Réseau Smart Work Centers: parcours un rien chahuté

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Par · 13/05/2013

Lors du lancement du réseau wallon de Smart Work Centers, l’ambition affichée était de développer un réseau étoffé. Démarrant avec 8 sites, l’objectif que se donnait EuroGreen IT, à l’époque, était d’arriver rapidement à un total de 30 membres… dès mars 2012. L’espoir était ainsi de pouvoir rapidement s’appuyer sur un “parc” de quelque 5.000 m² de bureaux, 800 espaces de travail individuels et 80 salles de réunion. Des contacts avaient en outre été établis avec Regus mais n’ont pas abouti.

Le réseau et la SCRL qui le gère sont donc restés bloqués sur le chiffre de départ. Plusieurs embûches, rencontrées en cours de route, expliquent cette stagnation du projet. Les raisons données par les divers acteurs qui ont été liés au projet varient quelque peu mais on relève quelques explications convergentes.

Par exemple, la difficulté d’articuler une stratégie de développement-et de démarchage- commercial dans le chef d’un partenariat public/privé piloté, au départ, par la Région. Certains, du côté des acteurs privés, soulignent qu’il était plutôt incongru et inefficace que du démarchage commercial, vers des sites adhérents potentiels, ait été fait, un temps, par EuroGreen IT. Côté responsables publics, on signale que si cela fut le cas, par débordement de responsabilités, ce ne fut que pendant un temps limité et que le relais a été rapidement passé à la SCRL. Qui, elle-même, n’a toutefois pas enclenché directement la mécanique commerciale, pour les raisons indiquées ci-dessous.

Erreur de casting?

Deuxième embûche qui a retardé le décollage? Ce que certains appellent le poids, l’influence et les aspirations du partenaire privé d’EuroGreen IT dans ce projet qui était Cisco. Les technologies et scénarios proposés ne posaient pas, en soi, de problèmes de qualité ou de validité, mais plusieurs intervenants soulignent aujourd’hui que le caractère “end-to-end” de la solution était surdimensionné, rendant la solution trop complexe et onéreuse à mettre en oeuvre dans tous les centres existants ou potentiels.

Smart Work Center Axis Parc (Mont-Saint-Guibert)

L’envergure et les moyens des divers centres n’étaient en effet pas forcément compatibles avec un scénario Cisco. “Les prix étaient trop élevés”, déclare Henri Fischgrund. “La technologie est belle mais trop lourde. Il n’était pas possible de rentabiliser le coût des investissements. Nous avons perdu beaucoup de temps à ce stade du choix de la technologie. Nous nous sommes finalement réorientés vers une solution plus simple” [développée par le duo WiMesh/The Smart Company].

Le fait est aussi que certains sites disposaient déjà d’un équipement, non forcément Cisco.

Pour Jean-Pierre Marcelle, membre du conseil d’administration de la SCRL (il y siège en tant que représentant de FuturoCité/ex-EuroGreen IT), l’argument Cisco est un faux problème: “La présence de Cisco dans le partenariat public-privé [EuroGreen IT] se justifiait pleinement dans la mesure où Cisco est à la base du concept de smart work centers. La relation EuroGreen IT/Cisco s’inscrit dans la volonté de développer le concept de smart work center et de mettre en oeuvre, chez nous, une autre formule de “téléprésence” propre à favoriser le télétravail. Le partenariat, en soi, n’avait pas de but commercial. C’était avant tout un partenariat d’idées et de mise en place d’un concept. Cisco a joué un rôle très fort et primordial à cet égard.”

Autre élément qui a ralenti le processus: la réorientation opérationnelle d’EuroGreen IT (sa mission a été redéfinie comme nous avons déjà eu l’occasion de l’expliquer) qui a été rebaptisé FuturoCité, avec, à la clé, de nouveaux acteurs et objectifs.

Résultat: le réseau qui peinait déjà à s’étoffer, courant 2012, s’est carrément mis au point mort pendant plusieurs mois. “Nous nous sommes rendu compte que nous n’atteindrions pas le chiffre des 30 centres par nous-mêmes”, déclare Henri Fischgrund. “Nous avons alors porté nos regards vers Mobispot, dans la mesure où cette société développe une stratégie similaire. Nous ne voulions pas de réseaux concurrents. Nous avons dès lors stoppé notre propre développement commercial.”

