Baromètre Smart City Wallonie: la digitalisation n’est pas une priorité

Pratique
Par · 09/02/2018

Le Smart City Institute publie un nouveau “baromètre” Smart Cities entièrement dédié à l’analyse de la situation des villes et communes wallonnes. 58 communes ont participé à cette enquête (voir méthodologie en fin d’article). Angles d’analyse:

  • les “perceptions et état d’esprit”, la compréhension du concept de ville intelligente ; du “J’y vais / j’y vais pas – J’y crois / j’y crois pas”, en quelque sorte. A noter d’emblée à cet égard que l’on dénombre encore près d’un cinquième des communes wallonnes (19%) qui n’ont encore aucun projet Smart City sur leur territoire ou dans leur stratégie de gestion
  • les stratégies développées et les grandes tendances qui les caractérisent
  • la mise en oeuvre et le suivi de projets: niveau d’implication des différents acteurs, financement, évaluation…

Principales conclusions?

Premier constat: l’optique semble avoir évolué en l’espace d’un an. Si beaucoup étaient braqués sur les aspects purement technologiques (c’est ce que révélait l’étude publiée en 2017), les décideurs municipaux accorderaient désormais davantage d’attention à la gouvernance et aux facteurs humains (créativité, santé, formation, connaissance…).

Jonathan Desdemoustier (Smart City Institute): “Dans le contexte des villes intelligentes, dont les objectifs de durabilité – prospérité économique, diminution des impacts environnementaux et bien-être social – se pensent sur le long terme, il est logique que la technologie, outil essentiel, soit plutôt perçue davantage comme un facilitateur que comme une fin en soi.”

Les doutes voire craintes par rapport au concept de “smart city” n’ont pas tout-à-fait disparu. Et de manière peut-être étonnante, le score est plus élevé du côté des communes urbaines (14%) que du côté des rurales (5%).

Les priorités “smart city”?

Le concept de “ville intelligente / connectée / durable” étant fort large, les priorités ou définition concrète qu’en donnent les villes et communes varient sensiblement. Quels sont les thèmes qui récoltent le plus d’adhésion et d’intentions d’actions?

  • les matières énergétiques arrivent en tête, en particulier l’éclairage dit intelligent et les infrastructures LED : 59%
  • suit l’optimisation énergétique, avec 52%
  • ensuite, la gouvernance et la participation citoyenne progressent dans le classement: désormais 50%
  • la numérisation (solutions et processus) et l’IT affichent un score de 41%
  • la mobilité, qui, traditionnellement, arrive en tête de liste, semble perdre du terrain, n’étant citée qu’en cinquième position (40%).

Preuve que la définition première que donnent les villes et communes n’est pas celle d’une cité numérisée, seulement 2% des villes wallonnes ayant participé à l’enquête “se disent digitales et numériques.”

Leur prisme reste essentiellement des paramètres d’économie et gestion durables. Dans le questionnaire proposé par le Smart City Institute, une question portait sur le type de slogan qui conviendrait le mieux à leur stratégie ou perception. Neuf slogans étaient proposés: Ville, commune durable ; Ville, commune créative ; Ville, commune verte ; Ville, commune digitale/numérique ; Ville, commune intelligente ; Ville, commune vivante/dynamique ; Ville commune intégrée; ou Ville, commune compétitive.

A ce petit jeu, c’est “Commune vivante et dynamique” qui l’emporte avec 53%. L’image de “Commune intelligente” n’engrange que 9%.

Quel soutien les communes obtiennent-elles des instances et acteurs directement concernés?

  • 52% des communes interrogées ayant répondu à l’enquête disent être soutenues par leurs élus politiques
  • 28% estiment que tous les acteurs concernés développent une vision commune
  • 31% disent pouvoir s’appuyer sur une équipe transversale
  • implication des citoyens: la moyenne globale est évaluée à 28% mais l’implication semble être plus grande du côté des communes rurales (38%).
Principaux obstacles cités:
  • difficulté de mobiliser des budgets : 50% des réponses
  • manque d’expertise au sein de leur administration : 38%
  • dynamique d’acteurs complexe à instaurer : 31%.
Comment sont suivis et évalués les projets initiés?

Seule une minorité de communes a déjà imaginé un scénario de suivi. Près d’un-quart sont en phase de définition d’indicateurs pertinents.

Parmi celles qui ont déjà pensé à un suivi, seules 7% s’appuient sur un comité mixte composé d’acteurs de la société civile, du secteur privé et du secteur public. Et seules 26% impliquent les citoyens dans cet exercice. Autrement dit: les premiers intéressés n’ont pas réellement de poids dans l’évaluation et ne peuvent donc guère peser sur les aménagements ou rectifications de tir.

Plus d’un quart des communes interrogées (26%) n’ont encore désigné aucune personne pour initier, gérer ou assurer le suivi de projets Smart City.

La question des indicateurs et paramètres de surveillance semble bel et bien poser un problème. Soit ces indicateurs sont aux abonnés absents, soit la commune ne sait pas très bien quoi ou comment mesurer l’impact de ses projets Smart City. Si des balises ne sont clairement définies et utilisées, le découragement pourrait rapidement mettre à mal les bonnes volontés.

L’étude du Smart City Institute révèle ainsi par exemple que “31% des communes wallonnes estiment n’avoir noté aucune retombée significative. Une proportion similaire parle de “résultats intangibles – augmentation de la participation citoyenne, amélioration de la qualité de vie, etc. – tandis que 29% des communes estiment réduire leurs coûts.”

Les 9 plus grandes communes de Wallonie (Charleroi, La Louvière, Liège, Mons, Mouscron, Namur, Seraing, Tournai, Verviers) estiment être à mi-parcours dans le processus menant à la Smart City. Toutes communes confondues, la moyenne de progression est (auto-)évaluée à 3,67 sur une échelle de 1 à 10.

Pour pallier à cette embûche majeure, un projet de recherche dédié à l’évaluation des impacts des initiatives Smart City a été lancé par le Smart City Institute initié dans le cadre du projet Wal-e-Cities qui bénéficie notamment de fonds FEDER.

L’étude ne veut toutefois pas en rester sur une note négative et estime que plusieurs signaux et tendances sont plutôt encourageants: “Ce baromètre fournit de nombreux signaux positifs quant aux perspectives, tels qu’une compréhension plus large du phénomène, une vision claire des pré-requis essentiels et la mise en place de projets concrets.”

Tous les chiffres et analyses de ce Baromètre “Etat des lieux du développement du phénomène des Smart Cities en Wallonie” peuvent être consultés via ce lien.

Méthodologie

Enquête menée, en-ligne et via téléphone, entre octobre 2017 et janvier 2018

Echantillon: 58 communes, soit 22% du total (262), avec équilibre représentatif en termes de localisation géographique, de taille de commune et de type (urbaine, rurale).

Personnes sondées: directeurs généraux, Smart City managers, chefs de services et directeurs communaux. [ Retour au texte ]