CoderDojo: vive(ment) la rentrée…

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Par · 16/09/2021

“Vive la rentrée”. C’est sans doute ce que beaucoup se disent en cette fin d’été. Mais l’expression s’applique sans doute plus particulièrement à des associations telles que CoderDojo (ou sa cousine Kodo Wallonie), après une grosse année de rupture de contact physique avec les plus jeunes qu’ils initient aux joies de la programmation et du numérique.

Les quelque 18 mois qui viennent de s’écouler furent loin d’être un long fleuve tranquille pour les animateurs et coachs, et pour les activités elles-mêmes. Certes, on a basculé vers le distanciel, en dématérialisant certains contenus et ressources et en adaptant la méthode pédagogique, mais les obstacles furent nombreux.

Attardons-nous tout d’abord sur la situation de CoderDojo qui a tout récemment annoncé la reprise des ateliers et animations en présentiel.

Si certains clubs Dojo ont pu continuer de fonctionner, ce fut généralement en réduisant la voilure – moins de coach, moins d’enfants participants, moins d’heures d’animation (voir les statistiques dans l’encadré ci-dessous). Certains clubs ont purement et simplement jeté l’éponge.

Pendant le(s) confinement(s) dû(s) au Covid, 30% des clubs Dojo ont continué leurs activités en basculant en distanciel.

** Nombre d’ateliers Dojo avant le début du confinement:
au niveau national : 130 par mois ; en Wallonie : 26
   De mars à juin 2020 (pour cause de confinement):
au niveau national : 53 par mois ; en Wallonie : 8

** Nombre d’enfants participant mensuellement à des ateliers Dojo:
– avant le confinement: 2.200 au niveau national ; environ 500 en Wallonie
– après le début du confinement: 530 à l’échelle nationale ; 65 en Wallonie.

Des difficultés à tire-larigot

La diminution du nombre de clubs et d’ateliers Dojo fut essentiellement due, estime Valérie Gillon, coordinatrice de CoderDojo Wallonie, à des difficultés d’ordre organisationnel, voire humain, du côté des coachs et des animateurs. La demande et l’intérêt des enfants (et de leurs proches) ont certes subi une certaine décélération mais dans une moindre mesure – même si les obstacles à surmonter étaient nombreux également de leur côté.

Ce constat n’enlève rien, tient à souligner Valérie Gillon, au dynamisme ou à la bonne volonté des coachs et animateurs. Mais voilà, le poids du confinement et les difficultés qu’il posait ont pesé lourd dans la balance.

A lire également: la manière dont les choses se sont passées et les nouvelles initiatives prises par l’organisation-cousine Kodo Wallonie: Kodo Wallonie: les aléas – et enseignements – du distanciel

“De nombreux coachs et animateurs subissaient déjà des conditions difficiles pendant leurs heures de travail. Cela devenait donc trop lourd de continuer à assumer la charge d’une animation, en distanciel, le week-end ou en soirée. Par ailleurs, gérer les ressources humaines alors qu’elles doivent opérer à partir de leur domicile a clairement posé un problème.

Il faut en outre bien se rendre compte que les coachs ne se retrouvaient plus dans un contexte d’animation d’une classe [les enfants devant rester chez eux]. Avec des enfants de niveaux différents et qui évoluent à leur propre rythme, et avec des problèmes de fonctionnement du matériel – ordinateur non adéquat, caméra en rade… Pour faire face aux besoins, certains Dojo ont même été jusqu’à prêter du matériel aux enfants…”.

 

Valérie Gillon (CoderDojo Wallonie): “J’ai personnellement continué d’animer un Dojo, avec quelques habitués parmi les enfants mais aussi de nouveaux. Souvent, les participants avaient la particularité d’avoir des parents assez dynamiques et se débrouillant bien dans le numérique…”

 

Comment passer d’un enfant à l’autre? Comment préserver l’animation et une certaine dose d’entraide et d’émulation entre les enfants quand les écrans et la distance s’interposent? “Certains coachs ont su trouver la bonne formule ou ont parfois même excellé dans cet exercice. Mais ce ne fut pas le cas pour tout le monde.”

Relancer la mécanique

La demande, on l’a vu, est restée bien présente pendant le confinement même s’il y eu du recul et des défections. Aujourd’hui, l’association CoderDojo annonce haut et fort la reprise des ateliers en présentiel.

