PleezMee: bon plaisir doit rester perso

Portrait
Par · 09/02/2017

Au gré des hackathons ou autres Startup Weekends, on croise souvent des idées et des projets qui ont un petit goût de déjà-vu, de “je retente une idée déjà prise mais sous un petit angle différent”. Tout cela, parfois, donne l’impression d’un manque d’imagination ou d’audace pour s’aventurer davantage en terrain inconnu, pour des choses qui aient davantage de chances de “changer le monde”.

A première vue, c’est l’impression que l’on pourrait retirer du projet PleezMee. Sauf que…

L’idée derrière PleezMee est simple: utiliser les potentiels de géolocalisation et de capture visuelle des smartphones pour se constituer un petit pense-bête multi-sujets — un objet ou un vêtement entr’aperçu en vitrine et qu’on s’offrirait bien ou qui serait un cadeau parfait pour telle ou telle personne ; un lieu où l’on se verrait bien passer, plus tard, un moment agréable ; etc. etc.

Comme le dit Vanessa Davin, à l’origine du projet PleezMee, “chaque jour, des idées nous viennent, nous croisons des lieux qui suscitent notre intérêt, des choses que nous aimerions acheter mais, par manque de temps ou parce que ce n’est pas le bon moment, elles nous échappent”.

L’appli mobile PleezMee (encore au stade de la version bêta) se propose donc de capter, de mémoriser, d’organiser les “coups de coeur” en listes thématiques, et de les rappeler à l’intéressé au moment opportun. Trois moyens pour le faire: une photo, quelques notes introduites via le clavier virtuel, du scraping si l’info se trouve sur un site Internet. A chaque fois, le smartphone retient l’endroit qui correspond à l’information saisie.

Tout cela est bien beau mais déjà exploité par d’autres…

Les petits plus

PleezMee se propose non seulement d’organiser les notes par thèmes mais aussi de les croiser avec les destinataires, via les listes d’“amis” qui sont également encodées, avec détails de profil et préférences: petit cadeau pour tel ou telle, invitation resto ou culture pour x ou y…

Les notes, si elles sont bien encodées, déclencheront le moment venu des rappels. L’utilisateur pourra choisir de les partager avec certains de ses “amis” figurant dans ces listes. Cela leur ouvrira l’accès à ces notes afin qu’ils puissent ajouter leurs propres idées.

Autant de fonctionnalités intéressantes mais pas suffisantes pour se distinguer du lot.

Là où PleezMee se propose d’aller plus loin, c’est en voulant parier à la fois sur une utilisation purement personnelle et une piste de monétisation B2C/B2B et… en respectant des règles de protection de la vie privée que trop de solutions “oublient” effrontément.

Pas de vente sauvage de données

Se rappeler des coups de coeur ou les partager avec autrui ne mène pas loin en termes de rentabilité. C’est là que certains tentent de monétiser en vendant aux marques le rôle d’influenceur et d’hommes/femmes sandwich des temps modernes qu’ils jouent via les réseaux sociaux. On “like” un vêtement et cela devient un relais publicitaire pour la marque qui “récompense” son ambassadeur “bénévole”.

PleezMee ne surfe pas sur cette vague. Son approche consiste certes à monétiser l’usage de l’appli auprès des marques et enseignes mais en respectant certaines règles de protection de la vie privée.

Les marques qui seront sollicitées sont celles des secteurs lifestyle, beauté, loisirs, décoration, accessoires… qui pourront proposer à la communauté PleezMee des produits que ses membres aiment. Comment ces marques sauront-elles qui, dans la liste d’utilisateurs et d’amis, est intéressé par leurs produits?

“Si quelqu’un prend un cliché d’un vêtement dans une boutique, nous pouvons géolocaliser ce magasin et lui fournir cette info précieuse pour ses campagnes et son taux de conversion. Mais nous ne vendrons pas les données des utilisateurs mais, avec leur consentement préalable, nous pourrons proposer aux marques ou aux magasins des cibles anonymisées sous forme de listes que nous constituerons nous-mêmes en comparant leur base de données de produits avec les préférences des utilisateurs enregistrées dans PleezMee.”

