Le Sirris inaugure un démonstrateur de ligne de production 4.0 pour PME

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Par · 08/11/2019

Le Sirris inaugure un démonstrateur de ligne de production additive qui intègre les caractéristiques de l’industrie 4.0 (personnalisation poussée, traçabilité de données, de processus, de qualité, analytique, flexibilité, collaboration entre partenaires, optimisation financière…). Objectif: démontrer, en particulier aux PME, que le 4.0 peut se faire sur base de l’existant, avec des outils abordables.

En fait, le démonstrateur et, surtout, les services d’accompagnement à une évolution vers un espace de production “4.0” que le centre de recherche Sirris met désormais à disposition d’entreprises industrielles s’adresse potentiellement à toutes les tailles d’entreprises, grandes ou petites, quel que soit leur domaine d’activités. Mais, par la force des choses et en raison de la nature des besoins, c’est essentiellement aux PME, disposant de peu de moyens et plus réticentes que leurs grandes soeurs, que le Sirris s’adresse.

Pour elles, le centre a mis au point une ligne de production-témoin – baptisée “4.0 Made Real” – alliant processus de conception et de production par fabrication additive et – nouveauté – principes et processus 4.0. A savoir, l’adoption de principes et solutions relevant de la numérisation des étapes de production, avec automatisation et connexion des équipements au réseau ; de suivi et traçabilité des processus et produits ; de gestion intégrée de la qualité ; de personnalisation élevée des produits manufacturés ; d’inclusion de mécanismes analytiques et prédictifs…

“L’industrie 4.0, beaucoup en parlent. Des solutions et briques technologiques multiples existent sur le marché, mais sont souvent spécifiques, trop complexes, mal comprises”, déclare Jean-Claude Noben, directeur régional Wallonie de Sirris. “Et les sociétés, en particulier les PME, ne savent pas très bien comment y recourir ou comment les adapter à leur situation particulière. Voire même ont l’impression que leurs équipements existants ne leur permettent pas, par manque de compatibilité et efforts financiers trop importants, de sauter le pas du 4.0.

D’où l’idée de cette usine-pilote 4.0 qui démontrent aux sociétés que c’est possible et financièrement abordable, qu’il ne faut pas forcément remplacer les équipements traditionnels mais simplement y adjoindre des capteurs, de nouveaux instruments électroniques…”

Scénario-témoin choisi pour démontrer la faisabilité d’une transition 4.0 : une chaîne de fabrication d’une montre dont certaines pièces sont conçues, produites et assemblées au Sirris en 3D. La montre étant un objet se prêtant idéalement à une personnalisation poussée…

Un démonstrateur, 9 modules fonctionnels

L’usine-pilote “4.0 Made Real” est implémentée à la fois sur les sites du Sirris de Seraing et de Diepenbeek (près d’Hasselt). Et, chose importante, elle constitue une brique de plus dans le projet de démonstrateurs Industrie 4.0 que veut déployer la Région wallonne en divers endroits de son territoire. Relire notre article à ce sujet.

Le démonstrateur “4.0 Made Real” s’articule et met en oeuvre neuf modules fonctionnels numériques. Quatre de ces modules sont implémentés à Liège, les cinq autres dans le Limbourg.

 

La scission du démonstrateur AM 4.0 entre deux sites (Liège et Diepenbeek) a été réalisée non pas par souci d’un classique équilibre communautaro-linguistique, mais pour démontrer que la ligne de production 4.0 peut faire intervenir plusieurs sites et partenaires, que les solutions et logiciels de collecte, d’analyse et de suivi des données assurent la continuité tout au long de la chaîne. “Un facteur souvent bloquant à l’heure actuelle dans le secteur de la production.”

 

Passons en revue les modules de Liège:
– démonstrateur AM (additive manufacturing) intégré: il inclut un configurateur en-ligne, permettant de passer commande d’un produit dont le design est personnalisé par le client ; avant la mise en production, un logiciel de simulation vérifie la faisabilité de la pièce, compte tenu de son design, des contraintes de matériaux et des conditions de production ambiantes

Des logiciels se chargent d’assurer le suivi des indicateurs de qualité et de guider l’opérateur à travers des différentes étapes et manipulations de fabrication additive.

