Des communes de plus en plus engagées dans des projets “smart city’

Pratique
Par · 15/06/2018

Le Smart City Institute a réalisé un nouvelle enquête, entre octobre 2017 et avril 2018, auprès des 589 communes belges afin de déterminer l’état d’avancement de leur (éventuelle) stratégie “smart city” et des projets initiés ou planifiés. Près d’un quart d’entre elles y ont participé. Plus d’informations sur la méthodologie en fin d’article.

Premier constat: 35% des communes ont formalisé des objectifs “smart city” dans le cadre de leur stratégie globale. Et – est-ce de l’auto-satisfecit pur, une vision optimiste de la situation ou le reflet de progrès concrets? – pas moins de 35% des communes participantes disent “être au moins à mi-parcours de la démarche qui leur permettra de devenir une smart city accomplie”. Trois communes s’octroient même une note de 9 sur 10. Le tout, évidemment, est de savoir comment chacune définit la notion-même de smart city, le “parcours” qu’elle envisage et la teneur de ce dernier!

Ce qui peut sans doute “mettre la puce à l’oreille” et modérer l’optimisme, c’est la manière dont les communes s’auto-évaluent selon qu’elles soient flamandes, bruxelloises ou wallonnes. Le score moyen (pour rappel: auto-évaluation) côté flamand est de 3,53 sur dix. En Wallonie, il est de 3,72 sur 10 et à Bruxelles de 4 sur 10.

Si l’on creuse l’analyse par province, certains signes sont révélateurs et vont dans le même sens (prudence, prudence!). Province de Liège: 2,68 sur 10. Brabant flamande: 3 sur 10. Mais… 4,80 sur 10 en Hainaut (le plus optimiste de tous!), battant même Anvers, avec ses 4,42 sur 10. Là où le Brabant flamand est prudent, avec son 3 sur 10, le Brabant wallon est nettement plus optimiste: 4,29 sur 10.

La “smart city”, ce n’est pas que de la technologie

Autre constat de l’enquête du Smart City Institute: il semble se confirmer qu’au fil du temps, les communes mettent moins l’accent sur une dimension essentiellement technologique. Certes, la “transformation numérique” demeure le dénominateur commun dominant mais, souligne le rapport du Smart City Institute, “dans la réalité stratégique des communes interrogées, il ressort que celles-ci s’écartent de l’approche purement digitale de la ville intelligente, puisqu’elles placent les facteurs humain et institutionnel légèrement au-dessus du facteur technologique.” A noter que par “institutionnel”, les auteurs de l’étude font référence notamment au “souhait d’améliorer les systèmes de gouvernance et de travail entre les acteurs stratégiques”.

Le paramètre institutionnel arrive en tête auprès des communes de six des dix provinces belges. Seul le Brabant wallon place résolument le facteur technologique en première position.

Des perceptions inégales

Un processus “smart city”, c’est…

  • la digitalisation de la ville: 73%
  • le développement d’un contexte urbain (municipal) durable: 63%
  • un moyen de développer une vision globale des enjeux de la commune: 59%
  • un moyen de renforcer la participation inclusive des communautés (citoyens, acteurs publics et privés): 59%.

L’année dernière, le facteur technologique apparaissait encore en deuxième position…

L’optique varie néanmoins – et de manière logique – selon que la commune soit de type urbain ou rural. En environnement urbain, les trois définitions reine sont digitalisation de la ville (77%), développement urbain durable (68%) et développement d’une vision partagée (61%).

En milieu rural, c’est la participation inclusive qui prend le dessus (62%), la digitalisation n’obtenant que 58% et le développement d’une vision partagée 50%.

La digitalisation de la cité? Pas un but en soi. Dr. Djida Bounazef, chercheuse au Smart City Institute: “les technologies (digitales) doivent être perçues comme un outil favorisant l’amélioration de la qualité de vie, la créativité, la participation citoyenne ou la gouvernance sur un territoire donné.”

A noter également des différences de perception entre Régions. En Flandre, la “digitalisation de la ville” arrive encore en tête (perception moyenne sur l’ensemble des 58 communes flamandes ayant participé à l’enquête). A Bruxelles et en Wallonie, par contre, la digitalisation ne décroche pas la première place. Elle arrive 3ème à Bruxelles (mais avec un score de 75%) et 2ème en Wallonie (59%). A Bruxelles, l’unanimité (100%) se fait sur deux critères: amélioration de la qualité de vie et amélioration de la planification et de l’exécution des projets.

L’initiative vient encore souvent d’“en haut”

Les projets smart city demeurent généralement initiés par les autorités communales ou locales, davantage que sous l’impulsion – ou la pression  – des citoyens.

