Des mentors étudiants – en matière juridique Internet – pour les start-ups

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Par · 23/09/2020

Cette année (académique) encore, les étudiants de la faculté de Droit de l’UNamur qui suivent un Master de spécialisation en droit de l’ICT et de l’Internet proposeront de conseiller de jeunes (ou moins jeunes) entrepreneurs qui se sont lancés dans l’aventure d’une start-up active dans le numérique et le Web.

Un accompagnement et des conseils juridiques, spécifiques, gratuits, qui visent à faire se rencontrer deux besoins: ceux des entrepreneurs, d’une part, confrontés aux multiples embûches et implications légales de l’Internet, des modèles économiques des plates-formes, aux règles du commerce électronique ou celles plus complexes encore des réglementations tous azimuts, ou encore aux risques en matière de données, de propriété privée, etc. etc. D’autre part, l’intérêt qu’il y a pour des étudiants – en ce compris après en être arrivés au stade du master – de se frotter à des problématiques et situations bien réelles.

Trois mois d’accompagnement

Les start-ups qui font appel aux étudiants du Legal Lab de l’UNamur – huit ont été sélectionnées ces deux dernières années – peuvent avoir recours à leurs conseils et avis pendant trois mois – d’octobre à décembre. Et pour les néo-entrepreneurs et start-ups qui craindraient de confier leurs questions et problèmes à des juristes encore non expérimentés, l’UNamur tient à les rassurer: “nos étudiants en master de spécialisation Droit de l’Internet n’opèrent pas sans filet puisqu’ils seront toujours encadrés par des professionnels du droit”. En l’occurrence par un trio d’assistants qui, eux-mêmes, en cas de besoin, peuvent toujours se tourner vers le corps professoral pour les questions plus ardues.

Comment les start-ups sont-elles sélectionnées? Quels critères sont retenus pour déterminer si leur projet convient pour un accompagnement juridique par les étudiants?

Camille Bourguignon, assistante à la faculté de Droit de l’UNamur, en charge du projet Namur Legal Lab, explique que le premier critère a trait aux types de questions juridiques que les projets soulèvent: “Il doit nécessairement y avoir un lien avec les matières étudiées par les étudiants: RGPD, protection du consommateur, droits de propriété intellectuelle, cadre réglementaire en matière de services de paiement en-ligne… Les problématiques et questions soulevées doivent ensuite être variées. Un projet dont tous les points d’interrogation se focaliseraient par exemple sur le RGPD ne serait sans doute pas retenu dans la mesure où le but est d’amener l’étudiant à apprendre à faire le lien entre différentes matières, comme il devra le faire dans la vie réelle. Nous ne voulons pas qu’il s’enferme dans un seul domaine, ou devienne hyper-spécialisé.”

Deux exemples de projets conseillés par les étudiants du Namur Legal Lab

Lors des années antérieures, une équipe d’étudiants a aidé les initiateurs du site Work & Meet LIEN https://workandmeet.be, plate-forme de location temporaire d’espaces de travail, chez les particuliers ou au sein d’entreprises, pour travailleurs itinérants. Les conseils juridiques apportés ont notamment concerné la protection des données dans ces environnements-hôte ou encore les responsabilités du gestionnaire de l’appli.

Autre projet qui bénéficié des cogitations des étudiants Master namurois: le projet Les loulous philosophes de Sophie Lenoir. Ce site Internet permettra de réserver et de pré-payer des ateliers de philosophie pour les enfants, ateliers organisés dans un environnement privé ou scolaire. Parmi les domaines où l’initiatrice avait besoin de conseils juridiques: les contraintes de respect de la vie privée pour la récolte des informations lors des réservations, le choix d’une plate-forme de paiement en-ligne, la création et la gestion de bases de données (notamment pour du marketing direct), le type d’informations à publier obligatoirement sur le site…

Autre critère pris en considération: la capacité financière de la société qui pose sa candidature. Non pas pour préjuger de sa viabilité mais pour ne retenir que les start-ups ou PME qui manquent clairement des moyens financiers qui leur permettraient de faire appel à un cabinet d’avocats classique ou de monter leur propre département juridique.

“Nous ne voulons d’ailleurs pas marcher sur les plates-bandes des cabinets d’avocats. Les étudiants du Legal Lab sont là pour donner des conseils de première ligne, pour passer éventuellement la main ensuite à un avocat en exercice si besoin est. Les étudiants peuvent aussi aider la start-up à identifier des questions plus précises, plus techniques qui nécessiteront peut-être l’intervention plus tard d’un avocat…”

 

Les start-ups et entrepreneurs intéressés par cette intervention du Namur Legal Lab peuvent poser leur candidature auprès de l’UNamur en complétant, dans un premier temps, un formulaire en-ligne. Elles peuvent y expliquer la nature de leur projet, les questions d’ordre juridique qui leur posent problème, le stade d’évolution de leur projet.

La méthode

Après sélection des projets de start-up se prêtant à l’exercice (par le trio d’assistant(e)s de la faculté de Droit), une première rencontre est organisée entre les étudiants (constitués en pools de trois ou quatre étudiants par projet retenu) et la start-up porteuse dudit projet. “Nous supervisons ces premières rencontres”, souligne Camille Bourguignon, “qui sont destinées à orienter le travail et à identifier les problématiques que pose le projet.”

Les assistant(e)s, toujours en mode supervision, seront également de la partie à l’issue de l’exercice, lors de la présentation orale par les étudiants de l’analyse qu’ils auront faite et de leurs recommandations à la start-up. Entre ces deux réunions-balise, les étudiants sont évidemment libres d’organiser leurs échanges, voire réunions, avec la start-up – “le rythme dépend en partie de la complexité de la problématique, du dynamisme dont fait preuve chaque étudiant ou encore du temps que la start-up peut ou veut y accorder.

Les étudiants posent eux-mêmes leurs marques. C’est à eux de fournir le travail de fond, à ratisser la matière. Nous, assistant(e)s, nous sommes là pour suppléer ou compléter éventuellement, pour réorienter le travail si l’on voit qu’ils s’engagent dans une mauvaise voie.”

A noter que depuis l’année académique 2016-2017, les projets de conseils aux start-ups, réalisés dans le cadre du Legal Lab, sont devenus obligatoires, comptant dans l’évaluation finale des étudiants, au même titre que leur stage ou que leur mémoire. L’exercice de conseils pratiques n’avait été intégré au programme (sur base volontaire) qu’un an auparavant. Pour lancer le programme Namur Legal Lab, l’UNamur s’était en cela inspirée d’une formule venue des Etats-Unis et qu’une initiative européenne avait transposé de ce côté-ci de l’Atlantique, avec le soutien  de la Commission et de quelques universités pilotes (à savoir la KULeuven, l’université d’Amsterdam, celle de Hambourg et le Queen’s College).