Des capteurs “algorithmés” pour mieux veiller sur des seniors à domicile

Pratique
Par · 11/02/2019

Spécialiste de la sécurité (physique) de bâtiments, qu’ils soient résidentiels ou professionnels (systèmes d’alarme, vidéosurveillance, détection d’incendie, solutions domotiques…), AnB-Rimex, basé à Herstal, désire développer un nouveau service destiné spécifiquement à la surveillance des activités (déplacements, actions) de personnes âgées isolées au sein de leur habitation. Un service qui serait une extension de ses solutions Tricom existantes. Nom de baptême: TriCare. Une solution de plus donc surfant sur le thème du “maintien à domicile”. 

La solution TriCare, actuellement en phase de test et dont le développement a été financé par la Région wallon, fait appel à plusieurs types de capteurs (intra-rouge, contacteurs de porte ou de fenêtre, détecteurs de mouvement, de pression…) pour collecter un maximum de données pouvant “cartographier” et révéler l’activité d’une personne. La société ne désire par contre pas faire usage de caméras, plus ou moins indiscrètes, expliquant que sa solution veut préserver le plus possible la vie privée des personnes ainsi “tracées”.

Le côté novateur de cette solution, qui sera en test auprès d’une personne isolée âgée jusqu’à la fin de l’année, lui vient du fait que les données collectées seront analysées par des algorithmes, en ce compris en temps réel, ce qui permettra, en cas d’anomalie ou de déviation par rapport à la “normale”, de générer des notifications d’alertes, par exemple à destination des proches ou des aidants.

Il n’y a pas de “senior lambda”

Revenons-en à la solution telle qu’imaginée par AnB-Rimex.

Les petits gestes du quotidien, les déplacements et taux d’activités étant spécifiques à chaque individu, l’analyse des données générées par les capteurs ne peut reposer sur un schéma théorique. La société a dès lors décidé de recourir à l’intelligence artificielle pour adapter et personnaliser les paramètres d’alerte. Pour ce faire, AnB-Rimex s’est tournée vers le Cetic qui a développé le module logiciel, intégré dans la carte électronique de la centrale d’alarme Tricom, qui collecte et interprète les données collectées.

L’analyse des activités se fait sur base de l’interprétation des données collectées par les capteurs, de données de référence pré-encodées (habitudes de vie individuelles – repos, toilette, repas, déplacements, tâches ménagères, temps de relaxation, interactions sociales…) et de l’historique des activités de chaque individu.

Les “habitudes de vie individuelles” (ADL, pour Activities of Daily Living, en anglais) sont des paramètres standard, traduisant un comportement ou “fonctionnement” normal d’une personne, documentés par des professionnels de la santé, notamment des gériatres. Une dizaine de ces ADL ont été définis pour servir de cadre de référence évaluant les phases du quotidien (toilette, repos, sommeil, contacts sociaux…). “L’interprétation des données a évidemment ses limites”, souligne Lotfi Guedria, collaborateur du Cetic qui fut en charge du projet. “Si on peut par exemple savoir combien de temps une personne passe à la cuisine, il est plus difficile de déterminer si elle a cuisiné pour se faire un repas. Ou si elle quitte sa maison, si c’est pour aller se promener dans le quartier, rencontrer une amie ou faire ses courses.” Il faudrait pour cela étendre le champ des données collectées (smartphone éventuel, compteur de consommation d’énergie…).

Lotfi Guedria (Cetic): “Le système a été conçu de telle sorte à pouvoir détecter des déviations légères ou fortes par rapport aux habitudes normales de vie au quotidien,.”

Les informations correspondant aux habitudes de vie seront par contre corrélées avec un certain nombre de paramètres propres à l’environnement de l’occupant: disposition des lieux, période de la journée ou de la nuit, durée des activités, ressources ou objets sollicités par les activités, position du corps…

Toute anomalie relevée dans le comportement du senior (et donc considérée comme tel par l’algorithme embarqué) donne lieu à une alerte, envoyée par mail ou SMS…

Des exemples? L’ouverture du réfrigérateur ou une consommation électrique inhabituelle dans l’une ou l’autre pièce en pleine nuit. Une “activité” qui dépasse les durées habituelles, signe potentiel d’un malaise. Un déplacement plus fréquent que d’habitude vers les toilettes.

Un premier pas?

Si le projet de développement et de prototypage est terminé, reste à tester la solution en situation réelle et à procéder aux éventuelles adaptations. A l’issue de cette période de test, AnB-Rimex pourra commercialiser la solution tandis que le Cetic envisage d’élargir le champ d’applications à d’autres domaines (par exemple, la surveillance et optimisation de consommation énergétique). “Le module logiciel développé est en effet un composant générique, que nous avons voulu léger. Il pourra donc être intégré à divers dispositifs, en ce compris en milieu extérieur”, souligne Lotfi Guedria, collaborateur du Cetic qui fut en charge du projet. “Nous aimerions également le publier en open source…

Selon la nature, la durée ou la chronologie de l’anomalie, le système décidera du niveau et de l’urgence de l’alerte.

Par exemple, si le capteur de porte placé sur la porte d’entrée ne détecte pas le retour de la personne à son domicile avant la tombée de la nuit ou si aucune activité n’a été détectée, au sein du domicile, pendant un laps de temps inhabituel, une alerte immédiate sera déclenchée. Idem si la présence du senior est détectée pendant un laps de temps anormalement long à la salle de bains…

Une alerte sera également envoyée si des signes anormaux ont été relevés à une fréquence déterminée pendant un laps de temps donné.

Le système pourra aussi détecter un schéma de détérioration sur une période plus longue, par exemple une durée de sommeil qui diminue au fil des jours. Dans ce cas, le déclenchement du message d’alerte interviendra forcément à plus long terme.

Tarification de la solution? La société propose sa solution sous forme d’abonnement à un service. Dont coût: 50 euros par mois.

D’autres fonctions par la suite?

Dans le cadre de la solution visée par AnB-Rimex, les alertes sont destinées aux aidants ou à un membre de la famille. Sous forme de SMS ou de mails.

On pourrait imaginer que les données servent également pour des professionnels de la santé, “par exemple sous forme de rapport synthétique qui pourrait être présenté lors d’une visite chez le médecin”, imagine Lotfi Guedria. Ou des données, synthétisées ou non, présentées sous forme de graphiques ou non, auxquels les médecins et/ou les infirmières à domicile pourraient avoir accès. “Tout est possible, tout est configurable”. 

Le test en cours permettra sans doute d’affiner les possibilités et la manière dont le Cetic pourrait en faire bénéficier d’autres bénéficiaires, moyennant éventuellement de nouveaux développements.

La période de test servira de toute façon à valider la pertinence des scénarios et des paramètres pré-configurés. “On pourra par exemple déterminer s’il est nécessaire de permettre aux aidants d’adapter l’un ou l’autre paramètre ADL, si les profils pré-encodés, basés sur des paramètres standard en fonction de l’âge, notamment, sont pertinents.”