Programme Ecole numérique: vers un nouveau scénario de sélection des dossiers

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Par · 05/07/2021

8,7 millions, c’est le budget que la Wallonie aura consacré, cette année, à l’appel à projets Ecole numérique. Un chouia moins que l’année précédente (8,9 millions) mais un cran au-dessus confirmé par rapport aux budgets antérieurs: 7,5 millions en 2018 et environ 6 millions en 2019.

679 établissements scolaires se sont partagés la manne – contre 503, un an plus tôt.

Une nouvelle procédure de sélection de dossiers de candidature sera lancé à la rentrée mais selon un scénario revu et corrigé, afin d’“optimiser le processus”.

Revoir le processus

Voici un an, lors de la présentation du plan annuel d’équipement des écoles par la Région wallonne (appel à projets Ecole numérique), il y avait déjà, dans la teneur des propos du ministre Willy Borsus (en charge de l’économie et du numérique), comme un avant-goût de cette décision. Il reconnaissait en filigrane qu’il faut, en ce compris par le biais – consacré – de dépôts de projets, permettre à davantage d’établissements scolaires de bénéficier d’un équipement (matériels, logiciels, outils de connectivité). 

Lors de l’appel à projets 2018-2019, un premier pas en ce sens avait été franchi puisque les écoles qui, jusque là, avaient bénéficié d’un équipement financé par la Région n’avaient pas eu la possibilité de “repasser les plats”. Et comme on l’a vu plus haut, les moyens de cette année ont été répartis entre davantage de projets pédagogiques que cela n’avait été le cas un an auparavant.

 

Bilan de ces quatre dernières années: 2.075 projets scolaires/pédagogiques retenus, bénéficiant d’un financement d’équipement via le programme Ecole numérique ; correspondant à 1.724 établissements scolaires wallons bénéficiaires.

 

Meilleure répartition ou écueil du saupoudrage? Vaut-il mieux, comme aux tout débuts, concentrer l’effort sur les plus imaginatifs et sur les projets pédagogiques pouvant servir d’exemple communicatif, ou au contraire ensemencer un maximum d’établissements? Le débat n’est pas neuf et loin d’être éteint…

Toujours est-il que la décision a été prise de “renforcer le dispositif”. Car “une implantation sur deux n’a hélas encore jamais introduit de projet avec succès. Certaines n’ont tout simplement encore jamais introduit de projet”. Pour de multiples raisons, bien sûr. Notamment, chez certaines, la conviction que le processus était trop lourd, trop aléatoire et/ou trop parcimonieux.

Source: Ecole numérique

A charge donc pour l’AdN et le SPW (Économie, Emploi, Recherche) de revoir la copie de l’Ecole numérique afin de formuler, d’ici la rentrée, un mécanisme qui réponde à de nouveaux paramètres, d’“optimiser et améliorer les processus de candidatures et d’octroi” et d’”améliorer le financement des établissements selon leurs besoins et leurs priorités, dans un ou plusieurs types de projets”.

Selon quels paramètres et principes? Impossible de le dire précisément à ce stade: “les modalités n’en sont pas encore totalement fixées”.

Toutefois, inspirés de l’exercice d’évaluation des appels à projets successifs Ecole numérique (dont vous trouverez le rapport ici), quelques éléments fondateurs sont acquis. On peut donc, dès à présent, en attendant les modalités à préciser à la rentrée, esquisser les grandes lignes de ce que sera le nouveau “dispositif” Ecole numérique.

>> Augmenter le nombre d’établissements bénéficiaires

La moitié des établissements scolaires de Wallonie qui n’ont jamais bénéficié d’une aide à l’équipement en numérique. Dont certains qui n’ont jamais introduit de dossier de candidature. C’est trop et ce n’est pas le but, estime-t-on à la Région.

D’autant que ceux qui ont vu leur dossier approuvé ont parfois bénéficié à plusieurs reprises du programme. “Il fallait trouver une solution à cette situation”, déclare-t-on du côté de l’AdN. “Le but n’est vraiment pas de créer de toutes pièces une fracture numérique dans les rangs des écoles…”.

Le but sera donc de convaincre – et, comme on le verra plus loin, d’aider les établissements qui n’ont pas candidaté jusqu’à présent ou qui ont été recalés. Sans pour autant fermer la porte à ceux qui ont déjà introduit avec succès un dossier par le passé. Le nombre de dossiers retenus sera donc potentiellement plus élevé à l’avenir. Comme le budget ne sera pas forcément élargi (mais cela reste néanmoins une possibilité), l’ampleur des projets d’équipement, par établissement, pourrait être moins grande.

Alors retour à la case (plus grand) saupoudrage? A l’AdN, on ne voit pas de problème fondamental à une augmentation du nombre de projets retenus chaque année. “En 2018, on avait misé sur l’effet inverse: retenir moins de projets pédagogiques d’établissements mais de plus grande ampleur dans l’espoir d’avoir plus d’impact.

