NRB: nouveau visage sous une direction nouvelle ? (1ère partie)

Interview
Par · 17/08/2017

Près d’un an après son arrivée à la tête du groupe NRB, où il a succédé à Ulrich Penzkofer, Pascal Laffineur s’apprête à proposer et détailler le plan stratégique qu’il a défini pour le groupe. Le conseil d’administration en débattra en septembre.

S’il est dès lors prématuré d’en connaître les détails, il était par contre utile de rencontrer ce nouveau big boss de NRB pour découvrir quel regard il a jeté sur l’état du groupe et de ses diverses composantes à son arrivée et quelles sont les grandes orientations, voire inflexions, qu’il entend donner au groupe et à ses filiales.

Premier constat

De sa petite tournée de découverte, à la fois des rouages internes et de la clientèle de NRB, Pascal Laffineur (voir sa bio en fin d’article) dit avoir tiré quelques conclusions et convictions: une clientèle largement fidèle, un marché porteur et demandeur dans les axes stratégiques prédéfinis, une certaine friabilité d’activités “historiques”, un groupe NRB dont la configuration, ces dernières années, s’est construite sur base d’acquisitions certes pertinentes mais qui n’avaient pas encore été homogénéisées en une structure opérationnelle et des rouages fonctionnels qui soient totalement alignés et performants.

Sur ce dernier point, son constat est le suivant: “NRB a connu, ces dernières années, une croissance rapide via des acquisitions ciblées, pertinentes, mais qui avaient simplement été juxtaposées jusqu’ici. Une synergie opérationnelle s’imposait entre filiales afin que toutes les têtes se tournent de concert vers le client. Pour utiliser une analogie, on est en présence d’une belle carrosserie mais avec des moteurs sous-dimensionnés.”

Des “moteurs sous-dimensionnés”, c’est-à-dire?

“Les équipes internes avaient du mal à suivre, en raison de l’augmentation de la cadence, de la diversification d’activités, l’arrivée de nouveaux clients et des attentes différentes selon les clients.”

Ce “sous-dimensionnement”, à ses yeux, tient surtout aux processus, “non aux compétences.”

Son premier chantier fut donc de repenser la constitution des équipes. “Il s’agit de rendre l’organisation plus transversale. Hier, elle était verticale, structurée par produits, selon différents piliers. Le client, même pour un même projet, voyait se présenter à lui plusieurs responsables produits ou solutions. A l’avenir, le point focal doit devenir le client, avec une interface unique vers le client représentant le groupe.”

Désormais, les équipes devront dès lors être transversales, en termes de disciplines représentées (vente, maintenance, développement) avec une connaissance de l’ensemble du portefeuille de solutions.

Elagage et extension

La constitution de ce portefeuille est appelée à évoluer quelque peu, l’intention de Pascal Laffineur étant d’en faire disparaître des produits trop “exotiques”. Place, essentiellement, à la “proven innovation”.

Un exercice d’identification des compétences existantes et des produits essentiels pour les besoins actuels et futurs des clients a été effectué.

Le but était de réorganiser les compétences existantes, de les orienter vers des choix mainstream et d’éviter le plus possible de disperser ses efforts en répondant favorablement à des demandes trop “exotiques”. “80% de nos activités doivent être orientées vers des besoins standard. Les 20% restants sont toutefois nécessaires pour maintenir de la flexibilité par rapport aux demandes et attentes des clients. Mais, aujourd’hui, le balancier a trop tendance à aller du côté du sur-mesure.

Pascal Laffineur (NRB): “80% de nos activités doivent être orientées vers des besoins standard. Les 20% restants sont toutefois nécessaires pour maintenir de la flexibilité par rapport aux demandes et attentes des clients.”

Sur certains thèmes, pour combler d’éventuelles lacunes, NRB se tournera vers des partenaires. La chose n’est pas neuve mais de nouveaux fournisseurs et prestataires viendront sans doute s’ajouter à son catalogue.

Ce sera notamment le cas en matière de solutions de type cloud hybride (voir plus bas).

Il s’agira aussi pour NRB – et ce n’est pas un moindre défi compte tenu de son historique – de continuer à combler des vides laissés par ce qu’on pourrait appeler une défection technologique annoncée.

En clair, même si le mainframe n’est pas mort et enterré – en dépit de régulières prédictions prématurées de trépas -, la décision d’Ethias de remiser cette génération au chapitre des antiquités et de miser sur la solution Guidewire (pour la gestion des contrats et des sinistres en assurances non-vie et organismes publics) a forcément porté un coup dur à NRB qui était son fournisseur “intime”.

“Un plan industriel avait été élaboré pour compenser une dilution programmée. C’était nécessaire mais, après examen, j’ai estimé qu’il était trop limité, lié exclusivement au “cas” Ethias. Il fallait en étendre la perspective à l’ensemble du groupe”, souligne Pascal Laffineur. “Au moins, le choix fait par Ethias a servi d’électrochoc pour certains au sein de NRB.”