– assurance qualité intégrée: le Sirris a développé des outils d’analyse de la qualité des matières premières utilisées (poudres) pour la fabrication additive, afin d’évaluer et garantir la qualité constante des composants

– eID et passerelle vers l’étape de certification: ici les outils logiciels développés visent à garantir la traçabilité des informations tout au long de la chaîne de fabrication; chaque composant ainsi que le produit final sont ainsi associés à un “passeport produit numérique” (tag eID) qui témoigne de leur qualité ; les informations collectées portent non seulement sur les composants et matières mais aussi sur le processus de production proprement dit, avec protection via droits d’accès pour les informations confidentielles qu’un fabricant ne voudrait pas voir divulguées

– production assistée par l’opérateur: le Sirris a développé une application qui, d’une part, enregistre toutes les opérations effectuées par tout opérateur des équipements utilisés pour la fabrication et, d’une part, guide l’opérateur tout au long de la tâche qui lui incombe (information sur les tâches effectuées en amont, liste de contrôle pour préparer la machine, indications sur des contraintes spécifiques…).

La scission du démonstrateur AM 4.0 entre deux sites (Liège et Diepenbeek) a été réalisée non pas par souci d’un classique équilibre communautaro-linguistique, mais pour démontrer que la ligne de production 4.0 peut faire intervenir plusieurs sites et partenaires, que les solutions et logiciels de collecte, d’analyse et de suivi des données assurent la continuité tout au long de la chaîne. “Un facteur souvent bloquant à l’heure actuelle dans le secteur de la production.”

Pour l’étape de la fabrication additive (la spécialisation du Sirris étant les matières polymères et métalliques) et de la vérification/validation de qualité de cette phase, le centre de recherche a donc développé divers outils. 

Par exemple, un logiciel de détection de défauts, s’appuyant notamment sur une collecte et un suivi des conditions ambiantes dans lesquelles l’équipement AM opère, ces conditions pouvant avoir une influence sur le comportement de la matière première.

Une autre fonction logicielle simule ce qui se produit au fil du processus de fabrication. “Pour ce faire, il faut pouvoir identifier et suivre les indicateurs qui ont réellement un impact sur la qualité de la production. Pour ce faire, nous nous appuyons sur l’intelligence artificielle”, explique Olivier Rigo, responsable d’équipe Additive Manufacturing au Sirris.

Prendre les PME par la main et leurs données les outils nécessaires pour se lancer dans la transition 4.0 de leurs processus manufacturiers.

 

“Il faut en effet être certain que l’on vérifie et surveille les “bons” indicateurs, en fonction de l’impact qu’ils peuvent avoir sur le processus de fabrication.” Exemples: le niveau d’oxygène qui aura un effet différent en termes de déformation potentielle selon la nature du matériau utilisé. Autre exemple: l’impact (ou l’absence d’impact) de toute interruption du processus de fabrication additive. “Avec certains types de matériaux, une interruption peut être cause de défaut.”

“Le travail que nous effectuons, en tant que centre de recherche, se situe en amont des travaux de normalisation qui sont en préparation du côté notamment de l’ISO. A ce jour, il existe encore fort peu de référentiels [sur lesquels se baser pour jauger de la qualité d’une fabrication additive]. Nous créons donc une bibliothèque de défauts afin de pouvoir une base de comparaison et d’évaluation et pouvoir ainsi éduquer le système IA”.

Du neuf pour l’ancien

Tous les outils et logiciels développés par le Sirris ainsi que certains dispositifs matériels (des capteurs de température, d’humidité…) mis au point ont pour but de démontrer qu’il est possible de préserver des équipements existants, de permettre de collecter et d’exploiter des données “alors qu’ils n’ont pas été conçus pour en produire” afin de basculer des lignes de production existantes vers le 4.0. “Le but du Sirris n’est pas de remplacer des développeurs de solutions ou des éditeurs de logiciels mais de démontrer qu’il est possible, pour les PME, d’ajouter une couche de traçabilité et de suivi de la chaîne de production.”

Les missions d’accompagnement que proposera le Sirris commenceront potentiellement par une visite du démonstrateur, à Liège et/ou à Diepenbeek, ou à des démos sur les sites des sociétés. Mais ce n’est là qu’un premier pas. L’idée est de pousser les sociétés industrielles à se lancer tout d’abord dans un proof of concept, de gagner progressivement en confiance dans les processus 4.0. Selon l’importance de leur projet et la profondeur qu’elles veulent lui donner, le cheminement pourra se faire en quelques semaines ou parfois exiger plus d’un an. Mais nous sommes disponibles tout au long”, affirme Jean-Claude Noben.

Tous les outils utilisés ou développés sont volontairement low code”, insiste Olivier Rigo. “Il est en effet important que les outils puissent être aisément utilisés par des PME ne disposant pas forcément de ressources ou de compétences pointues.” Le Sirris les aidera aussi à procéder aux paramétrages nécessaires des outils et logiciels, en fonction de leur contexte spécifique. “Chaque application de chaque société sera forcément différente mais le squelette demeure le même.”