Henri Fischgrund: “La fréquentation actuelle des Smart Work Centers est très en-dessous des capacités. Mais cela est notamment dû au fait que nous avons stoppé tout effort commercial et n’avons pas engagé de personnel de vente dans la perspective d’un accord avec Mobispot…”

Non seulement le réseau est resté modeste par le nombre de ses membres mais la SCRL n’a pas encore signé beaucoup de contrats avec sa cible (grands comptes). “Nous avons 4 ou 5 clients”, déclare Henri Fischgrund. Plutôt maigre.

“Mais nous n’avons réellement lancé la recherche que fin 2012 et que nous avons tout stoppé depuis l’entrée en négociations avec Mobispot”, justifie-t-il. Seul nom de client qu’il s’autorise à dévoiler: Royal Canin. Il estime par contre que le potentiel demeure: “les grands groupes et les grandes entreprises ont besoin, pour leurs collaborateurs, de sites de télétravail qui proposent des technologies de pointe et des potentiels évolués. Par exemple, des accès Wi-Fi personnels, sécurisés.” C’est là l’un des éléments de ce “label de qualité” qui devrait continuer de différencier les smart work centers des autres sites adhérant au réseau Mobispot.

Vers de nouveaux horizons?

Même si elle adhère au réseau Mobispot, la SCRL dit vouloir continuer à essaimer le concept de smart work centers vers d’autres sites d’implantation. Henri Fischgrund évoque, en la matière, plusieurs pistes possibles: des sociétés qui mettraient des bureaux surnuméraires à disposition, des business centers qui étendraient ainsi leur clientèle, des sites situées stratégiquement le long d’axes routiers (tels des relais routiers, de grosses stations service…). “La rentabilité, actuellement, n’est possible que si on considère le concept de smart work center comme un élément venant compléter et s’intégrer à une structure existante. Des smart work centers purs ne sont pas rentables dans l’état actuel des choses.”

Smart Work Center @trium (Les Isnes)

Des contacts avec “un grand groupe, disposant d’une importante force commerciale” sont en outre engagés, dans l’espoir de donner un nouveau ballon d’oxygène au démarchage commercial. Tant la SCRL que Mobispot se cherchent en effet de nouveaux “prescripteurs” afin d’étendre la couverture du territoire belge.

Par ailleurs, la SCRL a renoué des contacts avec Regus. “Lors des premiers contacts [voici environ deux ans], Regus s’était dit intéressé par le concept de réseau et par la perspective d’une adhésion mais ses propres sites utilisaient une autre technologie et il n’était pas évident d’adapter les deux solutions”, explique Henri Fischgrund. “Si nous avions décidé d’adopter la technologie implémentée par Regus, tous les Smart Work Centers et business centers n’auraient pas pu établir une ségrégation entre la gestion des télétravailleurs clients du réseau commun et la gestion de leurs clients propres. Ce qui posait clairement un problème. Aujourd’hui, Regus semble avoir revu ses positions et être ouvert à l’idée de pouvoir créer et gérer des plates-formes qui co-existent.”

Ce que confirme William Willems, directeur commercial régional BeLux chez Regus: “Notre intention est de compter un minimum de 20 sites d’ici la fin 2014, contre 11 actuellement. Là où nous ne disposons encore que de centres d’affaires classiques, notre intention est de proposer divers types de “hotspots” à l’avenir, d’aller là où la demande s’exprime.” Cette extension du modèle a déjà commencé en France, en Allemagne, aux Pays-Bas. Regus vise notamment des sites tels que des gares, des aéroports, des station-service. Un premier site vient d’ailleurs d’être inauguré à la Gare du Midi à Bruxelles. “Nous voulons être là où les gens en ont besoin, dans des circonstances aussi difficiles à planifier que des routes bloquées par la neige ou des transports en commun bloqués par une grève…”.

Il confirme par ailleurs la reprise de contact avec le réseau de Smart Work Centers et l’intention de discuter avec Mobispot. Mais en préservant le caractère multi-services de l’offre Regus. A vérifier donc, dans quelque temps, si les différentes parties parviendront à un accord.