HealthTech.Belgium: accélérer les tests d’innovations e-santé

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Par · 02/02/2018

acnéAgoria, BeMedTech, la fédération belge de l’industrie des technologies médicales, et l’ABDH, l’association belge des directeurs d’hôpitaux, ont officiellement porté sur le fonts baptismaux l’initiative HealthTech.Belgium.

L’ambition: “faire de la Belgique la première région dans le monde à effectuer des tests et validations d’innovations Health Tech à grande échelle”. Excusez du peu !

Qu’entend-on exactement par “health tech”? Officiellement, cette appellation, prise dans son acception la plus large, désigne la santé numérique et le recours et déploiement de technologies “permettant la mise en oeuvre de connaissances structurées et de compétences sous forme de dispositifs, de médicaments, de vaccins, de procédures et de systèmes conçus afin de résoudre un problème de santé ou améliorer la qualité de vie”.

La définition vient de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et recouvre donc aussi bien les “dispositifs” médicaux (dont on sait qu’ils incluent aujourd’hui également les capteurs en tous genres mais aussi les logiciels et applis), les systèmes médicaux, pharmaceutiques voire même organisationnels.

Le champ est donc – potentiellement – immense.

Le but, beaucoup plus immédiat et pragmatique, est de tenter d’accélérer le processus d’adoption et de déploiement d’innovations e-santé par les professionnels de terrain en facilitant leurs tests par des acteurs de terrain. “Les start-ups créées dans ce domaine sont nombreuses et notre industrie recèle des pépites, mais ces innovations sont encore sous-utilisées pour répondre aux défis du monde médical. Il se passe parfois beaucoup trop de temps avant que les patients puissent en bénéficier.”

C’est quoi ce nouveau “machin”?

HealthTech.Belgium, c’est quoi au fait? Un nouveau “réseau” d’acteurs? Une structure-coupole? Un acteur fédéral ou trans-régional, trans-clochers?

Voici ce qu’en dit Carole Absil, responsable Healthcare Technology Solutions chez Agoria: “HealthTech.Belgium n’est pas cluster de plus, c’est une coupole qui vise à mettre du liant entre ce qui existe déjà sur le terrain. Chaque acteur apporte ses compétences. HealthTech.Belgium aiguille pour sa part les porteurs de projets vers le bon acteur, servant par exemple de levier pour ce que font déjà Lifetech.brussels et MedTech Wallonie et Flandre.

HealthTech.Belgium est un fast track qui fédère les actions de soutien aux entrepreneurs Health Tech des trois régions, autour d’une même force et d’une volonté d’œuvrer ensemble.”

Carole Absil (Agoria): “HealthTech.Belgium est un mécanisme “fast track” qui fédère les actions de soutien aux entrepreneurs Health Tech des trois régions, autour d’une même force et d’une volonté d’œuvrer ensemble.”

Soit! Mais qu’est-ce qu’un mécanisme “fast track”? Un groupe de travail? Une administration virtuelle? Un facilitateur de dialogue entre acteurs, associations et “plates-formes” pré-existants? Réponse: “cette coupole a pour but de porter les bonnes initiatives locales à plus grande échelle et de faciliter les tests dans les institutions de soins”.

Paul d’Otreppe, président de l’ABDH, l’exprime autrement: “Le but est d’ouvrir les portes le plus largement possible. Le message que font passer les porteurs de projets, c’est qu’on leur dit trop souvent non.

Paul d’Otreppe (ABDH): “HealthTech.Belgium a pour vocation d’orienter les projets et porteurs de projets parce qu’on manque actuellement d’outils de coordination.”

Le rôle de HealthTech.Belgium sera tout d’abord de procéder à une analyse des projets par un groupe d’experts qui pourra déterminer quels sont les besoins pour les prochaines étapes et qui prendra contact avec les professionnels de terrain, les médecins-chef pour voir comment dimensionner la phase de test.

HealthTech.Belgium a pour vocation d’orienter les projets et porteurs de projets parce ce qu’on manque actuellement d’outils de coordination. Le but est de donner une plus grande ampleur à ce qui se fait à Liège ou à Gand et de faire gagner des mois, sinon des années, aux projets innovants.”

A lire également, les interviews de:

Carole Abril (Agoria): “HealthTech Belgium est là pour faciliter le flux d’innovation”

Azèle Mathieu (Lifetech.brussels): le rôle des acteurs régionaux et fédéraux

L’indispensable dimension belge

Si les trois Régions sont en train de booster et de structurer leurs actions et leurs écosystèmes e-santé/med tech respectifs, le constat a en effet été posé qu’il manquait un étage à la fusée: une coordination au niveau fédéral qui, à bien des égards, reste à la manoeuvre ou le plus indiqué pour activer certains leviers.

Carole Absil (Agoria): “Le but est d’ouvrir le plus vite possible la bonne porte, de trouver la personne ad hoc qui pourra accélérer le projet.”

Ce dont on parle ici, c’est notamment de faciliter la mise en phase de test de nouveaux dispositifs et solutions med tech/e-santé, de préférence à grande échelle, afin de multiplier les confrontations à la réalité de terrain, aux spécificités locales (parfois d’ordre culturo-médicales), aux pratiques spécifiques, etc.

Maggie De Block: “Permettre aux applications numériques innovantes d’accéder mieux et plus vite au secteur des soins de santé, dans l’intérêt du patient.”

