Euro-Vote: dématérialiser scrutins et consultations

Pratique
Par · 06/03/2020

Bien que dirigée par des Français, Euro-Vote est une société de droit belge, basée à Bruxelles, positionnée sur le marché de la dématérialisation des processus de vote et de consultation. Votes, sondages et consultations dans des cadres pré-délimités, s’entend (on ne parle pas ici d’élections ouvertes au grand public…). Le mot-clé en fait est “recueil d’opinions” à caractère peu ou prou sensible, en respect de règles d’anonymat.

Cibles? Euro-Vote a tout d’abord fait ses débuts auprès de clients évoluant dans le monde de l’enseignement. En l’occurrence, l’AEFE, l’agence chargée d’assurer le suivi et l’animation du réseau des établissements d’enseignement français à l’étranger. Le réseau avait besoin d’une solution permettant aux parents, où qu’ils résident de par le monde, de participer à l’élection de leurs représentants au conseil d’administration.

Si la société n’a pas abandonné ce marché de l’enseignement (il reste un important contributeur à son chiffre d’affaires et l’une des cibles qu’elle compte explorer notamment en Belgique), sa clientèle s’est depuis lors diversifiée pour inclure également le monde des entreprises et des associations ainsi que le secteur public, de la santé, voire l’univers des… partis politiques. Un parti français (dont le nom ne peut être révélé pour des raisons de confidentialité) a ainsi fait appel à ses services pour une consultation (interne) de ses membres. Un autre parti, belge cette fois (là aussi, pas de nom cité), a pris contact en vue d’utiliser éventuellement la solution Euro-Vote pour organiser ses élections internes.

Confidentialité et anonymat

Euro-Vote propose donc une solution de vote en-ligne en revendiquant deux spécificités: sécurité et anonymat des données… La principale particularité d’Euro-Vote est de ne pas détenir ou conserver elle-même les données personnelles concernant les votants. “Nos clients déposent en fait leurs listes et fichiers de données personnelles [des personnes à solliciter pour une consultation] auprès d’un tiers de confiance assermenté, en l’occurrence un huissier de justice”, explique Stéphane Leleu, co-fondateur de la société. Autre possibilité: les données personnelles ne quittent jamais l’environnement du client.

Le système de vote en-ligne, pour sa part, est hébergé sur l’infrastructure d’Euro-Vote (infrastructure externalisée chez Gandi, en France et au Grand-Duché, et chez OVH). Les données, quoi qu’il advienne, demeurent sur le sol européen, selon des règles de traitement respectueuses des dispositions du RGPD.

Le schéma choisit permet de dissocier données des votants, d’une part, et résultats de votes, sondages et consultations, de l’autre, hébergés et consignés dans des environnements et sur des serveurs distincts.

Stéphane Leleu (Euro-Vote): “Nous ne gardons aucune donnée personnelle et nous garantissons l’anonymat de la consultation. C’est essentiel pour recueillir des opinions franches.”

Le principe? Euro-Vote crée, sur son infrastructure, l’environnement privatif de vote destiné spécifiquement à l’exercice de la consultation de son client. Des tests et authentifications interviennent alors en collaboration avec le tiers assermenté. Ce dernier, pour autoriser le déroulement de la consultation, octroie ensuite un accès au système pour les personnes reprises dans la liste que le client lui aura confiée.

Un lien et une clé d’accès à usage unique sont envoyés par courriel à chacun des participants sollicités. Les votants peuvent ainsi s’authentifier par le biais du système du tiers, au moyen du duo classique (adresse mail et code personnel) ou d’un mécanisme plus sophistiqué (par exemple une double authentification via envoi d’un code par SMS à introduire dans le système). 

“C’est une certaine forme de blockchain”, déclare Stéphane Leleu, “mais qui préserve la capacité d’audibilité des échanges et de destruction des données – listes et bulletins – après expiration du délai de recours. Ce que ne permettrait pas une solution blockchain pure.”

Dans l’état actuel des choses, Euro-Vote ne prévoit pas le recours à la carte d’identité électronique ou à une solution du genre Itsme, “parce que le besoin ne s’en est pas encore présenté. Si nous devions un jour travailler pour un client tel qu’une commune, peut-être un système plus évolué d’authentification serait-il requis mais pour l’heure, notre mécanisme d’authentification est suffisamment fort et flexible”, affirme Stéphane Leleu.

Autre élément de la sécurité du système: le chiffrement. Non seulement pour les clés (fournies au tiers de confiance et aux votants) mais aussi pour le document de consultation (questionnaire…) proprement dit. Avec des nuances toutefois selon que le but poursuivi soit électif ou consultatif. “Crypter la totalité d’un questionnaire peut s’avérer trop lourd. Par contre, pour les processus électifs, les données collectées sont cryptées jusqu’au dépouillement. Pour une simple consultation, il peut fort bien ne pas y avoir de chiffrement [des données] dans la mesure où les résultats doivent parfois pouvoir être lus en temps réel.”

Processus consultatifs et électifs

Euro-Vote propose sa solution à des clients pour deux types de consultation: de nature élective, à pouvoir décisionnaire – c’est sur ce terrain que la société voudrait essentiellement développer ses activités à l’avenir – ou simplement de nature consultative. Dans ce dernier champ d’action, l’argument que fait valoir Stéphane Leleu est celui d’un “outil flexible, aisé à mettre en oeuvre rapidement, pour des consultations express sur des sujets parfois sensibles. Cela peut intéresser les entreprises mais aussi des clients tels que des partis politiques. Ces derniers, en effet, sont appelés à s’adresser de plus en plus à leurs membres et adhérents. C’est là une tendance participative à laquelle ils n’échapperont pas…”

Côté entreprise, la société cite un nom belge: l’enseigne Vandenborre a fait appel à elle pour une étude RH interne.

Notons encore que même si le coeur du positionnement d’Euro-Vote est celui du vote entièrement dématérialisé, la société n’en renie pas pour autant les procédures papier ou physiques. Du genre, document de consultation sous enveloppe scellée ou masqué (à la manière d’un billet de loterie). “Dans un cas comme dans l’autre, nous n’avons aucune connaissance de l’identité des personnes auxquelles les clés d’accès au vote ou l’enquête seront distribuées.” 

Le modèle commercial? Euro-Vote pratique un tarif fixe: mise en oeuvre d’une plate-forme personnalisée de vote pour 1.000 votants pour 1.000 euros ; ensuite 30 cents par votant supplémentaire et tarif dégressif. Le client peut en outre réutiliser son environnement de vote pour des consultations ultérieures à un coût plus abordable (200 euros, toujours pour 1.000 votants, à partir du 2ème scrutin).

Des ambitions sur le sol belge

A l’heure actuelle, la société réalise encore la quasi-totalité de son chiffre d’affaires grâce à des clients dans le secteur de l’enseignement (hors Belgique) ou de quelques entreprises qui ont recours à elle pour effectuer des études dans divers pays du monde, des sondages ou des études de type benchmark. Pour certaines de ses activités de sondages consultatifs en milieu d’entreprise, Euro-Vote opère en mode marque blanche.

 

Stéphane Leleu (Euro-Vote): “Nous sommes encore peu présents en Belgique mais nous avons vraiment comme en ambition de nous développer sur ce marché.”

 

Ses ambitions en termes de type de clientèle? “Nous espérons pouvoir convaincre les associations et groupements européens, très nombreux à Bruxelles.” Autres types de clients visés: les établissements d’enseignement, les entreprises, les administrations et organes politiques.