La demande, estime Valérie Gillon, semble bel et bien être au rendez-vous: “Les enfants, les parents aussi, sont au taquet”.

Il s’agit désormais de ressusciter les clubs qui ont arrêté de fonctionner pendant le(s) confinement(s). Et de réactiver les coachs (tous bénévoles, pour rappel) – ou d’en recruter de nouveaux dans la mesure où un certain nombre d’anciens ne reprendront pas le collier. “24 des 34 Dojos wallons ont déjà annoncé qu’ils redémarreraient. Mais il n’est pas sûr que tous les autres les fassent.”

En plus de ceux qui n’ont jamais arrêté leurs activités (Ciney, Gilly, Charleroi…), certains clubs wallons ont déjà repris – à Marche ou Clavier par exemple. D’autres attendaient d’être sûr que la levée des mesures sanitaires tiendrait plus qu’un week-end. La reprise se fera donc pour certains clubs fin septembre ou en octobre.

Les inscriptions sont (ré)ouvertes via le site de l’association.

Un Dojo for All et un Dojo for Girls

Valérie Gillon l’a constaté elle-même et plus encore pendant le confinement: les enfants qui participent aux ateliers CoderDojo ont souvent la chance d’avoir des parents impliqués et qui “se débrouillent” (voire font bien mieux que se débrouiller) en numérique et/ou en informatique. Reste donc à convaincre davantage les autres. Notamment “ceux qui évoluent dans des milieux familiaux ou sociaux plus compliqués”. C’est l’un des espoirs et l’une des raisons d’être de l’initiative CoderDojo4All. Ciblant notamment les jeunes issus de l’immigration, socialement fragilisés, souffrant de handicap (mental ou physique), cette action passe par des partenariats avec des organisations sociales en vue d’organiser des ateliers Dojo dans l’environnement habituel de ces “fragilisés”.

Journée Cool Girls Code 2018 à Liège…

Un autre événement un rien spécial sera organisé à destination des filles, qui demeurent minoritaires dans les activités régulières organisées par CoderDojo. Le pourcentage de filles n’est toutefois pas aussi étriqué que dans les études STEM puisque l’association peut afficher un score honorable de 26% (en progression par rapport aux 18% de 2017). Mais toujours en net retrait de la représentation réelle des filles et des femmes dans la société. “Notre espoir est d’atteindre les 40%” dans les ateliers, confirme Valérie Gillon.

Pour mieux les convaincre et “ouvrir la porte”, comme elle le dit, un événement exclusivement réservé aux filles est planifié pour le 17 octobre. Ce “CoderDojo4Girlz” sera l’occasion pour elles de tâter le terrain, de gagner en confiance, avant de passer à des environnements mixtes. Les coachs, pour l’occasion, seront quasi exclusivement des femmes (alors qu’elles représentent habituellement un cinquième de l’effectif de bénévoles). “N’hésitez pas. Venez entre copines”, lance Valérie Gillon.

Les enseignements tirés

Ce ne fut donc pas facile de continuer à animer – efficacement – des ateliers CoderDojo en distanciel. Pour les différentes raisons évoquées ci-dessus. Toutefois, des points positifs peuvent en être retirés. Par la force des choses, les responsables de l’association et les animateurs ont dû imaginer de nouvelles méthodes d’accompagnement, s’essayer à une pédagogie différente, qui leur seront certainement utiles par la suite.

L’imagination fut sollicitée. Et, de manière qui peut paraître un rien contradictoire, les animateurs ont appris à se plier à des pratiques plus strictes que lors d’ateliers en présentiel. “Le principe de base appliqué habituellement est de laisser le champ libre aux animateurs dès l’instant où ils ont assimilé le contenu des fiches qui servent de base aux animations et au travail des enfants. Ils sont libres de proposer des jeux, des histoires animées… En raison du confinement et du distanciel, ils ont davantage dû préparer les ateliers pour préserver le côté interactif. Les CoderDojo sont ainsi devenus davantage dirigés qu’habituellement… Trouver des idées, en ligne, avec les enfants peut en effet s’avérer plus difficile, plus compliqué. D’où l’intérêt de préparer en amont et de cadrer davantage.”

Quant aux enfants, souligne Valérie Gillon, ils ont appris de nouvelles choses, “à se servir d’un outil de visioconférence, à apprivoiser la technique du partage d’écran…”