockchain se retrouve pas mal – c’est un constat intéressant – du côté de la culture et des médias (histoire de mieux garantir la véracité et l’origine des contenus, notamment), suivis par la finance et le numérique.
L’intelligence artificielle, sans encore faire de “carton”, commence surtout à poindre dans l’industrie lourde, le secteur de la finance, du numérique ou encore du côté des services aux entreprises. Mais pas encore ou de manière quasi imperceptible dans le domaine du commerce et de la distribution, ou de la finance…

 

“Au sein des secteurs industriels wallons, la présence de technologies caractéristiques de l’industrie du futur – intelligence artificielle, jumeaux numériques, AR/VR, IoT, robots de production… – n’est guère significative puisqu’elle atteint au maximum 8% selon les technologies envisagées.”

 

En termes de recours aux données et à leur analyse/exploitation, même si les PME moyennes wallonnes se distinguent des plus petites, avec un pourcentage moyen de 14%, elles sont malgré tout à la traîne par rapport à la moyenne belge. Le Baromètre de l’AdN cite en effet les chiffres de Statbel en la matière: “une entreprise belge sur cinq (20%), employant 10 travailleurs et plus, a eu recours au big data en 2018. Parmi elles, 8,9% analysent des données générées par les médias sociaux, 8,7% des données de géolocalisation issues d’appareils portables. 7,5% ont traité leurs propres données issues de dispositifs intelligents ou connectés.”

 

Taux de présence des technologies liées à l’industrie du futur. Source: AdN / Digital Wallonia

 

Equipement et sécurité

Dans le registre des équipements informatiques, le taux d’équipement en ordinateurs de bureau et portables est quasiment stable par rapport à la situation d’il y a deux ans, “preuve que l’on arrive quasi à saturation”.

Le seul indicateur valant d’être relevé est celui recul du taux de recours aux tablettes (- 7%), là où l’usage du smartphone progresse dans les mêmes proportions (90% des entreprises de plus de 10 personnes y ont recours. Mais sans que l’étude de l’AdN ne “creuse” réellement le sujet en termes de volume d’équipement.

L’étude se contente de signaler que “84% des entreprises possèdent au moins un smartphone professionnel” (ce qui laisse le champ libre à de nombreuses interrogations) et “55% des travailleurs wallons en sont équipés”. Secteur où le taux de pénétration est la plus basse? L’agriculture, avec un score de 69%.

Autre sujet: la sécurité informatique. Le Baromètre pointe notamment une différence entre deux chiffres. D’une part, 38% des sociétés interrogées disent avoir été victimes d’un problème de piratage ou d’un souci de sécurité (dont 18% d’attaques par maliciels ou rançongiciels – et même 27% du côté des sociétés de plus de 10 personnes). D’autre part, seulement 12% des entreprises wallonnes disent être assurées contre les risques sécuritaires.

D’une manière générale, souligne le rapport, “on peut considérer que nos entreprises sont encore trop peu soucieuses des risques en matière de sécurité, puisque seule une entreprise sur deux (54%) utilise un pare-feu pour protéger son réseau contre d’éventuelles intrusions malveillantes. De plus, seulement 64% protègent les ordinateurs par un mot de passe et 21% ont recours à une sécurisation à deux facteurs.” Et – cela n’étonnera personne -, les mesures de protection plus robustes sont essentiellement le fait de sociétés plus grandes.

Toutes tailles confondues, à peine un peu plus d’un tiers (38%) disent avoir “sensibilisé” leur personne à la sécurité informatique (67% pour les sociétés de plus de dix personnes). Le pourcentage est encore plus faible en termes de document mise à disposition du personnel concernant des “règles élémentaires” de sécurité informatique: 15% de moyenne pour toutes les sociétés ; 35% pour les plus de 10 personnes.

Minimum vital côté back office

La grande majorité des entreprises wallonnes adoptent certes des solutions informatiques et numériques et progressent en “maturité” mais on a souvent l’impression que c’est le principe de la zone de confort et le réflexe du “évitons de faire des vagues” qui l’emportent. Voici deux chiffres cités par Hélène Raimond, co-auteur de l’étude pour l’AdN, qui en témoignent:
– la facturation électronique progresse, passant à un taux de pénétration de 58%, mais “il ne s’agit encore majoritairement que devoirs de facture par voie électronique pas de facturation structurée (XML, EDI, Finvoice…). “Seules 4% de la totalité des entreprises l’ont déployée, soit deux fois plus malgré tout qu’il y a deux ans”. Mais cela reste quasi-anecdotique.”

Situation plus favorable pour les entreprises de plus de 10 personnes puisque 10% d’entre elles ont recours à de la facturation électronique “structurée” (conforme EDI ou XML, par exemple)

L’intégration des processus reste par contre un chantier majeur. Si certains chaînons ont été automatisés (comme par exemple la réception des commandes par canal électronique), le relais vers la facturation, la comptabilité ou la gestion logistique fait encore souvent défaut. Les réencodages demeurent donc de mise… En ce compris du côté des sociétés qui vendent pourtant en-ligne: “Parmi les vendeurs en ligne, 53% sont obligés d’encoder manuellement les com- mandes arrivant par voie électronique.” Il y a heureusement progrès dans ce domaine puisque l’on constate un recul de 10% des sociétés confrontées à ce problème.

De même, “49% des entreprises qui achètent par voie électronique doivent réencoder manuellement ces achats dans leurs logiciels de gestion et de comptabilité. Néanmoins, ce taux est inférieur de 15 points par rapport à 2018, ce qui indique également une progression dans la digitalisation de ce flux de com-mandes.”

Pilotage d’entreprise

La pratique du décisionnel piloté par les données (via recours notamment à des tableaux de bord et outils de business intelligence) est encore très rare: seulement 6% des entreprises interrogées – toutes catégories confondues – disposent de ce genre d’outils (26% dans la catégorie des entreprises de plus de 10 personnes.

La collecte et la gestion des données client (CRM) sont davantage entrées dans les habitudes (13% en moyenne, 27% pour les plus de 10 salariés). Par contre, le “big data” et l’analyse “massive” de données végètent encore au tréfonds du classement, avec seulement un 5% de moyenne. Mais encore faudrait-il préciser à partir de quand une collecte et un réservoir de données sont considérés comme “big” pour une PME… (pas sûr que la notion et les potentiels d’applicabilité soient parfaitement compris par les sociétés sondées).

A suivre dans notre prochain article dédié au Baromètre 2020 “maturité numérique des entreprises wallonnes”: l’évolution des méthodes ou modes de travail (en ce compris en matière d’e-commerce), avant et après le déchaînement de la pandémie…