La branche francophone de la FeWeb veut se réveiller

Portrait
Par · 24/11/2017

Ils ne sont que 150 francophones sur un total actuel de 520. “Ils”, ce sont les membres de l’association FeWeb, la Fédération des métiers du Web. Au-delà du constat chiffré brut, une analyse plus poussée du profil de ces sociétés révèle par ailleurs que les “grosses boîtes” sont surtout du côté flamand. “C’est là que se trouvent, à quelques rares exceptions près, les grandes agences. Côté francophone, les tailles sont plus petites”, constate Olivier De Doncker, récemment nommé président de la branche francophone de l’association. “Cela s’explique par le fait que la Wallonie, en matière de marketing digital, de métiers du Web, a un retard de 2 ou 3 ans” sur sa voisine du nord. “Les agences flamandes se sont par exemple déjà largement emparées du phénomène des (chat)bots, de l’intelligence artificielle… Ce n’est pas encore le cas côté wallon.”

Autre déséquilibre flagrant: la composition du conseil d’administration de la FeWeb. Onze personnes y siègent. Olivier De Doncker fait figure de petit Gaulois isolé…

Réveiller le nain qui dort

La branche francophone de la “Fédération des métiers du Web” (voir note de bas de page) a, jusqu’ici, été nettement moins visible et moins active que son homologue néerlandophone. L’arrivée à sa tête d’un nouveau président va-t-elle modifier les choses? On le verra au fil du temps.

Mais le nouveau chef de file a en tout cas quelques idées pour (re)dynamiser les troupes, doper les activités et insuffler quelques éléments de structuration. En s’inspirant pour ce faire de ce qui a déjà été réalisé ou de ce qui fait le poids de cette fédé du côté flamand. 

“La FeWeb a par exemple été l’un des partenaires de référence pour l’élaboration de l’Agenda digital d’Alexander De Croo”, affirme Olivier De Doncker. “Côté flamand, elle est davantage active en termes de médiation lors de conflits entre clients et fournisseurs et a tissé des liens étroits avec le monde de l’enseignement afin de promouvoir les métiers et les compétences Web.” Un exemple dans ce dernier registre? La FeWeb a contribué à mettre sur les rails un post-graduat en digital marketing à la Haute Ecole PXL d’Hasselt.

Mais où sont-ils donc?

Côté francophone, de nouvelles activités devraient voir le jour, en priorité pour “mieux défendre le secteur” et mieux faire passer certains messages, demandes, doléances, propositions vers les décideurs publics. Le but est de rendre plus audibles des prises de positions par rapport à l’actualité du numérique ou à des décisions prises au niveau gouvernemental.

Là où les membres néerlandophones ont, par le passé, mieux réussi à se faire entendre, au niveau régional (flamand) ou fédéral, la voix des francophones a jusqu’ici quasiment été absente des radars.

Olivier De Doncker: ”Les agences [marketing, digital, Web] wallonnes ont deux à trois ans de retard sur leurs homologues flamandes.”C’est en tout cas l’avis d’Olivier De Doncker, qui pointe comme exemple récent l’absence de dialogue ou de simple concertation lors de la mise en oeuvre du mécanisme de labellisation des consultants dans le cadre du nouveau programme Chèques-Entreprise. Nous nous en sommes récemment fait l’écho. Relire nos deux articles, ici (principes de la labellisation) et ici (les critiques).

La “défense” du secteur passera aussi par un regain de visibilité de ses acteurs, la FeWeb se proposant de devenir une meilleure vitrine.

“Dès 2018, nous allons veiller à ce que les membres gagnent en visibilité en revoyant par exemple la structuration de notre site Internet.” Les membres y apparaîtront selon un système qui hiérarchisera les compétences qu’ils revendiquent. Chaque membre aura un “stock” de 100 points à attribuer à son profil. A lui de répartir ces points selon l’importance de ses compétences dans divers sous-domaines du Web (marketing, référencement…).” Lors d’opérations de recherche par un internaute, le classement s’effectuera en fonction de ces pondérations auto-définies.

Code de conduite et label de qualité

De manière plus fondamentale, l’une des priorités annoncées pour l’année prochaine est de donner une nouvelle ampleur – et réalité – au code de conduite que les membres devront s’engager à respecter, de manière bien plus formelle et concrète que ce n’est le cas aujourd’hui.

Pour devenir membre, il faudra obligatoirement s’engager à adhérer à ce code de conduite. La teneur exacte est encore en préparation, “en co-création avec les membres. Le document existant sera réactualisé pour mieux correspondre aux besoins des membres.”

Question: les membres étant à la manoeuvre pour la définition du nouveau code de conduite, la protection des intérêts commerciaux des entreprises ne risque-t-elle pas de brider l’exercice, de mettre sous le boisseau certaines exigences et attentes des destinataires que sont les clients? Et, par ailleurs, que pèseront les “petits Poucet” face aux grandes sociétés et agences dans cet exercice de définition?

