Star Tech: les bacheliers se frottent à l’entrepreneuriat

Portrait
Par · 24/05/2012

Pour la première fois, les 2ème Bac se forment en parallèle au développement technologique et à la vision business dans le cadre de projets destinés à les confronter aux défis des start-ups high tech.

Trois organes sont à l’origine de cette initiative: la Faculté Polytechnique de l’Université de Mons, l’incubateur WSL et l’AIMS (Association des Ingénieurs de la Faculté Polytechnique de Mons). Le projet d’accompagnement pédagogique mis en oeuvre s’appuie sur les méthodes agiles et vise à la création potentielle de start-ups. Cible: les étudiant(e)s de Bac 2.

Initiative concluante puisque vingt d’entre eux ont proposé des projets hi-tech.

Trois équipes (de 2 ou 3 étudiants) ont été jusqu’au bout du processus de trois mois et bénéficieront de 6 mois supplémentaires d’accompagnement par le WSL. L’équipe-lauréate, désignée par un jury, aura en outre droit à un voyage d’études d’une semaine à l’A&M University du Texas, où elle pourra rencontrer étudiants, geeks et coachs, tester sa solution auprès d’un public US et se frotter à la réalité hi-tech d’outre-Atlantique. Et l’expérience sera prolongée: dès l’année prochaine, la Polytech montoise va intégrer des projets technologiques de type Star Tech dans son cursus 2012-2013 tandis que d’autres sites universitaires pourraient reprendre l’idée.

Expérience pilote

“Les étudiants de Polytech sont blindés en connaissances technologiques. Ils ont un énorme bagage. C’est là qu’est le plus gros potentiel d’innovation. Il suffit d’ajouter l’esprit d’entreprendre, l’éveiller, le coacher.” Ces mots sont ceux de Michel Vankerkem, professeur en économie et management de l’innovation à la Faculté Polytechnique de Mons. Aussi a-t-il immédiatement été séduit lorsque Agnès Flémal, directrice du WSL, incubateur liégeois spécialisé dans les sciences de l’ingénieur, a lancé l’idée d’un “student incubator” qui permettrait aux étudiants de bénéficier d’un accompagnement pédagogique.

L’idée? Coacher des étudiants porteurs de projets économiquement intéressants pendant une durée de 3 mois, leur faire prodiguer des conseils en technologies, management, montage de business plan et méthodologies par des professionnels, des coachs WSL et des alumni. Et ce, dès la 2ème bac.

Restait à séduire les étudiants. L’accueil a dépassé tous les espoirs. Sur quelque 80 étudiants, 20 ont proposé des projets. “Nous avions pensé qu’il faudrait solliciter l’AIMs (association des anciens de Polytech) afin qu’ils proposent des idées ou thématiques (sites Internet évolués, logistique de livraison, CRM, entreposage optimisé…). Nous n’avons pas eu à le faire…” Trois projets, impliquant 20 étudiants, ont été au bout de l’expérience.

Caractéristique majeure: le recours aux méthodes agiles, un accompagnement par des coachs à raison d’un atelier d’une demi-journée tous les 15 jours (atelier qui s’ajoute aux programmes de cours existants).

… semer le plus tôt possible

Les initiateurs du programme ont volontairement visé la 2ème Bac afin d’“imprégner le sens de l’entrepreneuriat, le mode de pensée de l’entrepreneur le plus tôt possible et lui permettre de se perpétuer au cours des années ultérieures. Une fois que les ingénieurs rentrent en master, il sont formatés. En deuxième, ils ont encore la liberté d’esprit, de l’imagination non bridée”, souligne Agnès Flémal.

La formule Star Tech a tellement été jugée positive et pertinente qu’elle sera prolongée. D’autres académies et sites universitaires seront approchés, sans doute via les 3 antennes WSL Links qui s’ouvrent cette année à Louvain-la-Neuve, Mons et Gosselies, dans l’espoir de voir d’autres initiatives naître dans un esprit similaire. L’essaimage pourrait également concerner le site WSL de Transinne-Redu, dédié aux applications spatiales (le WSL a décroché le label ESA BIC – Business Incubator Center – de l’Agence Spatiale Européenne). “Des technologies telles que la géolocalisation, par exemple, sont des choses qui intéressent les étudiants et qu’ils peuvent faire avancer… Tant mieux si l’expérience peut servir d’exemple pour promouvoir la sensibilisation à l’esprit entrepreneurial, dégripper certains mécanisme”, déclare Agnès Flémal. “Il faut toutefois pouvoir s’appuyer sur quelques bonnes volontés, du côté des directions et des professeurs. A Mons, nous avons eu la chance d’avoir l’appui volontariste d’un professeur spécialisé en innovation.”

