Tour de chauffe pour R/O, l’incubateur BD transmédia

Article
Par · 25/11/2016

Le programme d’incubation carolo R/O, dédié à la BD transmédia, ne sera effectivement lancé qu’au printemps prochain mais la sélection des 10 projets qui auront l’occasion d’y être accompagnés et “maturés” bat son plein.

Les candidatures, ouvertes à tous les porteurs de projet quel que soit leur pays d’origine, sont encore possibles jusqu’à la fin décembre. A ce jour, environ 200 projets, majoritairement venus de l’étranger (30% de projets wallons), ont été réceptionnés (voir encadré ci-dessous). Un premier exercice d’élagage a été fait afin d’éliminer ceux qui ne correspondaient pas au thème ou à la philosophie de l’incubateur.

Pour rappel, R/O se dédie à la BD nouvelle génération. Celle qui se décline sur de multiples médias, flirte et intègre la vidéo, la réalité virtuelle, le numérique dans toutes ses formes… L’incubateur accueillera créateurs BD, scénaristes, spécialistes de l’image de synthèse, concepteurs et porteurs de projets et les formera aux nouvelles technologies et méthodes de création, à la maîtrise des divers contextes dans lesquels leurs histoires et personnages sont appelés à évoluer – de la planche classique aux tablettes numériques ou autres casques de réalité virtuelle, en passant par le cinéma, le jeu mobile…


Environ 30% des projets déposés à ce jour (et 25% des projets ayant résisté à la première sélection) sont donc portés par des créateurs wallons.

Le reste vient des quatre coins du monde: Canada, Honduras, Corée, France, Italie, Etats-Unis, pays d’Europe du Nord ou de l’Est…

Profils des porteurs de projets? “Essentiellement des auteurs voire auteurs-producteurs et des entrepreneurs. L’appel à candidatures privilégiait d’ailleurs clairement des profils plus entrepreneuriaux”, souligne Domenico La Porta, responsable du programme.


Les quelque 150 porteurs de projet pré-retenus se retrouvent cette semaine à Charleroi (environ 80 sur site, le reste via connexion en vidéostreaming) pour un bootcamp destiné à leur présenter tout à la fois le mode de fonctionnement de l’incubateur (ateliers, travail de groupe…) et le programme qui les attend l’année prochaine.

Pendant plusieurs jours, ils auront droit à des ateliers, à des conférences et même, ce week-end, à un hackathon de type “story jam” qui pourrait permettre à certains d’entre eux d’identifier parmi les autres participants de possibles profils complémentaires. Ce hackathon permettra en outre au lauréat de décrocher une place parmi les 10 projets retenus pour le programme d’incubation 2017.

La semaine de bootcamp aura une autre utilité primordiale pour les organisateurs: apprendre à connaître les participants, les rencontrer et les interviewer afin de poursuivre l’exercice de sélection finale.

A quoi ressemblera le programme d’incubation?

Les sessions de formation, d’incubation (R/O Institute) et les ateliers de prototypage et de maîtrise technologique (R/O Lab) démarreront en mars ou avril. La date précise n’est pas encore connue, les initiateurs attendant pour cela d’être fixés sur le lieu où l’incubateur établira ses quartiers. Ce sera Charleroi et probablement le site Quai 10 mais ce dernier doit encore faire l’objet de derniers aménagements pour rendre l’incubateur réellement opérationnel…

Les participants seront coachés, accompagnés, conseillés par une petite armada d’experts et de spécialistes (65 seront actifs, 15 autres se tiennent en réserve pour des besoins spécifiques).

Ces experts viennent de tous les horizons (tant professionnels que géographiques) “afin de nous permettre de couvrir tous les maillons de la chaîne de création”: créateurs de films, de séries, de BD, de jeux vidéo, spécialistes de la réalité virtuelle ou augmentée, de la rédaction de scénarios, spécialistes du design d’environnements ou de personnages, profils plus orientés business model, Internet des objets ou big data, et même des “neurologues et psychologues, qui peuvent faire comprendre le fonctionnement du cerveau, la manière dont le spectateur perçoit un environnement, s’engage dans l’histoire…”

Le programme d’incubation durera 8 mois. Les 6 premiers seront consacrés à l’apprentissage, à la formation et au prototypage. Suivront 2 mois pendant lesquels les porteurs de projet mettront la dernière main à leur travail, à leur “bible”, comme l’appelle Domenico La Porta, responsable du programme. Ce document, accompagné ou non d’un prototype, précise notamment la nature de la propriété intellectuelle transmédia développée. “Un document qui peut être présenté à nos partenaires et à d’éventuels investisseurs.”

