”My Digital Future”: révéler les talents ignorés

Article
Par · 06/11/2013

La semaine dernière, le projet My Digital Future, initié voici quelques mois par Ada Sekirin, vice-présidente Benelux de Business & Decision, a connu sa première concrétisation. Pour rappel (voir l’article que nous y avions consacré lors de son lancement), le projet “My Digital Future” vise à sensibiliser les jeunes issus de l’immigration, aux potentiels qu’offrent l’IT et le numérique en termes de carrière et de réussite socio-professionnelle. La “cible”: les jeunes en année terminale de secondaire, fréquentant des écoles en discrimination positive.

Pendant 3 jours, des jeunes ont eu l’occasion de découvrir et de s’impliquer activement dans des ateliers de création (applis mobiles, sites Web, jeux électroniques…). Une expérience jugée plus que positive et qui se poursuivra sous diverses formes à l’avenir.

Les efforts en valent la peine

Comme bien souvent dans le cadre d’initiatives de ce genre, Ada Sekirin a dû persévérer pour convaincre les écoles – celles ayant une étiquette “discrimination positive” n’échappent pas à la règle – de lui ouvrir leurs portes et de lui permettre d’organiser, à destination des élèves (fin de secondaire), des sessions d’information et de sensibilisation aux perspectives professionnelles de l’informatique.

Source: Interface 3

Les refus polis, les portes closes pour cause de “chose compliquée à organiser” ou de désintérêt total, ont été nombreux.

Finalement quatre écoles ont toutefois aménagés leur programme pour permettre à Ada Sekirin de venir faire un petit exposé. Quelque 180 jeunes ont ainsi pu écouter le témoignage de cette chef d’entreprise informatique (Business & Decision, société notamment spécialisée en services d’intégration, BI et CRM), elle-même issue de l’immigration.

La “sensibilisation” n’en est pas restée là. Une invitation a été lancée aux jeunes de venir consacrer un peu de leur temps libre pour découvrir, par la pratique, des horizons que, bien souvent, ils ne soupçonnent même pas.

Trois journées d’ateliers, organisées en deux blocs de 3 heures chaque fois. Sur trois thèmes: programmation ludique (à l’aide du langage de programmation visuelle Scratch); création d’un site Web ou d’un blog (avec WordPress); et construction d’applis mobiles (avec MobiOne).

25 jeunes (dont 3 filles) y ont participé.

Scotchés!

Ada Sekirin et les 4 autres “coachs” sont ressortis de ces ateliers très favorablement impressionnés par ce que les jeunes avaient accompli, alors même que, pour la plupart, ils n’avaient aucune connaissance préalable en programmation.

“Les jeunes ont tous fait preuve d’une très forte implication. Ils nous ont étonnés, tout d’abord par leur discipline, leur concentration, mais aussi par leur créativité et par la vitesse avec laquelle ils ont progressé et réalisé les projets qu’on leur proposait”, souligne Ada Sekirin.

“L’informatique? C’est nul comme métier!” Comment interpréter autrement que tant de jobs vacants ne trouvent pas preneurs… Sacré image à redresser!

Les pauses ont aussi été l’occasion d’échanges, synonymes de prises de conscience. “Nous avons pu constater combien ces jeunes sont peu ou mal informés.” Au sujet des études, des choix qui s’offrent à eux, mais aussi au sujet des carrières informatiques. “L’image qu’ils en ont est terriblement négative. Pour eux, ce sont des métiers “nuls”. C’est en tout cas la conclusion que certains en tirent, tout simplement parce qu’ils voient qu’il y a des tonnes de place libres et personnes pour les occuper. Pour eux, cela veut dire que le métier est pénible, autant que celui de la construction…”

Ada Sekirin en a tiré un enseignement qu’elle voudrait faire passer et assimiler par tous ceux et celles qui peuvent influer sur les orientations des jeunes: “on sous-estime trop à quel point il est possible d’aider ces jeunes, tout simplement en discutant avec eux…”

L’aventure se poursuit

Les ateliers de la semaine dernière auront un prolongement. Non seulement l’expérience sera répétée en 2014 mais d’autres activités et initiatives vont être ajoutées.

Ada Sekirin: “Il ne s’agit pas simplement d’assumer un rôle social. Les sociétés peuvent en tirer, elles aussi, un grand bénéfice tant ces jeunes sont smart, rapides, engagés…”

Premier exemple: un appel à projets.

Les jeunes (notamment ceux qui ont participé aux ateliers) ont jusqu’au 15 décembre pour proposer un projet. Chaque porteur de projet pourra compter sur un coach qui le conseillera, pour monter et présenter son projet, pour l’épauler lorsqu’il “coince”.

Un jury, composé d’entrepreneurs et de personnes actives en IT, se prononcera en avril, jugeant à la fois de l’utilité des projets (potentiel de “monétisation”, aptitude à toucher un maximum d’utilisateurs) et de leurs qualités techniques.

A la clé: un bon d’achat de mille euros (à échanger à la FNAC) mais aussi et peut-être surtout la possibilité pour les porteurs de projets de se voir proposer un stage dans les entreprises ayant un de leurs représentants dans le jury. L’idée lui a été soufflée par Gamal Khaldi, directeur général d’IRIS ICT, qui a par ailleurs accepté de faire partie du jury, de même d’ailleurs que Mohammed Ben Addou de Mentis.

“Mon espoir est que plusieurs sociétés IT s’engagent à accueillir dans leurs rangs, pour des stages ou des emplois, les jeunes issus de ce programme qui auraient porté un projet, se seraient ensuite engagés dans des études informatiques et qui auraient au moins décroché un diplôme de bachelor.”

Et d’ajouter: “je me rends compte aujourd’hui qu’il ne s’agit pas là de simplement assumer un rôle social. Les sociétés peuvent en tirer, elles aussi, un grand bénéfice tant ces jeunes sont smart, rapides, engagés…”

Pour elle, il est urgent d’agir: “Il y a un énorme manque de ressources [dans les métiers IT] alors que, dans le même temps, il y a cette masse de jeunes Bruxellois, cet énorme taux de chômage. Vouloir les former alors qu’ils sont déjà au chômage, c’est agir trop tard. Il faut intervenir plus tôt, dès le stade de l’école.” Pour ne pas sacrifier un beau potentiel.

Appels à implication

Ada Sekirin lance aujourd’hui plusieurs appels pour poursuivre et pérenniser son programme My Digital Future. “Nous avons besoin de coachs, qui viennent renforcer les collaborateurs de Business & Decision qui sont déjà impliqués. Je recherche des chefs d’entreprises et acteurs IT issus de l’immigration, qui pourraient servir de témoins et siéger dans le jury. Je recherche des sociétés qui, en étant dans le jury, s’engageraient à réserver une place de stage à deux jeunes.”

Les bonnes volontés peuvent se manifester via la page Facebook du projet.

Et elle cherche aussi quelques moyens financiers. Jusqu’ici, l’organisation des activités de sensibilisation a été assumée par elle-même et quelques personnes du département marketing de Business & Decision. “J’aurais en fait besoin de services de secrétariat qui me déchargent de tâches voraces en temps, telles que les contacts avec les écoles, le suivi des inscriptions, l’envoi de mails, la tenue à jour de la page Facebook… Pour cela, la piste des subsides devra sans doute être explorée.”

Elle cherche aussi d’autres écoles prêtes à intégrer l’initiative. Et pourquoi pas dans d’autres villes que Bruxelles… Anvers, par exemple, est une piste d’ores et déjà envisagée.