Plate-forme Big Data: mise en commun de compétences et de projets

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Par · 03/06/2014

Telle qu’imaginée, la “Plate-forme” Big data qui se prépare en Wallonie est une plate-forme d’innovation technologique, devant favoriser et concrétiser innovations et implémentations “de rupture”.

Orientée vers le domaine du “big data” dans un premier temps, elle pourrait – devra? – élargir son champ d’action à d’autres thématiques à plus long terme.

Sa mission est de mettre les compétences croisées, complémentaires, de ses membres (mais aussi d’acteurs extérieurs) au service de tous les acteurs économiques régionaux.

“Elle s’inscrit aussi dans une philosophie de maîtrise de l’information économique globale, si importante pour la Région. Son but est de créer de la valeur ajoutée, globalement, pour la Wallonie: sociétés de toutes tailles, pôles de compétitivité, secteurs d’activités, mais aussi pouvoirs locaux et la population elle-même”, déclare par exemple Pierre-Paul Fares, responsable de l’unité Business Intelligence & Advanced Analytics de NRB.

Premiers bénéficiaires: les Pôles de compétitivité et leurs membres. Mais cette “infrastructure partagée sera ouverte à tous les acteurs”, qu’ils soient membres ou non de la Plate-forme, soulignent ses initiateurs. Parmi ces derniers, le CETIC et l’Infopole Cluster TIC.

NRB devrait en être le “vaisseau amiral”. Le “noyau dur”, avec permanence dans le temps et participation à l’actionnariat, devrait quant à lui inclure, outre NRB, quelques sociétés (telles que Pepite, CBlue ou NextLab – tous noms encore à confirmer). Sans oublier le rôle qu’y joueront les centres de recherche et les universités.

Fil rouge: faire circuler les compétences

Les projets mis en oeuvre adopteront le modèle PIT (partenariat d’innovation technologique), mobilisant au minimum deux entreprises (dont une PME) et deux organismes de recherche (universités, hautes écoles, centres de recherche agréés). Le principe des PIT est de faire une place la plus large possible aux besoins concrets des industriels tout en favorisant les transferts (compétences, technologies) entre chercheurs, académiques et entreprises. Avec aussi pour objectif d’accélérer ces transferts, en particulier à destination des PME et TPE pour qui la réactivité est souvent vitale.

Les projets permettront de financer le volet recherche pure. Les plus importants (et, de toute façon, les premiers qui seront lancés) seront menés au bénéfice des Pôles de compétitivité et de leurs membres. D’autres projets de recherche, plus spécifiques et de moindre envergure, s’adresseront potentiellement à d’autres acteurs. Dans un premier temps, la Plate-forme sera financée (en tout ou en partie? la chose reste à déterminer) par la Région mais dans un but d’auto-suffisance à terme.

Objectifs: accélérer la mise sur le marché de nouveaux produits, services ou procédés innovants par des sociétés locales venant de tous horizons, et de toutes tailles, profiter des synergies (combinaison de compétences complémentaires) afin d’éviter aux bénéficiaires de chaque fois devoir réinventer la roue, investir eux-mêmes dans des infrastructures et compétences qu’ils peuvent trouver auprès d’autres sociétés ou organismes. Rendre technologies, innovation et “outils” accessibles à tous, PME comprises.

Le principe de base est donc bien celui de la mutualisation (ressources, infrastructures, outils, services et compétences)

Services proposés potentiels: étude d’opportunité, analyse des besoins, conseils sur les outils à mettre en oeuvre, mise à disposition de capacités de stockage, exploitation/exploration/fouille de données via sollicitation de l’infrastructure de big data en mode “service”, service d’analyse et de reporting…

Les membres (fondateurs ou non) contribueront chacun selon leurs expertises respectives. Par exemple, infrastructure et services de stockage pour NRB, structuration de projets et potentiel analytique pour Pepite…

Tout ce scénario doit encore se concrétiser. On ignore encore à l’heure actuelle quelle forme exacte prendront à la fois la plate-forme (en termes de structure juridique) et les collaborations qu’elle devrait permettre de susciter entre les différents acteurs, qu’ils soient parties prenantes directes ou clients sporadiques.

Mutualiser pour doper les moyens

Dans bien des scénarios et domaines d’implémentation, les PME n’ont ni besoin ni les moyens de déployer une infrastructure surdimensionnée ainsi que la panoplie d’outils que suppose le big data. La plate-forme sera là pour leur procurer, à la demande et à leur échelle, les ressources – technologiques et humaines – dont elles peuvent avoir besoin pour une analyse pertinente et efficace des méga-données. Pierre-Paul Fares de NRB prend deux exemples.

“Le big data s’insinue partout, jusque dans le secteur agricole. Placer des capteurs dans les champs permet d’identifier les zones de culture, les endroits nécessitant un apport d’engrais et, dès lors, d’optimiser les épandages. Il est ainsi possible de faire diminuer les concentrations d’engrais de 25 ou 30%.” Mais bien entendu, le bénéfice est plus particulièrement au rendez-vous sur de grandes parcelles ou pour des exploitations de grande envergure. On voit mal les petits exploitants investir dans des capteurs ou dans des drones surveillant leurs cultures. “Mutualiser l’équipement, la collecte et l’analyse de données a dès lors tout son sens.”

Autre exemple: l’intelligence urbaine (ce qu’on appelle généralement la “smart city”). Les termes “urbain” et “city” sont d’ailleurs réducteurs dans la mesure où toute municipalité, aussi modeste soit-elle a, selon lui, intérêt à mieux comprendre les différents flux et phénomènes qui influent sur son attractivité et sur son équilibre économique. “Pour éviter de voir la population [sans oublier les entreprises] fuir certaines communes, il est utile de modéliser l’ensemble des paramètres qui gouvernent ces déplacements et déménagements.”

Exemples? “Un pilotage préventif du phénomène d’encombrement de la circulation” ou encore la modélisation de l’habitat. “Il manque 150.000 logements en Wallonie. Des projets tels ceux réalisés à l’UNamur, qui modélisent, simulent les trajets quotidiens de tous les Belges, qui visualisent la concentration routière, donnent une bonne base pour croiser ces données avec d’autres informations  (chiffres des naissances, décès, déplacements de population, de l’émigration…) afin d’identifier là où créer de nouveaux pôles d’habitat, construire de nouvelles zones commerciales ou maisons de repos… La problématique de chaque commune a tout intérêt à être abordée via une philosophie de supra-communalité, de communauté urbaine, de bassins de vie.”

Dans ce registre, “le rôle de la plate-forme mutualisée sera par exemple de mettre à disposition des outils de visualisation et de traitement, des modèles, des algorithmes, de faire se partager l’information… A quelques variantes près, dues aux spécificités socio-économiques de chaque commune, les tableaux de bord prospectifs sont transposables.” Voir par ailleurs l’article de ce dossier consacré à quelques problématiques et réalisations urbaines de type Smart Cities.

Les pouvoirs locaux peuvent également tirer parti d’une mutualisation des ressources d’analyse big data “pour croiser toutes les données économiques qui les intéressent avec leurs plans triennaux. La 6ème Réforme de l’Etat va accroître non seulement les charges financières qui pèsent sur eux mais aussi augmenter le nombre de données à traiter.” Raisons supplémentaires, à ses yeux, d’apprendre à maîtriser les chiffres et données. “Vu sous cet angle, la Plate-forme Big Data sera source de services à la communauté.”