Classement des initiateurs, par ordre décroissant d’importance (ou de fréquence):

  • autorités publiques: 70% (situation inchangée par rapport à 2017)
  • secteur privé: 13%
  • société civile: 8%
  • universités: 7%.

On note toutefois une légère progression dans l’implication de ces trois dernières catégories. Au Smart City Institute, on pointe toutefois une raison potentielle pour le manque de poids qu’a encore l’impulsion bottom-up: “des initiatives émergent certes de la société civile et du secteur privé mais elles restent peu connues ou peu exploitées par nos communes”, déclare Carina Basile, directrice des opérations au Smart City Institute. “Les communes semblent avoir des difficultés à mettre en œuvre des pratiques collaboratives entre tous les acteurs impliqués, limitant ainsi la formalisation d’une vision partagée et d’objectifs smart dans leur stratégie globale.”

Il y a progrès mais encore pas mal d’efforts à livrer en la matière, pour “renforcer un écosystème plus intégré et dynamique”, impliquant une “ouverture qui s’opère déjà plus concrètement auprès des organisations parastatales, des intercommunales et des consultants. Néanmoins, tout comme en 2017, les acteurs intra-communaux ont encore une place décisive dans la gestion et le suivi des projets Smart City.”

On relève par ailleurs un léger progrès dans l’implication du citoyen – mais elle intervient encore souvent a posteriori, lorsqu’il s’agit de collecter son “ressenti” une fois les projets déployés. Chose qui était encore pointée comme une grosse lacune l’année dernière. 

A l’occasion de l’enquête 2018, il s’avère qu’environ une commune sur cinq dit “impliquer les citoyens dans les projets lancés et mettre en place des indicateurs et tableaux de bord pour évaluer les retombées des projets”.

Ce ratio d’une sur cinq n’est qu’une moyenne. En prenant la peine de creuser le chiffre, les auteurs de l’étude se sont aperçus que la tendance à l’implication est plus marquée du côté rural: 27% contre seulement 16% pour les communes urbaines.

Beaucoup de chemin reste également à faire du côté de l’évaluation et du suivi des projets:

  • 28% des communes participants disent “ajuster et modifier régulièrement” leurs plans d’actions stratégiques (la Flandre semble être plus active dans ce domaine avec 41% ; le score est même de 67% en province de Limbourg)
  • 19% impliquent le citoyen
  • seulement 19% mettent en place des indicateurs et tableaux de bord
  • et elles sont encore moins nombreuses (12%) à avoir constitué un comité d’évaluation composé d’acteurs publics.

 

Projet ou stratégie?

Constat intéressant tiré par l’enquête du Smart City Institute: “A ce stade, les communes belges s’initient à la smart city en travaillant en silo et en mettant en place des projets sectoriels dans les différents départements.

Seules 13% d’entre elles ont développé un plan dédié à la Smart City. Elles sont plus nombreuses en Wallonie, à Bruxelles et dans les communes rurales. Il est toutefois intéressant de noter qu’une commune sur deux envisage d’élaborer une stratégie et des projets smart city.”

Au travers de son enquête, le Smart City Institute a identifié 558 projets smart city sur le territoire belge. Pour une moyenne de 5 projets par commune.

Les thématiques privilégiées

  • optimisation énergétique: 44%
  • participation citoyenne: 44%
  • gouvernance: 44%
  • transport et mobilité: 43%
  • attractivité et développement économique: 42%
  • télécommunication, digitalisation et innovation: 40%.

A noter toutefois des thématiques sensiblement différentes si on prend plus spécifiquement les zones rurales en considération. Les projets semblent davantage y concerner des déploiements technologiques tels qu’éclairage LED intelligent, télécommunication, digitalisation, innovation (et optimisation environnementale).

Le rapport du “Baromètre 2018 Smart City” du Smart City Institute, détaillant les résultats de son enquête, peut être téléchargé via cette adresse.

Méthodologie

Le Smart City Institute a réalisé son enquête via questionnaire en-ligne, entre octobre 2017 et avril 2018, auprès des 589 communes belges. Près d’un quart d’entre elles (21%, soit 123 communes – 61 communes wallonnes, 4 bruxelloises et 58 flamandes) ont participé à l’enquête.

Le questionnaire avait été structuré en plusieurs volets:
– compréhension du concept de “Smart City” (perception des notions, importance accordée aux facteurs technologiques, humains et institutionnels, auto-évaluation de l’état d’avancement d’une démarche smart city)
– analyse des axes stratégiques développés (pré-requis, principales thématiques, actions de formalisation…)
– mise en œuvre et suivi des projets (niveau d’implication des différents acteurs, moyens de  financement, bénéfices générés, obstacles rencontrés).  [ Retour au texte ]