La prise de conscience fut double. D’une part, se reposer largement sur un méga-client ne pouvait plus ternir la route. D’autre part, la diversification des solutions et services proposés devenait une urgente nécessité.

Cela a également induit une recontextualisation des relations entre les deux sociétés. “Désormais, Ethias est un client comme un autre, qui exige que l’on gagne des marchés contre la concurrence.” Quant à savoir quel volume d’affaires l’assureur représentera encore à l’avenir pour le groupe liégeois, Pascal Laffineur estime que “le chiffre d’affaires généré sera d’une toute autre nature, en termes de services, mais non nécessairement beaucoup moindre que du temps du mainframe.”

Là aussi, on jugera sur pièce…

Etendre le portefeuille

Parce qu’il s’agit d’une compétence historique – du genre “vache à lait” par le passé – et d’un socle d’activités qui a encore de beaux jours devant lui, malgré tout, les solutions pour mainframe demeurent bien ancrées dans le catalogue NRB. “Ces systèmes continuent d’évoluer et sont encore très utilisés”. Autre raison de ne pas lâcher le morceau: les spécialistes mainframe se feront de plus en plus rares sur le marché, d’où la valeur qu’il y a à rester sur ce terrain toujours demandeur de maintenance.

Le rayon d’action, en la matière, dépassera nos frontières: “Le Grand Duché, notamment en raison de la densité de data centers qu’on y trouve, et le Nord de la France sont des marchés considérables.”

Bien entendu, l’avenir est davantage aux infrastructures distribuées, standardisées et – de plus en plus – aux infrastructures dans le cloud. Dans ce registre, NRB se positionne comme fournisseur de services d’externalisation cloud (infrastructure, applications) et de solutions d’automatisation, d’orchestration, de provisioning, voire de sécurisation.

Toutes ces solutions ne viendront pas exclusivement de son portefeuille, l’idée étant de proposer aussi celles de partenaires. Des annonces de nouveaux partenariats devraient intervenir dans les prochains mois. “Mais selon deux règles strictes”, souligne Pascal Laffineur. “D’une part, accompagner le client dans une transition progressive vers le cloud.” Pas de basculement en mode “big bang”, donc. Notamment “parce que les sociétés clientes doivent former leurs propres équipes à ce mode de fonctionnement dans le cloud.”

D’autre part, les partenaires qui seront choisis “doivent proposer des solutions dont le caractère innovant a déjà fait ses preuves”.

Autres volets du portefeuille de NRB: sa software factory en solutions Web/mobile (voir dans la 2ème partie de cet article, à paraître demain) ; l’offre de solutions ERP (SAP) ; les solutions pour le secteur public (via CEVI et Civadis) ; l’axe médical/e-santé (Xperthis).

A l’avenir, selon un positionnement étalé dans le temps, NRB dit aussi vouloir s’engager dans le développement de solutions spécifiques pour certains secteurs verticaux. Du genre, courtiers d’assurances, acteurs du secteur de l’énergie… “Des secteurs ayant des besoins spécifiques. En la matière, nous renforcerons nos capacités.” Une ou deux “niches” pourraient ainsi être choisies chaque année. La première devrait être connue d’ici la fin de l’année.

Pascal Laffineur: “Il s’agit pour nous de nous spécialiser dans des niches confirmées comme étant porteuses.”

Pour ces “verticaux”, NRB ne compte pas jouer la carte du “one stop shopping”, autrement dit du catalogue fonctionnel complet mais choisira soigneusement le ou les besoins applicatifs à satisfaire. En se focalisant sur un nombre limité de thèmes, dont les verticaux concernés sont demandeurs, la société espère ainsi y réussir son entrée “en faisant la différence sur ce créneau.”

Intégration ou autonomie?

Pour en revenir au constat fait par Pascal Laffineur d’un manque d’intégration des sociétés acquises au fil des ans dans une structure qui soit cohérente ne veut pas dire que les filiales existantes disparaîtront du paysage. Des Xperthis ou Civadis ne vont pas, tout à coup, se fondre dans NRB. A découvrir dans la deuxième partie de cet article.

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Le parcours de Pascal Laffineur

Âgé de 52 ans, Pascal Laffineur est passé successivement par Alcatel Mobile Communications (Belgique) où il occupa des fonctions de gestionnaire projet GSM, Cegeltel/SFR en qualité de directeur du département Ingénierie réseau, et Altran Technologies, dont il était jusqu’à l’été 2016 le directeur général pour le Benelux. Il avait rejoint le groupe Altran en 1998 où il a occupé plusieurs postes à responsabilités – en ce compris ceux de responsable grands comptes pour Vodafone et directeur général d’Altran Europe.

Pascal Laffineur a suivi une formation d’ingénieur civil à l’UCL, qu’il a complété par un diplôme en administration des affaires, décroché à la HEC Saint-Louis. [ Retour au texte ]