Les trois équipes finalistes

Lauréat de cette première “saison” Star Tech: Pipe-Line.net. Il s’agit d’une solution de type Dropbox mais qui s’en distingue par des mécanismes davantage sécurisés. “Là où tout membre d’un dossier partagé sur Dropbox peut par exemple effacer tout son contenu, Pipe-Line.net offre différents privilèges tels qu’administrateur d’un dossier (pleins pouvoirs) ou utilisateur de base (possibilité de consulter et ajouter des fichiers, sans altérer le contenu existant)”, explique Romain Cambier, l’un des 3 étudiants de l’équipe. “D’autres différences existent aussi, telles que l’authentification en un clic. Pour s’inscrire ou se connecter, si l’utilisateur dispose d’un compte Google ou Facebook, un seul clic sur le logo correspondant suffira à s’authentifier sur la plate-forme, évitant ainsi de devoir remplir des formulaires d’inscription/connexion).

Une application de type Dropbox mais en plus sécurisé…

Le premier groupe-cible identifié a tout naturellement été celui des étudiants qui peuvent ainsi déposer dans cet espace leurs cours, notes, conseils et tuyaux, créer des groupes pour diffuser des messages en temps réel. 2.000 utilisateurs se sont inscrits dès la première semaine.

Un business-plan a déjà été élaboré. “Nos revenus proviennent de deux sources: la publicité, réservée à la version gratuite, et les revenus engendrés par les versions payantes de nos services, qui proposent sécurité et confidentialité.

Le projet devrait donner naissance à une version Pro dès l’été. “Nous proposerons 4 offres différentes (free, premium, business, et backup) offrant des fonctionnalités différentes selon les attentes des utilisateurs. La version business, par exemple, offrira de nouvelles fonctions de haute sécurité, telles qu’un gestionnaire de versions de fichiers amélioré, un système d’authentification ultra sécurisé (en option, mais gratuit avec cette offre) permettant de vérifier l’identité de l’utilisateur (via SMS) à chaque connexion. Un cryptage des fichiers sera aussi effectué avant-même que les fichiers ne quittent la machine de l’utilisateur, ainsi qu’un certain nombre de “plus” dans le but de répondre à un besoin chez les professionnels.”

Autre projet, mené par un duo d’étudiants, s’intitule “Fix my Street”.

Fix My Street: nouvel outil de vigilance citoyenne

Basé sur une idée anglaise qui fait des émules un peu partout (en ce compris à Bruxelles), il permet à tout citoyen armé d’un smartphone d’envoyer des photos signalant un problème de voirie, une incivilité, une dégradation… avec positionnement géolocalisé vers une base de données qui serait par exemple celle du département Propreté d’une commune. L’appli a été proposée à la ville de Charleroi qui s’est dite potentiellement intéressée. Les deux étudiants indiquent toutefois que “la structure et les fonctionnalités sont des aspects qui n’ont pas encore été définis précisément.” Leur appli- et projet- devra donc encore se charpenter.

Le dernier projet Star Tech en lice porte sur l’utilisation d’un gant numérique en lieu et place de la traditionnelle souris.

Data Glove: l’interface se fait gestuelle…

Cette interface homme-machine “personnalisée et personnalisable, qui colle à la peau”, pour reprendre l’expression de l’étudiant, devra permettre de piloter des équipements numériques (ordinateur, smartphones…) par exemple pour changer la musique, ou augmenter le volume sonore par quelques mouvements de doigts, sans devoir sortir le smartphone de sa poche. Au-delà du défi technique, la principale difficulté qu’a identifiée l’étudiant est le financement du prototype. Son idée: se tourner vers du crowdfunding (en l’occurrence vers KickStarter).