Notons au passage que la participation à l’incubateur est gratuite (même le logement est pris en charge) mais les participants “monnaient” malgré tout leur parcours d’apprentissage, puisqu’ils acceptent d’emblée de céder 50% de leurs droits de propriété intellectuelle (“encore au stade de l’ébauche, d’ailleurs”) au R/O Institute et à ses partenaires. Ces derniers – ceux qui rendent le programme possible – sont notamment la Région wallonne (via Sambrinvest et Wallimage), la Rtbf, Media Participants et quelques autres dont les noms sont pour l’instant tenus secrets. Parmi eux, “un éditeur de logiciels et un important acteur du monde des jeux vidéo.”

Les partenaires de R/O disposent d’une option (droit de première vision et exploitation) sur ces “bibles”. Option qu’ils doivent concrétiser (mise en production du projet) dans les 18 mois qui suivent. Si tel n’est pas le cas, l’auteur récupère 100% de sa propriété intellectuelle.

Acquisition de compétences gamifiée

Particularité – et même originalité totale – du programme d’incubation R/O: la manière dont les incubés, leur progression dans l’acquisition de compétences et le montage de leur projet, seront évalués. L’équipe R/O, emmenée par Domenico La Porta, par ailleurs directeur de Wallimage Creative, a misé sur une méthodologie basée (“augmentée”, pourrait-on dire) sur la gamification. Le scénario en a été imaginé par Domenico La Porta lui-même et concrétisé dans une appli développée par la société carolo Reed.

L’acquisition de compétences et la maturation du projet sont mesurées au fil de l’eau, évaluées au travers de points qui sont accordés. Première originalité: ils le sont, selon le type d’activités, tantôt par les pairs, tantôt par les “enseignants” et experts sollicités pour les ateliers, conférences…

Domenico La Porta (R/O Institute): “Le but de la gamification est de favoriser le partage de connaissances et la création d’une base de connaissances commune. Nous voulons inciter les porteurs de projet à faire ce qu’ils devraient faire spontanément.”

“Le participant accumule des points, en participant par exemple à des conférences, et les engrange dans un “coffre-fort” virtuel”, explique Domenico La Porta. “Il puise dans sa cagnotte afin de pouvoir obtenir par exemple un accès à des séances de groupe qui lui permettront de confronter son projet à l’analyse de ses pairs et des experts. Lors de ces sessions, ses pairs évaluent son travail et lui attribuent des points.”

L’idée est que, chaque mois, chacun épuise la totalité des points gagnés au bénéfice des autres. Le compteur est remis à zéro chaque mois.

Un quota déterminé de points, glanés pour avoir prouvé diverses compétences, est nécessaire pour accéder à certaines activités, par exemple des ateliers visant à acquérir une compétence supplémentaire spécifique.

 

L’animateur de chaque atelier dispose, pour sa part, d’un stock de points qu’il distribue, dans des proportions variables, aux divers participants.

“Cette méthode fait intervenir une certaine dose de compétition, en mode jeu vidéo, entre participants mais a surtout pour but d’inciter les participants à démontrer leur valeur pour accéder à des ateliers dont ils ont besoin pour progresser.

Les participants sont récompensés par des points pour le temps qu’ils passent à l’Institut, pour le nombre de publications et de partages de contenus qu’ils génèrent dans l’espace réservé à la communauté, ainsi qu’en fonction du nombre de “likes” qu’ils récoltent. Le but est ainsi de favoriser le partage de connaissances et la création d’une base de connaissances commune. Nous voulons inciter les porteurs de projet à faire ce qu’ils devraient faire spontanément.”

Les points accordés ne sont pas purement théoriques ou associés à des cotes classiques. Par contre, ils donnent droit à des licences logicielles, à des prestations (conseils d’expert, prestation d’une société spécialisée en effets spéciaux…), à une participation à des ateliers personnalisés, voire à des festivals internationaux (Cannes, par exemple).