Fabrication additive: rien que quelques exemples…

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Par · 07/10/2015

Un peu partout, des entreprises et des industriels se lancent dans la fabrication additive. Souvent encore en mode exploratoire, pour du prototypage ou pour la production d’objets qui serviront à des fins promotionnelles, de démonstration ou marketing mais avec aussi des réalisations qui touchent de plus en plus à l’opérationnel.

Nous vous en donnons ci-dessous quelques exemples, de quoi illustrer l’immense variété des possibles. Vous en découvrirez d’autres au fil des articles consacrés, dans ce dossier, à plusieurs acteurs de nos régions.

Techspace Aero a investi dans une imprimante 3D pour de la production métallique qui, dans un premier temps, se limitera à du prototypage d’aubes de moteurs. La société compte ainsi réduire sensiblement les délais de conception de pièces (divisés par 6).

Toujours au rayon aéronautique mais dans un registre ultra-léger, Flying Cam a fait appel, depuis quelques années déjà, aux compétences du Sirris pour l’aider à optimiser le design de son hélicoptère téléguidé. Plus de 80% des pièces sont fabriquées en 3D afin d’en optimiser à la fois la forme et le poids.

Le drone de la start-up liégeoise Fleye a lui aussi été prototypé et sera en partie fabriqué grâce à la fabrication additive.

Restons un instant encore dans l’industrie aéronautique. AMT-Titastar est une société créée conjointement par BMT Aerospace et AET dans le but de créer et de commercialiser de nouveaux produits et services sur le marché aéronautique et aérospatial. Parmi les innovations placées à l’agenda: des perceuses intelligentes et une technologie d’impression 3D du titane via fusion par faisceau d’électrons. Les perceuses “Smart Drilling Unit”, produites en grande partie par impression 3D, présentent des avantages en termes de rapport poids-résistance et de compacité (favorisée par des caractéristiques de faible puissance et de commande numérique). Elles doivent leur qualificatif d’“intelligentes” à leur aptitude de moduler dynamiquement leur vitesse en fonction de chaque type de matériau. Les gains obtenus se manifestent notamment en termes de cycles de production raccourcis (jusqu’à 70%), de consommation de matériaux (moins 20%) et d’entretien.

Passons à l’industrie. La société liégeoise ICM (Industrial Control Machines) explore elle aussi les avantages d’efficacité de la production 3D de pièce. Son domaine d’expertise: la production de générateurs de rayons X portables à usage industriel. Exemples d’utilisation de ces systèmes: la vérification de soudures mais aussi l’inspection de colis suspects ou abandonnés. La fabrication additive doit permettre de rendre ces générateurs de rayons X encore plus compacts, puissants et robustes.

Le domaine médical, lui aussi, fourmille d’initiatives – comme vous pourrez le constater au fil des articles-portraits de ce dossier. Et, en la matière, la Wallonie semble devenir un pôle d’attraction pour des acteurs étrangers qui viennent chercher chez nous les compétences nécessaires. Ainsi la française Kasios, spécialisée dans la production de prothèses et d’implants, s’est-elle implantée à Gilly pour produire elle-même les dispositifs médicaux, sur base de partenariats tissés avec Bone Therapeutics et la toute jeune Cerhum, dont nous vous parlons par ailleurs. 

Au rayon automobile, Green Propulsion, ce constructeur automobile rescapé des années glorieuses de l’automobile belge et qui a fait revivre la marque Imperia, a développé la boîte de vitesse de son véhicule hybride en s’aidant de la fabrication additive. La société a en effet fait produire par VoxelJet des moules de fonderie en sable et a ensuite confié à une fonderie le soin de produire par coulée sous pression des petites séries de pièces.

En 2013, Hoet Couture proposait des montures de lunettes métalliques (titane) imprimées en 3D. Le fruit d’un processus R&D mené en collaboration avec Melotte. Au rayon mode, Kipling a déjà produit des sacs en plastique imprimé en 3D (collection Monkey Madness). En Flandre, Runners Service Lab a réalisé, en collaboration avec Materialise, des semelles personnalisées pour chaussures de marche et de course et ce, sur base d’une capture 3D de la morphologie du pied, topographiée via scanning du pied posé sur une plaque munie de milliers de capteurs.

