UVCW: les communes? le “dernier maillon” trop souvent négligé (2ème partie)

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Par · 25/03/2014

Suite de notre article consacré à l’analyse des points du Mémorandum de l’UVCW qui touchent à l’informatisation des pouvoirs locaux, à l’e-gouvernement et aux infrastructures.

Dans cette deuxième partie de notre article consacré au Mémorandum de l’UVCW, il sera question du rôle de l’eWBS, successeur d’EasiWal, d’IMIO, mais aussi de la légitimité qu’il y aurait pour les communes de “monétiser” certaines de leurs infrastructures. En ligne de mire: faire passer les opérateurs télécom à la caisse.

Un champ d’action élargi

Le mémorandum de l’UVCW consacre l’un de ses chapitres au rôle de l’eWBS (e-Wallonie Bruxelles Simplification). On y lit notamment ce qui suit: “le développement d’outils de simplification, par l’eWBS, successeur d’EasiWal, sera concerté en amont avec l’UVCW afin qu’ils puissent être réalisés de manière telle que leur implémentation au sein des pouvoirs locaux réponde réellement aux besoins de ces derniers. […] Dans ce cadre, l’UVCW et l’eWBS renforceront leur collaboration.”

Cela signifie-t-il que l’UVCW regrette qu’il y avait actuellement un écart, une non-compréhension de la réalité de terrain?


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Morceaux choisis: “Ce n’est pas au privé de jouer les conseillers pour le montage de projets smart cities.” Ou encore: “Les communes ne comprennent pas que certains acteurs puissent exploiter la voire, poser des câbles…, sans que cela rapporte quoi que ce soit”. En ligne de mire les opérateurs télécom…


“On ne peut pas parler d’incompréhension”, tempère Edouard Vercruysse, conseiller expert auprès de l’UVCW. “L’eWBS est un acteur récent dont le champ d’actions a été élargi et c’est une bonne chose. Dans les discussions qu’on a déjà eues avec eux, j’ai l’impression que les choses vont évoluer de manière positive à ce niveau-là. Plutôt que de “meilleure concertation”, je parlerais plus exactement d’un approfondissement des relations afin que leurs compétences puissent permettre aux communes de progresser sur le chemin semé d’embûches de l’e-gouvernement.

L’e-gouvernement ne se décrète pas par un niveau de pouvoir. C’est une chaîne. Cela commence par le fédéral, passe par la Région, arrive aux communes avant de toucher les citoyens. Cela ne peut pas se passer autrement. Le maillon occupé par les communes est essentiel puisque c’est lui qui est en contact avec le citoyen. Si on néglige ce maillon, le citoyen ne perçoit pas l’évolution. A quelques exceptions près comme Tax-on-Web…”

Edouard Vercruysse: “L’e-gouvernement ne se décrète pas par un niveau de pouvoir. C’est une chaîne. Le maillon occupé par les communes est essentiel puisque c’est lui qui est en contact avec le citoyen. Si on néglige ce maillon, le citoyen ne perçoit pas l’évolution.”

Dans le cadre d’une telle “concertation”, quel rôle jouerait l’UVCW? Celui d’un intermédiaire collectant les besoins, les demandes, les projets planifiés par les pouvoirs locaux pour les remonter vers l’eWBS?

“En tant qu’organisation représentative de l’ensemble des communes, nous entendons quotidiennement les soucis et préoccupations des communes. Nous sommes donc mieux placés que quiconque pour exprimer leurs besoins et, surtout, leurs sources de préoccupation majeures. La principale plus-value qu’on peut apporter aux réflexions à mener est d’éviter qu’elles ne planent trop haut ou soient en décalage par rapport aux besoins du terrain, par rapport à la grande variété de situations qu’il y a au niveau communal. Si on veut par exemple définir un cadre d’interopérabilité, un cadre en matière d’open data, de villes intelligentes, autant développer le cadre en connaissant bien, dès le début, le contexte de terrain.  L’UVCW est aussi prête à répondre à des missions ponctuelles qui nous seraient confiées par exemple modélisation, amélioration, standardisation des processus…”


L’un des exemples que prend Edouard Vercruysse pour illustrer le besoin en guidance de la part des pouvoirs locaux est celui des “villes intelligentes”. Il s’agit là d’un sujet – voire d’un concept – tellement vaste, aux multiples dimensions, qu’il serait sans doute impossible de définir des conseils génériques, compte tenu des spécificités sur le terrain. Qui, dès lors, doit jouer les impulseurs, définir le cadre? Cette future cellule de réflexion  et d’encadrement qu’il évoque? Agoria, qui en a fait l’un de ses thèmes-cible? FuturoCité? l’UVCW? la Région? un ministre en particulier?

“Le domaine des villes intelligentes concerne essentiellement des acteurs publics, on est dans le champ public. Il faut certes faire appel à des compétences privées. Mais ce n’est certainement pas au privé de venir expliquer aux communes comment se moderniser, même si les idées sont toujours intéressantes… Il ne faut pas croire qu’on va pouvoir reproduire telles quelles à Liège ou à Charleroi des solutions qui ont été mises en oeuvre, par exemple, par IBM à Oslo ou à Reykjavik.