L’espoir est donc de permettre à une solution innovante d’être expérimentée, amendée, maturée en plusieurs points du pays, en franchissant les barrières linguistico-régionales.

“Peu de pays offrent cette opportunité, pour un projet innovant, de voir son produit ou service être testé à grande échelle, sur de multiples sites, dans plusieurs langues, dans divers contextes culturels”, souligne Carole Absil.

Ce n’est d’ailleurs pas encore le cas non plus en Belgique mais c’est justement là l’ambition de HealthTech.belgium qui veut ainsi donner un cachet supplémentaire à la Belgique, un argument d’attractivité, pour “attirer et coordonner l’innovation plutôt que de la voir partir” vers d’autres cieux.

Si l’on parvient à faire jouer, au-delà des clochers régionaux, les hôpitaux, professionnels des soins de santé, maisons de repos et de revalidation dans la même pièce de théâtre pour tester les projets innovants med tech/health tech, cela pourrait attirer des porteurs de projets étrangers. C’est en tout cas l’ambition qu’osent formuler les initiateurs de HealthTech.belgium. “Faire de la Belgique un acteur incontournable, être davantage chauvin,  tirer parti de nos atouts en attirant l’innovation et les talents du monde entier.”

Tout reste à construire

Bien des obstacles demeurent toutefois. Bien des mécanismes, courroies de transmission, habitudes, collaborations et bonnes volontés doivent encore être concrétisés. Car, pour l’instant, HealthTech.Belgium est une simple “initiative”, certes consensuelle, mais qui doit encore prendre corps pour atteindre ses objectifs. Le seul rouage concret, d’ailleurs pré-existant (il ne prend pas soudain forme parce que HealthTech.Belgium voit le jour), c’est le programme d’accélération qu’avait au départ mis sur pied le cluster Lifetech.brussels et qui étend désormais son action aux porteurs de projets des trois régions.

Le programme d’accélération qui démarre en ce début 2018 accueille en effet 16 projets: 7 wallons, 5 bruxellois et 4 flamands. Chaque Région finance l’exercice pour ses propres ouailles. Mais les 16 projets bénéficieront du même accompagnement. Un pool tri-régional de coachs les accompagnera. Les formations et sessions se donneront, selon les thèmes successifs, en trois endroits de Belgique, dont Bruxelles et Liège.

Les formations et conseils portent sur une grande diversité de sujets, depuis la technologie pure jusqu’à la protection de la propriété intellectuelle, en passant par la validation du modèle commercial ou encore les aspects réglementaires et juridiques spécifiques au secteur de la santé. Plus d’informations sur le site de Lifetech.brussels.

Pour le reste: le “single point of contact” que veut devenir HealthTech.Belgium doit encore s’organiser. Nous y reviendrons d’ailleurs plus en détails prochainement.

A terme, Agoria espère par ailleurs voir se former un comité d’experts unique qui puisse informer, accompagner et guider les comités d’éthique, un par hôpital, afin de mieux leur faire appréhender la réalité et les particularités des “new health techs” et harmoniser autant que possible les arguments et perceptions qui aboutissent à l’adoption ou au rejet d’un nouveau “dispositif”.

Les partenaires

HealthTech.Belgium a été créé par un trio de fondateurs, avec le soutien, d’emblée, des ministres Alexander De Croo (agenda numérique) et Maggie De Block (santé publique). Notons d’emblée qu’au-delà des partenaires qui ont déjà adhéré à l’initiative (voir ci-dessous), la “coupole” fait dès à présent passer le message que le cercle n’est en rien fermé et que d’autres organisations sont les bienvenues.

Qui sont les initiateurs? Les trois fondateurs principaux sont, comme on l’a vu, Agoria, BeMedTech, et l’ABDH.

Agoria se chargera de la coordination globale et des volets croissance et internationalisation.

L’ABDH servira de relais pour la coordination des tests en hôpitaux.

BeMedTech, pour sa part, s’occupera de l’accès au marché et des aspects davantage régulatoires.

S’y ajoutent, au rayon partenaires:

  • MedTech Wallonia, qui s’orchestre autour de WSL, incubateur des sciences de l’ingénieur ; partenaires (outre WSL), le living lab e-santé WeLL, les pôles de compétitivité BioWin MecaTech, LeanSquare, CIDE Socran, les incubateurs iTech et WBC (Sciences du Vivant), B2H et le BioPark. Plus d’informations sur la création de cette nouvelle “filière” med tech en Wallonie dans cet article.
  • le cluster e-santé Lifetech.Brussels
  • MedTech Flanders
  • le BlueHealth Innovation Center (centre derrière lequel on retrouve Microsoft dans un but de “stimulation de l’innovation et de l’entrepreneuriat en Flandre, au croisement de la technologie et des soins de santé, dans les axes Cure, Care & Comfort”); il intervient davantage comme accompagnateur dans la phase d’idéation et de création de start-up
  • et l’asbl In4Care, centre d’innovation en soins de santé situé à Heverlee, près de Louvain. Il propose des formations, des activités de co-création, des services de coordination de tests en institutions de soins. On retrouve, dans l’équipe de direction, un certain Eric Van der Hulst, directeur Health Innovation à l’Imec, très impliqué dans les initiatives e-santé de la ministre Maggie De Block dont il est l’un des conseillers, ainsi que Bart Collet, fondateur de healthstartup.eu.