Olivier De Docker, sur ce dernier point, ne se dit pas inquiet d’un possible déséquilibre – ou diktat. “Toutes les sociétés doivent, en finale, respecter les mêmes conditions dans un contexte de gestion de projets. L’objectif n’est pas de valider des compétences mais de définir un cadre de confiance. La demande du marché est de faire en sorte que les bonnes pratiques soient respectées et que l’on garantisse ainsi une certaine prédictibilité de la relation avec le client.”

Pour ceux qui se demanderaient ce qui se trouve actuellement dans ce code de conduite, nous ne pouvons que vous renvoyer au document en néerlandais (pas trace de lien direct du côté de la version francophone du site).

Olivier De Doncker (FeWeb): “Le rôle de médiateur [entre client et prestataire] de la FeWeb est appelé à être renforcé. Le marché est très demandeur compte tenu du fait que l’arrivée de nouveaux acteurs, qui essaient de casser les prix, rend le marché plus tendu. L’objectif est d’offrir un espace de discussion. Souvent la solution est négociée entre les parties, la faute étant souvent partagée.”

Des expertises à mieux valoriser

La branche francophone de la FeWeb a par ailleurs l’intention de mieux faire connaître les compétences de ses membres. Cela passera notamment par une “vitrine” de réalisations sur le terrain, au travers d’un case book. “La promotion du marketing numérique, notamment, passe par la mise en lumière de projets réalisés pour des entreprises, dans différents secteurs, afin de développer leurs activités. Hier, l’IAB jouait ce rôle. Plus personne, aujourd’hui, ne le fait…”

Autre manière de mettre en lumière, en mode “auto-marketing”, les services que les membres de la FeWeb peuvent prester: une analyse des nouveaux métiers liés aux médias sociaux. Cette étude sera menée de concert avec Technofutur TIC.

“L’un des profils nouveaux, qui est aujourd’hui reconnu, est celui de community manager mais il y en a pas mal d’autres qui sont moins connus. Le secteur du numérique connaît une hyper-spécialisation des profils, qui sont autant de briques qu’on peut combiner: créatifs, gestionnaires de publicité sur Facebook, etc.” L’étude permettra de mieux documenter les profils, les compétences et d’orienter à la fois les candidats et les clients.

Olivier De Doncker: “Je crois beaucoup au principe du post-graduat [dédié Web ou marketing digital]. Par définition, il n’est pas possible de tout apprendre à l’école. Celle-ci ne peut suivre le rythme d’évolution du marché.”

A l’exemple de la branche néerlandophone, la FeWeb franco ambitionne par ailleurs de trouver oreille attentive et intéressée du côté des organes de formation. Non seulement pour promouvoir les études menant à des métiers Web, susciter de nouveaux cours ou filières de formation, mais aussi pour militer en faveur de la formation en alternance.

“Nous soutenons ce mécanisme parce qu’il est créateur de valeur. Nous contribuerons à fournir des intervenants – des professionnels – pour donner des formations et nous servirons de relais pour communiquer des offres de stage.”

Pour ce qui est de susciter des post-graduats, Olivier De Doncker regarde à nouveau vers l’exemple flamand. “Je crois beaucoup au principe du post-graduat [dédié Web ou marketing digital]. En effet, le niveau d’enseignement en marketing digital a bien évolué ces dernières années du côté francophone. Mais il n’en souffre pas moins d’une faiblesse: par définition, il n’est pas possible de tout apprendre à l’école. Celle-ci ne peut suivre le rythme d’évolution du marché.

Les post-graduats marchent très bien en Flandre, avec un taux élevé de mise à l’emploi. Voyez ce que réalise par exemple la Belgian Advertising School à Malines…

La demande, le déficit de talents sur le marché sont tels que les agences de pub flamandes paient pour former les jeunes.”

A ses yeux, l’un des défis à relever, côté francophone, sera donc de faire passer le message, de convaincre des écoles d’entrer dans des partenariats. Avec la nécessité incontournable d’obtenir également le soutien des autorités publiques régionales (ou communautaires)…

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Missions de la FeWeb: représenter les membres devant les autorités publiques et les institutions; informer et former les membres; travailler à la professionnalisation des services prestés; servir de plate-forme de rencontres; contribuer à améliorer le climat entrepreneurial dans le secteur du numérique et à dynamiser le secteur.

L’expression choisie par la branche francophone  — “Fédération des métiers du Web” — va au-delà de la définition que se donne la FeWeb, dans son ensemble, puisque celle-ci se définit comme la Fédération des sociétés Web. Nuance, nuance. Mais nuance purement de façade ou laissant sous-entendre d’autres ambitions et modes d’actions côté francophone? L’exposé des intentions que vous trouverez dans ce présent article est un début de réponse. Mais il faudra juger “à l’usage”…  [ Retour au texte ]