Tapptic décroche un subside à l’innovation pour de l’assurance-qualité logiciels

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Par · 30/01/2015

Depuis 4 ans, dans le cadre de son programme Rise–Innovative Starters, Innoviris, l’institut bruxellois pour la recherche et l’innovation, accorde des subsides à de jeunes entreprises considérées comme à “haut potentiel technologique” qui lui soumettent un plan stratégique en matière d’innovation, plan qui, nécessairement, doit être caractérisé par une nette valeur ajoutée et des perspectives de développement importantes.

Cette année, l’une des trois sociétés épinglées est Tapptic, spécialisée dans le développement et déploiement de solutions pour équipements mobiles ou “objets” connectés.

Hauteur de l’aide allouée: 500.000 euros à investir sur une période de trois ans. Dans le cas de Tapptic, toutefois, cet argent sera mis à profit dans des délais nettement plus brefs.

Le défi Qualité des applis modernes

En fait d’innovation, c’est de manière plus pragmatique en termes de pérennité et de pertinence de ses propres activités et services que se définit le projet stratégique déposé par Tapptic. Ce qui n’enlève d’ailleurs rien à son caractère innovant. Voyez plutôt.

Comme toutes les agences et développeurs qui se positionnent sur le terrain de la conception d’applications destinées aux équipements mobiles et autres objets connectés, Tapptic est confrontée à l’explosion débridée du nombre de “devices”, objets, versions de systèmes d’exploitation, caractéristiques de plates-formes, spécificités propres à certains fabricants…

“Il fut un temps où tester et valider une application destinée au monde mobile était simple”, explique Christophe Chatillon, patron de Tapptic. “Mais on est passé de quelque 100 terminaux différents sur le marché, voici 4 ans, à plus de 2.000 aujourd’hui.” Avec les multiples variantes évoquées ci-dessus.

Par ailleurs, le marché n’accepte plus les maladies de jeunesse, les bugs qui plantent les applis… C’est que le profil des clients et destinataires finaux a changé. “Hier, on desservait des geeks, des early adoptors, des gens dont on savait ce qu’ils feraient de l’application et qu’un bug ne dérangeait pas forcément.” Aujourd’hui, il faut être paré pour tous les profils, tous les âges, toutes les utilisations pas toujours très orthodoxes. Sans compter que les applis sont devenues des solutions “critiques”. Plantage interdit “quand on parle de transactions bancaires, de surveillance de paramètres vitaux comme un taux d’insuline, ou de voiture qui refuse l’accès à son propriétaire parce que la commande Bluetooth ne marche pas”, énumère en guise d’exemples Christophe Chatillon.

Christophe Chatillon: “Les outils disponibles sur le marché sont insuffisants ou inadaptés. Les méthodes d’assurance qualité conçues pour les applications Web ne prennent pas en compte la problématique des terminaux.”

Comment objectiver, optimiser et rendre pertinent le test systématique d’applications, quand il y a 2.000 types de terminaux à prendre en compte avec, chacun, 200 “use cases” à passer au crible? Comment une société peut-elle effectuer 40.000 tests? Un chiffre qui double ou triple d’ailleurs en raison des processus successifs de vérification et (ré)adaptation… Quelle société peut d’ailleurs se permettre d’investir dans 2.000 terminaux?

“Les outils disponibles sur le marché sont insuffisants ou inadaptés. Les méthodes d’assurance qualité conçues pour les applications Web ne prennent pas en compte la problématique des terminaux.”

Conclusion tirée par Tapptic? Il est nécessaire de développer une plate-forme spécifique, apte à automatiser et rendre plus pertinent le test d’applis mobiles et autres “companion apps” (pour objets connectés). Elle servira non seulement à ses propres besoins de développement et d’intégration mais Tapptic la mettra également à disposition (selon un schéma de location à l’usage) de ses clients qui préfèrent internaliser le développement de solutions mobiles, voire de développeurs individuels.

Première version fin 2015

Tapptic va monopoliser une équipe de 10 à 12 personnes pour développer cette plate-forme TaaS (Testing as a Service). Le premier livrable devrait être finalisé d’ici la fin de l’année.

Budget global envisagé: 1 million d’euros, dont quasi la moitié sera donc financé grâce au subside InnovIris. Un premier acompte de 20% a d’ailleurs déjà été versé. Le solde viendra de la cagnotte de Tapptic qui, pour ce faire, puisera dans les fonds nouvellement rassemblés à l’occasion d’un tour de table qui, fin d’année dernière, lui a rapporté un million d’euros (injectés notamment par le Fonds Wallimage et des business angels français).

La plate-forme TaaS prendra la main, guidera les testeurs. “Souvent, les clients ne savent pas quoi tester, quels use cases vérifier.”

La plate-forme comportera un catalogue de templates, ensemble de “use cases” prédéfinis qui pourront être sollicités systématiquement et automatiquement par les testeurs. Ces cas ou scénarios d’utilisation pourront être adaptés ou complétés selon les besoins. Pour guider les testeurs, des familles de types d’applications, elles aussi prédéfinies, leur procureront automatiquement les use cases classiquement associés à ces applications. Il leur “suffira” de charger le code de l’appli à tester sur la plate-forme et la moulinette se mettra en branle, vérifiant le comportement de l’application telle que développée: “bugs éventuels, exceptions mémoire, efficacité des web services, identification des raisons de plantage…”

Susciter des vocations

La plate-forme servira donc à la fois aux développeurs de Tapptic, à ses clients qui pourront la solliciter en mode services et à des “crowdtesters”. Parmi eux, Christophe Chatillon espère intéresser des jeunes chercheurs d’emploi en manque de qualification.

Il estime en effet que la plate-forme pourra être un intéressant instrument de découverte et d’apprentissage pour des personnes en quête d’emploi, sous-qualifiées par rapport aux exigences qu’imposent les start-ups, entreprises ou agences de développement. “A Bruxelles, 40% des jeunes de moins de 25 ans ne sont pas embauchés par manque de compétences hi-tech. La plate-forme TaaS pourrait leur mettre le pied à l’étrier. Ils pourraient ainsi apprendre à tester, se découvrir une vocation, décider de se lancer dans une formation en bonne et due forme.”

Pas question évidemment de laisser faire n’importe quoi à ces testeurs amateurs. “La plate-forme sera conçue de telle sorte à surveiller, évaluer et noter la manière dont ils procèdent. Elle fera tester les mêmes codes par plusieurs testeurs. Cela permettra de détecter ceux qui passent à côté d’un bug. Ce sera en quelque sorte du crowdtesting encadré…”