Wallonia Big Data (3è partie): en quête d’une martingale commerciale

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Par · 04/09/2018

L’un des buts du projet de recherche collaborative Wallonia Big Data, imaginés au départ, était de faire naître, grâce aux use case (scénarios-pilote) des solutions, outils ou applications qui puissent être commercialisables, utilisables quasi “prêts à l’emploi” par des entreprises locales, en ne nécessitant qu’une somme réduite de développements et d’adaptations.

Question: le projet étant un partenariat public-privé, financé en bonne partie par des deniers publics wallons (qui ont contribué à financer la mise en oeuvre de l’infrastructure et le travail des data scientists et autres consultants), quel pourrait être le scénario de rentabilisation, de monétisation? Qui, quel organisme, sous quelle forme juridique, pourrait commercialiser les résultats? Et comment seraient alors réparties les “recettes” entre partenaires – publics et privés?

Quid de la propriété intellectuelle des use cases, apportée notamment par les porteurs de projet (Thales, Oscars…)?

“Arriver à quelque chose de mutualisable, créer une PFI (plate-forme innovante) était en effet l’un des objectifs de départ mais cela s’avère complexe à mettre en oeuvre”, déclare Stéphane Mouton, chef de projet R&D au Cetic. Rien n’a donc encore été décidé ou imaginé en termes d’éventuelle future structure d’exploitation une fois le PIT (Partenariat d’Innovation Technologique) arrivé à son terme (ce sera le cas en août 2019). “Les discussions se poursuivent à ce sujet, essentiellement entre NRB et la Région wallonne”, indique Stéphane Mouton.

Pour l’heure et donc sans doute aussi à plus long terme, les résultats de chaque use case et futur projet seront donc exploitables par la société qui l’a proposé (VitroCiset, Thales Alenia, Oscars… pour ce qui est des use cases en cours – voir notre article présentant les différents use cases). Et la propriété intellectuelle générée en cours de projet revient à son auteur… avec la complexité que cela présente, traditionnellement, lorsque plusieurs partenaires sont concernés – mais c’est là une problématique classique qui n’a rien de spécifique au projet Wallonia Big Data. 

“Concrètement”, déclare-t-on du côté de NRB, “à l’issue du projet PIT, les partenaires ayant réalisé un use case apporté par une société extérieure au projet [lisez: non membres du consortium de recherche Wallonia Big Data] sont propriétaires des résultats du use case.

Les membres du consortium peuvent exploiter ces résultats, sous réserve des éventuelles limites imposées par la société extérieure qui a fourni le use case. Cette dernière n’a pas de droit sur les méthodes élaborées.

Par ailleurs, l’accord entre les partenaires du consortium prévoit que les parties copropriétaires des résultats communs octroient à l’Université de Namur et au CETIC une licence d’utilisation des résultats communs aux seules fins de recherche et d’enseignement.”

Enterrée, l’idée de la PFI?

Quelles sont les chances qu’une structure d’exploitation commune (PFI) émerge malgré tout?

Sans aller jusqu’à cette perspective de “structure commerciale”, Stéphane Mouton dit avoir bon espoir qu’un écosystème prenne forme entre partenaires et acteurs wallons en matière d’analytique big data. “Au Cetic, nous tenons plus particulièrement à cette notion de mise en relation plus facile entre offre et demande, d’identification et de création d’un écosystème autour de l’analyse de données.

Il y a en effet un vrai besoin. Il existe pas mal de sociétés qui fournissent des services. Mais le problème est classique: toutes les sociétés impliquées dans le PIT n’étaient pas forcément habituées à opérer en mode recherche collaborative. Il y a donc eu certaines réticences au départ mais les choses, désormais, marchent bien…”

Chez NRB, on semble plus catégorique sur l’idée de PFI. “Au départ, la mise en place des services devaient donner lieu à une commercialisation “conjointe” des solutions et des services développés au travers d’une PFI. Aujourd’hui, la vision a évolué et l’objectif est certes de développer des compétences, des algorithmes, des services mais chaque partenaire reste bien propriétaire des résultats.

La commercialisation sera réalisée – en partenariat ou non – mais sans cette structure supplémentaire qu’était la PFI. NRB supportera l’infrastructure et les services pour assurer un environnement sécurisé et performant.”

Un nouveau modèle business chez NRB…

Lorsque la phase PIT/projet R&D, largement financée par la Région, aura pris fin, l’étape de la commercialisation commencera donc potentiellement.

Comment NRB, fournisseur de l’infrastructure d’hébergement, des outils analytiques et de certains services, l’envisage-t-il, pour ses propres prestations et son business model? Un modèle tarifaire, à son niveau, a-t-il déjà été élaboré pour la mise à disposition des outils et les prestations de services?

Michel Mans (NRB): Nous attendons que les différents use cases aient abouti pour choisir une logique de facturation.”

“Le but de ce projet PIT Wallonia Big Data est potentiellement de mettre des applications mutualisables par plusieurs clients, qui injecteront leurs données dans les solutions et schémas imaginés.

Traditionnellement, nous facturons en fonction du nombre de giga- ou de téra-octets consommés, du nombre de processeurs mis à disposition, de l’existence de processus de réplication ou de sauvegarde…”, indique Michel Mans. “Mais demain, dans ce cadre big data, on ne peut plus se reposer sur un modèle de vente de téra-octets. Des pistes possibles consistent à facturer en fonction des transactions, de l’utilisation de tel ou tel type de module ou d’algorithme.

Pour l’heure, nous n’avons pas encore déterminé quel serait le modèle de tarification. Nous attendons pour cela que les différents use cases aient abouti pour choisir une logique de facturation.

Il faudra trouver une solution qui soit “inventive”, qui soit intéressante face à ce que proposent les grandes marketplaces internationales. Il y aura sans doute des scénarios différents selon les use cases. On peut même imaginer que les résultats du projet soient mis gratuitement à disposition des demandeurs mais avec monétisation par des acteurs industriels ayant certains intérêts à ce que les projets d’analyse aboutissent parce qu’ils seraient source de revenus pour leurs propres activités…”