Cette année-là, certaines établissements ont reçu deux fois plus d’équipement mais le nombre d’enseignants qui se sont impliqués dans les projets n’a progressé que marginalement, passant en moyenne de 4,7 personnes à 5 par établissement. Un plus gros projet ne débouche donc pas automatiquement sur plus d’implication.”
D’où la machine-arrière pour en revenir au principe de projets potentiellement plus modestes mais “portés par des groupes d’enseignants réellement impliqués”.

>> Une sélection de projets davantage étalée dans le temps

Le ministre, conseillé en ce sens par l’AdN et le SPW, devrait valider l’idée de procéder désormais par appel à candidatures plutôt que par appel à projets. 

Le principe du projet pédagogique, déterminant pour retenir un dossier et octroyer un équipement, ne change pas mais la manière d’organiser les dépôts de dossiers, elle, évoluera.

Plus question d’un seul grand – et monolithique – appel à projets par an mais plutôt un dépôt de candidatures “au fil de l’eau” tout au long de l’année. Plusieurs sessions de sélection devraient ainsi être organisées par an, permettant à un dossier recalé d’être réorienté, corrigé ou étoffé par l’établissement candidat.

Les établissements présentant un dossier valable du premier coup ou qui ont déjà “pratiqué” avec succès cet exercice conserveront donc leurs chances de voir leur dossier accepté du premier coup. Les dossiers plus faibles, moins bien ficelés, venant d’établissements moins aguerris bénéficieraient, eux, d’une sorte de seconde sess’ (sans devoir attendre un an avant de pouvoir redéposer un dossier) et d’un accompagnement au montage de dossier.

>> Davantage d’accompagnement pour les établissements délaissés

Il faut donc également s’attendre à quelques réorientations en matière d’accompagnement (préparation du dépôt de candidature, suivi des projets qui ne sont pas retenus).

Cet accompagnement sera assuré par “des conseillers de terrain et une équipe spécialisée”. Budget et effectifs augmentés? C’est à l’étude.

“On espère que la Fédération Wallonie Bruxelles arrivera à compléter rapidement le quota promis de conseillers pédagogiques” [pour rappel, le chiffre prévu est de 42 mais on en est aujourd’hui encore loin…]. A cela s’ajoutent, selon l’AdN, des ressources mises à disposition par les réseaux.

Et, le cas échéant, la Région pourrait suppléer à la demande, en sollicitant des ressources, externes à l’administration, pour assurer le support au montage et au déploiement des projets. Quitte aussi à renforcer l’équipe du SPW qui serait chargée d’un accompagnement plus technique…

 

André Delacharlerie (AdN): “Le mécanisme d’appel à candidatures permettra de mieux accompagner les établissements moins matures. Selon une méthode encore à peaufiner afin de garantir une équité entre écoles.”

 

Ce besoin d’accompagnement au montage et dépôt de dossier et pour leur suivi était déjà souligné dans le rapport rédigé conjointement, en 2020, par le SPW et l’AdN

Voici notamment ce qu’on pouvait y lire: “Le suivi et l’accompagnement ne sont pas suffisants dans bien des cas. La participation à un projet nécessite d’être soutenue, spécialement dans les petites entités qui ne disposent pas de référent numérique interne ayant le bagage technique et pédagogique pour résoudre les problèmes rencontrés (techniques et pédagogiques) ou pour soutenir les énergies qui s’amenuisent avec le temps:
– recevoir un accompagnement plus intense et plus fréquent
– avoir un suivi plus régulier des projets et parfois un rappel des engagements
– allonger la durée de l’accompagnement
– augmenter la taille des équipes d’accompagnement afin de les rendre plus accessibles.”

>> Inverser la succession des étapes de sélection

Jusqu’ici, les dossiers introduits par les établissements scolaires en vue de bénéficier d’un financement d’équipement par la Région étaient tout d’abord évalués sous l’angle “valeur pédagogique” (par une équipe de l’unité pédagogique de l’ULiège).

Les dossiers retenus étaient ensuite transmis au SPW qui en vérifiait la validité en termes techniques (équipements choisis ou demandés convenant pour le but recherché).

Certains dossiers étaient alors recalés par le SPW mais assez tard dans le processus qui, par ailleurs, prenait du temps. Désormais, selon la refonte envisagée, le cheminement serait inverse: validation technique par le SPW avant passage devant le “jury” pédagogique. Ce qui, estime-t-on à l’AdN, permettra de mieux mettre en place l’accompagnement (choix d’équipements, formulation du dossier, etc.) pour les établissements qui en auront besoin

>> Deux types de projets

Autre chose acquise: les établissements scolaires pourront déposer deux types de projets, selon une caractérisation plus appuyée que par le passé: un projet d’équipement numérique (matériels, logiciels) et un projet de connectivité.

Une évaluation de la pertinence et de l’efficacité, sur le terrain, du nouveau scénario sera effectuée au cours de l’année scolaire 2021-2022. Avant d’être éventuellement systématisée par la suite.