De la théorie à la pratique: des apprenants BeCode au service de PME industrielles locales

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Par · 28/06/2019

Cela fait partie de leur formation – pratique – à l’art de programmer: pour la deuxième année consécutive, des apprenants de l’antenne carolo de BeCode ont participé à une sorte de hackathon mutualisé pour entreprises industrielles locales afin de jeter les bases d’un projet que ces sociétés, souvent de petites entités, avaient en tête mais sans les moyens ou le temps de les concrétiser.

L’“HACKtion Commando”, organisé par le living lab Connexences (du centre Héracleè), est un exercice qui oscille entre hackathon et stage. Sa durée est en effet de trois semaines, “de quoi renforcer les chances de voir développer un réel prototype ou use case, qu’il s’agisse d’un produit, d’un service ou d’un processus”, indique Guillaume Hulin, chef de projet au sein de Connexences. Fil rouge: le monde industriel et des projets qui comportent obligatoirement une composante IT ou numérique.

Le schéma et les modalités en ont été imaginées par la société x-Five qui, pour ces deux premières éditions, a aidé Connexences à organiser le hackathon et a servi de coach pour aider les entreprises intéressées à donner corps au projet qu’elles désiraient confier aux apprenants de BeCode.

Cinq projets en 2019

Comme l’année dernière, un appel à projets a été lancé. Cinq projets ont été retenus, proposés par des sociétés de la région de Charleroi. Sur base de cette sélection, BeCode a choisi les apprenants dont les compétences ou affinités correspondaient le mieux au projet. Sur les 19 apprenants qui auraient pu espérer plancher sur ces projets, neuf au final ont pu le faire (dont quatre duos).

Par ailleurs, pour encadrer et aider les apprenants, une équipe pluridisciplinaire, composée de conseillers mis à disposition par Charleroi Entreprendre (nom de la nouvelle structure collégiale qui englobe désormais notamment le CEI Héraclès), de collaborateurs de x-Five et d’experts dans divers domaines (conception industrielle, industrie 4.0…).

Passons rapidement en revue les cinq projets retenus pour ce programme de développement de proto.

Sertip, société de Jumet spécialisée dans les installations industrielles (isolation, tuyauterie), désirait moderniser le processus d’audit de sécurité de chantier. Le but était de remplacer le classique formulaire papier par une appli sur smartphone permettant de rendre l’opération plus rapide, plus “maniable” et de collecter davantage d’informations que ce que permet une simple page A4. Contrainte majeure: rendre l’interface la plus simple et auto-explicative possible.

La solution imaginée joue donc la carte de la lisibilité et de la simplicité: la question s’affiche au centre de l’écran ; les réponses se font en cliquant sur deux ou trois cases-boutons. Autre possibilité: enregistrer vocalement une réponse courte qui sera immédiatement transposée en texte, voire prendre une photo illustrant le problème. Le petit rapport d’audit est ensuite expédié immédiatement au siège de la société, transposé dans le bon format, sans imposer de réencodage.

Aperam: former des opérateurs de pupitre de commande, en milieu sidérurgique, via un simulateur numérique.

Le projet Sicop (acronyme de Simulation of Coil Processing) est une solution de simulation destinée aux opérateurs de pupitre de commande de la société Aperam (Châtelet), productrice de produits en acier (inoxydable, électrique, aciers spéciaux). “Jusqu’à présent, la formation des opérateurs-finisseurs, sur les lignes de production de bobines, se faisait par compagnonnage, un opérateur chevronné supervisant un plus jeune”, explique Michel Vande Populiere, ingénieur chez Aperam.

“Cette méthode ne permet malheureusement pas d’envisager toutes les situations qui peuvent se produire.” D’où l’idée de développer un simulateur numérique, exploitable sur ordinateur classique ou portable mais aussi en réalité virtuelle, via un casque VR, pour simuler les situations à risque, les incidents ou problèmes de production atypiques. “Le but est aussi d’améliorer la qualité de la formation, d’éviter les coûts induits par une “casse” sur matériel réel et d’accélérer la formation qui prend actuellement 16 semaines”.

Le duo d’apprenants de BeCode a réalisé une simulation d’un cas spécifique d’incident et se dit prêt à poursuivre le développement. L’une des évolutions de l’outil inclurait une certaine dose de gamification pour la formation continue des opérateurs. “On pourrait imaginer qu’ils utilisent tous régulièrement le simulateur et que leurs “performances” soient mesurées et mises en concurrence”. Une sorte de concours d’émulation. Le simulateur présenterait en outre l’avantage de documenter les procédures et (ré)actions des opérateurs, afin de pouvoir procéder à un debriefing de leur session de formation ou remise à niveau.

Qui a dit que les filles ne s’intéressaient pas à la programmation? Même pour des projets étiquetés industriels, l’égalité genrée est au-rendez-vous à BeCode. Ici, l’équipe qui a travaillé sur le projet Easy Care de S-MI.

Autre projet: celui de S-MI (Sambre et Meuse Industries) qui a confié à un duo d’apprenants programmeurs de BeCode le développement d’une plate-forme de gestion des interventions et de suivi de réparations d’équipements de nettoyage industriel. Nom du projet: Easy Care.

Quatrième projet, celui d’Entra, blanchisserie industrielle d’Heppignies, avec une solution de gestion des stocks de linge destinés aux maisons de repos.

Enfin, Microniser (Charleroi), société spécialisée dans les solutions d’humidification de bâtiments et sites industriels, a fait développer une interface de commande pour une solution de rabattement de poussières dans des environnements de carrière industrielle.

Que vont devenir ces prototypes?

Les développements effectués ont dans l’ensemble bel et bien débouché sur des prototypes – la longueur du programme “Haktion Commando” présentant des avantages par rapport aux traditionnels hackathons, trop courts et voyant souvent se constituer des équipes qui se désintègrent une fois l’exercice terminé.

Les prototypes sont-ils pour autant viables? Leur développement sera-t-il poursuivi par les entreprises concernées? 

“Sertip a clairement annoncé qu’il était prêt à financer la fin du développement de l’application pour les audits de sécurité”, indique Guillaume Hulin.

“L’entreprise S-MI a également pu bénéficier d’un produit fonctionnel, ayant dépassé le stade du prototype, et va assurément utiliser le produit pour ses techniciens.

Pour Microniser, le projet d’abattage de poussières est déjà en route et l’interface de contrôle sera de toute manière poursuivie. Pour les deux autres, Aperma et Entra, qui sont des plus grosses structures, un point de validation est prévu en interne sur les suites qui seront données.”

Côté Aperma, les indicateurs semblent toutefois être au vert. En l’espace de trois semaines (durée du programme Hacktion), le duo venu de BeCode a réussi à développer un prototype de simulateur qui ne tient toutefois encore compte que d’un seul cas spécifique de problème de production. Mais le duo se dit prêt à poursuivre le développement pour inclure tous les cas possibles. Un parcours de développement qui pourrait prendre un an mais que la société Aperam semble être intéressée à poursuivre…
L’année dernière, le taux de prolongement et de concrétisation des projets avait été moindre. “Sur les cinq projets, trois sont mis en stand-by”, indique Guillaume Hulin. “Question de priorités de l’entreprise. Mais le fait d’avoir adhérer à une démarche de ce type leur a de toute façon apporté quelque chose en termes d’ouverture et d’expérience. 

Une solution a d’ailleurs été implantée par une imprimerie. Et une autre interface développée dans le cadre du hackathon est également utilisée mais s’intègre dans un projet plus vaste…”