Ce serait dangereux et je ne crois d’ailleurs pas que les privés veulent jouer les conseillers pour le montage de projets. Ils seraient eux-mêmes, je crois, demandeurs d’un cadre, d’une ambition wallonne en matière de smart cities. Car du coup les communes auraient une meilleure compréhension de la problématique, seraient susceptibles d’initier des projets, de se réunir et de lancer ensemble un marché public… Tout le monde aurait à gagner qu’il y ait plus de réflexion au niveau régional sur la manière d’implémenter les nouvelles technologies dans les communes.”


 

Autonomie “technique”

Dans son mémorandum, l’UVCW estime que “les pouvoirs locaux doivent disposer des moyens de s’assurer une réelle autonomie technique par rapport aux fournisseurs informatiques, garante de l’utilisation efficiente des deniers publics et de la continuité du service public. La Région a déjà fait un pas décisif en ce sens en soutenant les communes qui ont créé IMIO. L’effort régional en ce sens se doit d’être poursuivi.”

Edouard Vercruysse s’en explique: “la réservation ou l’augmentation de l’autonomie par rapport à des prestataires tiers est l’une des plus grandes plus-values d’IMIO. C’est un acteur de confiance. Les communes se sentent ainsi désormais beaucoup moins isolées qu’hier vis-à-vis de leurs prestataires informatiques.”

Comment l’Union voit-elle le rôle d’IMIO à l’avenir? Développement d’outils? conseils? hébergement d’applications voire de données? “Ses rôles sont ceux qu’elle joue déjà. Nous la voyons surtout dans un rôle de fournisseur d’outils de gestion aux communes, en bonne intelligence avec des outils venant d’autres acteurs. Et par ailleurs, comme participant aux des réflexions sur des cadres à développer.

Le plus important pour IMIO, au cours des prochaines années, sera aussi de rester, au quotidien, à l’écoute de ses clients que sont les communes, dans un vrai esprit d’inter-communalité, de travail collaboratif entre communes au service de chacune d’entre elles.”

Redevance Télécoms

Autre demande formulée par l’UVCW: l’élargissement de la redevance électricité et gaz au secteur des télécommunications.

“L’UVCW plaide pour un juste retour financier en cas d’utilisation de la voirie publique à des fins privatives tel que cela existe déjà dans le secteur de l’électricité et du gaz.

Le secteur des télécommunications pourrait, enfin, par cette redevance, payer son dû aux infrastructures communales qui lui permettent de réaliser son négoce. […] Une juste redevance pourrait être réclamée aux impétrants pour l’usage qu’ils font du domaine public dans un but commercial. Cette redevance pourrait être différenciée, selon qu’il y ait utilisation de la voirie communale en sous-sol ou en aérien. […] Ce type de redevance est désormais permis par la Cour constitutionnelle à condition, toutefois, d’être autorisé par décret.”

Edouard Vercruysse: “Les acteurs du monde télécoms, en toute logique, doivent être mis à contribution au même titre que les autres intervenants, dans le domaine du gaz, de l’électricité, de l’eau… Les exceptions historiques n’ont plus lieu d’être aujourd’hui.”

Cette demande se place bien évidemment dans le contexte de la “rentabilisation” des infrastructures des communes. “On se trouve dans un contexte compliqué en termes de budgets communaux. Les communes veulent donc activer le plus possible les pistes à leur disposition pour équilibrer leurs budgets comme elles ont l’obligation de le faire. Les communes ne comprennent pas, ou difficilement, que certains acteurs puissent exploiter la voirie, poser des câbles, sans que cela rapporte quoi que ce soit à la commune, contrairement à d’autres acteurs qui doivent payer pour la même exploitation. C’est une question de logique de non-favoritisme d’un acteur par rapport à un autre. Les acteurs du monde télécoms, en toute logique, doivent être mis à contribution au même titre que les autres intervenants, dans le domaine du gaz, de l’électricité, de l’eau… Les exceptions historiques n’ont plus lieu d’être aujourd’hui.”


La taxe sur les antennes

Dans un domaine connexe, signalons au passage que la Région wallonne a récemment concrétisé dans les textes son idée d’un prélèvement d’une taxe (régionale) sur les pylônes de télécommunications. Une intention qui, on se le rappelle, avait suscité de vives réactions de la part des opérateurs mobiles.

Depuis, un décret a été passé en décembre 2013 prévoyant l’instauration d’une taxe régionale d’un montant de 8.000 euros par site. Toutefois, cette taxe ne viendra pas en supplément des taxes communales pré-existantes puisque la Région stipule qu’“il est fait interdiction aux communes de lever une taxe ayant le même objet. Les règlements communaux portant sur une taxe sur le même objet sont abrogés.”

Pour éviter néanmoins que les communes ne voient ainsi s’évanouir une part parfois appréciable de leur budget, la Région leur reconnaît le droit de lever une taxe additionnelle pour les pylônes établis sur leur territoire.

“Compensation” que salue l’UVCW tout en “regrettant que le principe de l’autonomie fiscale des communes soit écorné.”