PleezMee veut donc garder la main, être à l’initiative sur ce que peuvent voir ou non les marques. Mais ce sera pour la jeune pousse un réel défi de trouver le juste équilibre entre le push des marques et la préservation par l’utilisateur de son droit à déclencher lui-même son envie de petits plaisirs…

Sans brider le potentiel. Car PleezMee veut aller plus loin dans le potentiel de “recommandation/inspiration”. Elle projette par exemple de développer un algorithme qui, sur base des préférences qui se révèlent et s’affinent au fil du temps et d’une analyse des contenus textuels ou visuels stockés, pourra gérer, trier, relayer automatiquement les messages en provenance des marques. Une “inspiration” ciblée, déclenchée par les marques, mais réalisée en semi-aveugle par ces dernières, sur base de préférences anonymes contenues dans les profils.

Sur le métier, remets ton ouvrage…

L’appli PleezMee n’est pas encore disponible. Son lancement est planifié pour le courant du printemps. La jeune équpe doit par exemple encore finaliser les fonctions de capture d’informations et de corrélation dynamique avec les listes et profils d’amis.

Le “minimum viable product” sera disponible pour les mobinautes iOS qui seront donc les premiers cobayes. Viendront ensuite une version Android et la sortie de fonctionnalités plus évoluées (messages d’inspiration…).

Vanessa Davin (PleezMee): “Nous avons eu un souci d’inadéquation de compétences mais ce ne fut pas pour autant une perte de temps. Nous en avons en effet profité pour comprendre les axes de valeur prioritaires.”

Si l’on se base sur le planning et les espoirs initiaux, PleezMee a pris du retard à l’allumage. Aléas de la genèse d’une start-up…

Passée par l’un des Boostcamps du MIC Brussels (fin 2015), Vanessa Davin a en effet dû changer ses batteries en cours de route, restructurer l’équipe de personnes qui l’aidaient dans son aventure. “Nous avons eu un souci d’inadéquation de compétences mais la phase de développement d’un prototype, entre février et août 2016, ne fut pas pour autant une perte de temps. Nous en avons en effet profité pour travailler avec les utilisatrices de notre focus group (voir note de bas de page) afin de comprendre les axes de valeur prioritaires.

Le nouveau prototype, en cours de développement, est plus abouti. Nous avons peaufiné notre approche marketing et com’ – via les réseaux sociaux, un blog, pour identifier des utilisateurs et des partenaires (marques, blogueurs, influenceurs…). Nous avons beaucoup appris en termes de produits, de marché, de stratégie de développement…”

Dans un premier temps, PleezMee devra encore prouver la solidité de son concept, son attractivité pour les marques, se bâtir une communauté d’utilisateurs/utilisatrices.

Dans sa phase initiale de développement commercial, PleezMee devra démarcher les magasins, enseignes et marques afin de les convaincre d’autoriser l’intégration entre leurs catalogues et l’appli. Et de leur faire accepter l’idée qu’ils n’auront pas accès aux données personnelles de leurs (éventuels) clients.


PleezMee visera en effet en priorité, mais pas exclusivement, une audience féminine. Tranche d’âge (20-35 ans). “Les études de marché indiquent que c’est dans cette tranche d’âge que l’on trouve beaucoup d’early adopters, des digital natives qui n’ont pas encore d’enfants et ont plus de budget à consacrer aux loisirs et à de petits plaisirs personnels. Nous visons plus spécifiquement les femmes parce que leur comportement d’achat est différent de celui des hommes. Elles sont plus dans la réflexion que dans l’achat-réflexe… Et elles partagent davantage sur les réseaux sociaux.”  [  Retour au texte  ]