En 2013, la compagnie d’assurances AP-DVV annonçait le service Keysave. Le principe? conserver, sur un serveur sécurisé, le fichier du modèle 3D de ses clés qu’on aura préalablement scannées, le récupérer en cas de perte ou de vol afin de pouvoir produire des doubles en 3D. Partenaire pour la réalisation de la solution: Happiness Brussels.

Dernier exemple, dans le monde du sport. Lors de la phase qualificative de l’Euro 2016, les coupes remises aux Diables rouges lors des matchs ont été conçues en 3D et fabriquées en technologie additive, par IDArt à Braine-l’Alleud.

Multiples autres exemples de réalisations dans les articles consacrés aux sociétés reprises dans ce dossier. A savoir, par ordre alphabétique: 3D-Side, Addiparts, Additiv, Any-Shape, Cerhum et Vigo.

Un concept trop vulgarisé?

Si le “3D printing” et la fabrication additive promettent de grandes choses, le buzz qui a été créé autour de ces concepts, ces dernières années, a potentiellement des effets pervers. A trop vouloir simplifier le concept et les enjeux, l’impression a souvent été donnée, dénoncent plusieurs des néo-entrepreneurs que nous avons rencontrés, que l’impression 3D, au-delà du gadget, est à la portée du moindre quidam.

Donnons un instant la parole aux fondateurs de Vigo et d’Additiv pour remettre certaines pendules à l’heure.

“Si on n’a pas les outils nécessaires à la création de fichiers, on rencontre rapidement un mur”, déclare Christophe Hermanns, patron de Vigo Universal (Namur). “Des modèles existent sur Internet mais sont impossibles à reproduire chez soi. Et on ne devient pas designer industriel d’un claquement de doigt. De plus en plus de gens s’en rendent compte…”

Tarik Lebailly, co-fondateur et patron d’Additiv (Mons), tient lui aussi à casser un mythe: “la presse a drainé une image fausse de l’impression 3D. Le 3D a été galvaudé et est encore très mal vendu. On l’a présenté comme quelque chose qui allait révolutionner le monde, avec des machines qui seraient capables de tout faire. Elles ont certes des capacités certaines mais ont aussi leurs limites.”

Il y a, tout d’abord, les temps de réalisation, que ce soit en fil fondu ou en frittage de poudre. Comptez jusqu’à 10 heures pour une production 3D sur bac complet en frittage de poudre. Avec nécessité de laisser refroidir la machine entre chaque production pour éviter des problèmes de formes, notamment. Et un objet imprimé doit encore être peaufiné, poli, recevoir une finition. S’il y a personnalisation, le temps de réalisation, depuis la validation du fichier jusqu’à la finition, peut prendre 5 ou 6 jours. “Les machines existantes ont atteint leurs limites. La réduction des temps d’impression passera par une adaptation de la manière de créer les objets.”

“S’y ajoutent également des limites en termes de matériaux et de finition. La technique du dépôt de fil fondu produit encore un effet escalier. Des progrès en la matière doivent encore être faits et font d’ailleurs l’objet de nouveaux développements.

Le coût ensuite: celui de machines davantage haut de gamme, que peu d’acteurs locaux peuvent (encore) se permettre. C’est la raison pour laquelle de petits acteurs de la production additive mais aussi les clients eux-mêmes se tournent encore beaucoup chez nous vers le Sirris – voir notre article dans ce dossier. C’est aussi la raison pour laquelle il est tellement important de voir naître des prestataires de services pouvant mutualiser les investissements.

Tarik Lebailly pointe un autre besoin: “le marché, chez nous, se cherche encore. Plusieurs acteurs arrivent ou sont en passe de se spécialiser mais les pays voisins sont mieux placés, proposent des ressources plus importantes – la France, notamment, qui s’est lancée, comme la Flandre, beaucoup plus tôt, dans l’impression 3D. Chez nous, il faut encore évangéliser. Et c’est aussi un rôle que devront assumer des acteurs comme Additiv. Mais ce qui manque encore, c’est sans doute un organisme qui puisse mettre en exergue ce qui existe chez nous. Ou encore une source de subsides pour les projets de fabrication additive. Le Sirris peut nous accompagner mais cet organisme a une vocation particulière, orientée R&D. Il n’a pas vocation à toucher le monde professionnel…”