Baromètre AWT: comment vont les “TIC” en Wallonie?

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Par · 27/06/2014

Comme chaque année, l’AWT a procédé à son petit diagnostic de l’état de l’informatisation et de la numérisation des entreprises et autres acteurs wallons. Cette année, le projecteur s’est braqué vers les citoyens, les entreprises, le monde de l’e-commerce et le secteur du tourisme.

Pas de grosses surprises, de pic d’adoption spectaculaire de l’une ou l’autre technologie ou solution (à l’exception peut-être des tablettes tactiles). L’informatisation des entreprises se poursuit, très (trop?) progressivement mais certains signaux sont toutefois encourageants.

Par contre, il reste pas mal de points noirs ou en demi-teintes:

  • un manque de précaution affiché par le consommateur lambda lorsqu’il effectue des achats en-ligne
  • un e-commerce qui ne décolle pas vraiment
  • une trop faible proportion de sites Internet d’entreprise optimisés pour les besoins des internautes mobiles
  • des chefs d’entreprise qui n’ont pas encore suffisamment intégré une réflexion sur l’IT et le numérique dans leur stratégie commerciale ou opérationnelle
  • un back-office encore trop peu intégré avec les sites de vente sur Internet

– une fracture numérique qui continue de frapper certaines tranches socio-économiques (personnes âgées, sous-diplômées, au chômage)

Commençons ce tour d’horizon par les entreprises (nous vous livrons les autres analyses de l’AWT – e-commerce et citoyens – au début de la semaine prochaine).

Entreprises: che va piano…

Premier signal positif: l’AWT relève une nette progression des connexions mobiles à Internet. Toutes catégories d’entreprises confondues (de la plus petite à la plus grande), le taux de pénétration est désormais de 32% contre 29% un an plus tôt et 19% en 2011. On parle bien ici de connexions mobiles, les scores de connexions Internet, câblée comprises, étant évidemment beaucoup plus élevés (87% en 2013, en progrès de 4%). “Le fait que ce taux continue de progresser est le signe d’une intensification des usages”, commente Hélène Raimond, économiste et experte PME à l’AWT.

De grandes différences subsistent par contre selon que l’on parle de petites ou grandes entreprises. Voyez plutôt:

  • connexions Internet
    • TPE: 86%
    • PME: 96%
    • grandes entreprises: 100%
  • connexions Internet mobiles
    • TPE: 31%
    • PME: 41%
    • grandes entreprises: 82%

83% des connexions Internet sont de type ADSL. La fibre optique est rare (2%) et réservée “aux plus grandes structures”. A noter encore que 4% des entreprises se contentent encore d’une ligne RNIS bas débit.

14% des entreprises ne disposent que d’une connexion mobile à Internet et, de manière caractéristique, il s’agit toutes de TPE, selon l’étude AWT.

Une gestion quotidienne davantage informatisée

La progression est aussi au rendez-vous du côté de l’équipement en progiciels:

  • ERP: 11% contre 6% un an plus tôt (toutes catégories d’entreprises confondues)
  • CRM: 11% contre 7%
  • SCM: 10% contre 7%
  • EDI: 6%, quasi stable par rapport aux 6% de 2012.

En matière d’ERP, la progression est la plus forte du côté des PME: 38% au lieu de 12%. Ce sont les TPE qui continuent de plomber les résultats, même s’il y a aussi une amélioration dans cette catégorie (taux de pénétration de 9% contre 3% un an auparavant).

Du côté des CRM, ce sont par contre les grandes entreprises qui ont donné le coup de collier le plus marqué (taux de pénétration de 41% contre 26% un an auparavant).

Le SaaS explique, en partie, ce regain d’intérêt: 11% des solutions CRM sont “consommées” de cette manière, contre 8% des logiciels ERP.

Mais il reste clairement une marge de progression pour confier davantage de données, d’applications et de fonctions au cloud. “66% des entreprises disent faire appel à au moins une application SaaS, mais il s’agit encore surtout de solutions de messagerie et de bureautique (59%) ou de simple stockage de données dans le cloud (13%)”, souligne Hélène Raimond. “Il reste toutefois une importante marge de progression.”

Surtout du côté des connexions mobiles, compte tenu notamment des progressions de vente: + 15% pour les smartphones et + 70% pour les tablettes, à l’échelle nationale, pour 2013. Et c’est là que l’on relève un premier point noir – ou mauvaise note côté wallon: l’essor du mobile est encore insuffisamment pris en compte par les gestionnaires et développeurs de sites Internet.

33% des entreprises wallonnes disposent désormais d’un site Internet (“ce qui nous classe dans la partie supérieure du classement européen”) mais seulement 5% sont “adaptés” à un usage via appareils mobiles. Et encore le mode d’adaptation est-il variable: si 13% des sites ont prévu quelques adaptations (du genre responsive design), un développement spécifiquement optimisé pour tablettes ou smartphones ne concerne que 3% des sites Web d’entreprises wallonnes.

A notre aussi au passage que le score (global) de 33% ne représente qu’une maigre progression de 1% par rapport l’année antérieure et qu’elle est due aux grandes entreprises et PME. Leur taux d’équipement est désormais de 68%.

Un usage Internet qui progresse en valeur

L’AWT relève par ailleurs “une réelle progression” d’usages plus sophistiqués d’Internet par les entreprises. Du genre facturation électronique, archivage dans le cloud, déclarations officielles, vidéoconférences… Mais cela reste largement l’apanage, malgré tout, des grandes structures.

Tous les chiffres du tableau ci-dessous sont exprimés en pourcentage.

Usages TPE PME Grandes entreprises Moyenne 2013
recherche d’informations 79 91 95 80
opérations bancaires 73 82 86 74
déclarations officielles (DIMONA, ISOC, TVA…) 46 72 83 47
réception de factures électroniques 48 64 46 49
envoi de factures électroniques 32 34 24 32
téléphonie (Skype, Google Talk…) 23 21 26 23
réponses à offres de marchés publics 20 31 46 21
formations à distance 18 17 48 18
vidéoconférence 13 13 36 13

Terminons cette flopée de chiffres par un constat étonnant: 10% des entreprises wallonnes ne disposent encore d’aucun ordinateur. Ce qui, dans une certaine mesure, s’explique par le profil de ces “no pasaran”: essentiellement des indépendants et TPE dans des secteurs pas forcément avides d’information. Il n’empêche que ces exploitants agricoles, petites surfaces de commerce ou encore cafés-restaurants y gagneraient sans doute à se mettre à niveau.

En attendant le futur gouvernement…

Agence conseil pour le gouvernement wallon en matière ICT et numérique, l’AWT (qui se muera bientôt en “AWTIC”, filiale de la future Agence de l’Entreprise et de l’Innovation) envoie quelques petits messages et “recommandations” à la future majorité régionale.

Hélène Raimond: “Pouvoirs publics et fédérations sectorielles doivent identifier à la fois les besoins et des actions transversales au service des petites structures.”

Pour les entreprises, l’AWT relève la nécessité d’informer encore davantage les sociétés à propos des avantages qu’elles peuvent retirer d’une informatisation. “Il faut susciter des partenariats sectoriels en matière d’échanges d’expériences et de mise en commun des besoins ICT des PME.” Et ce, afin notamment de “créer du côté de la demande une masse critique à laquelle l’offre ICT [des acteurs du marché] est susceptible de répondre adéquatement.”

“Les TPE et PME n’ont pas les moyens de procéder elles-mêmes à une analyse de leurs besoins. C’est là une tâche qui incombe au secteur public et aux fédérations sectorielles. Il est essentiel de voir se constituer des “grappes” d’entreprises, de favoriser les échanges de bonnes pratiques”, insiste Hélène Raimond. “Pouvoirs publics et fédérations sectorielles doivent prendre en charge cette veille, ainsi que l’analyse et la mutualisation des besoins ICT par secteur, et identifier des actions transversales au service des petites structures.”

L’AWT retape par ailleurs sur un clou déjà enfoncé l’année dernière: il faut informer et former davantage les chefs d’entreprises “en particulier les indépendants et les plus de 45 ans” (tranche d’âge qui représente 60% du total des patrons).

Face à l’IT, cette génération a “souvent un réflexe utilitaire, voire commercial. Elle n’en conceptualise pas les avantages en termes de stratégie et d’interaction avec la clientèle, comme le fait la nouvelle génération. Cette dernière est nettement plus encline à externaliser par exemple le stockage de données ou les logiciels afin de réduire les coûts. La majorité des chefs d’entreprise de plus de 45 ans n’ont pas acquis ce réflexe.” Que ce soit au cours de leurs études ou dans la vie active…

Prochains volets de l’étude Baromètre de l’AWT: les usages ICT par les citoyens et l’adoption de l’e-commerce. A lire en début de semaine prochaine.