LeanFund: fonds d’investissement “pre-seed”

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Par · 18/02/2014

Une quinzaine d’investisseurs privés et à terme quasi autant d’entrepreneurs ayant endossé la casquette de “coachs” pour start-ups ont décidé de créer LeanFund, un nouveau fonds d’investissement spécifiquement destinés aux start-ups innovantes (tous secteurs confondus) (1) afin de leur fournir ces capitaux d’amorçage dont elles ont besoin pour franchir la toute première étape de leur existence. En attendant de pouvoir convaincre quelques gros poissons financiers…

Dur, dur, en effet d’attirer des capitaux, de susciter la confiance auprès d’investisseurs, privés ou publics, quand on sort tout juste d’un programme d’incubation de start-up. Même lorsqu’il se donne le nom d’accélérateur. “On s’est rendu compte que les starters qui passaient par exemple par Nest’Up mettaient beaucoup de temps – 9 mois, un an – avant de trouver de premiers investisseurs”, souligne Benoît Lips, l’un des initiateurs de LeanFund. Et encore, ce n’est le cas que pour les plus “chanceuses”. “D’autres s’épuisent littéralement à faire le tour des banques, business angels, invests, fonds d’investissements pour, à chaque fois, se voir opposer la même réponse: votre projet est intéressant mais repasser plus tard lorsque vous aurez fait du chiffre ou que d’autres investisseurs seront montés à bord…”

Dur, dur de convaincre et de séduire quand – comme il le dit en grossissant un peu le trait – on a tout juste une présentation Powerpoint à proposer en réponse à des questions d’investisseurs potentiels qui veulent des chiffres et estimations de croissance, de clientèle…

Boucher le trou

LeanFund a réuni, pour son premier tour de table entre fondateurs, deux millions d’euros. La majorité des fonds est apportée par ceux qui se contentent d’être des investisseurs – dans l’ensemble des entrepreneurs chevronnés. Parmi eux, on retrouve notamment les noms d’Henri Fischgrund (Axisparc), Charle Caprasse 5weeFry, WiMesh), Myriam Malou (Informatic Services IS) ou encore Claude Mauren (professionnel de la gestion d’investissement). Tous misent environ la même chose.

Benoît Lips: “les projets sortant de programmes d’accompagnement s’épuisent trop à trouver leurs premiers fonds…”

A leurs côtés, on retrouve donc aussi des coachs – dont Benoît Lips (ex-DAD, LBi), Toon Vanagt (Data.be, Klusveiling.nl), Philippe Lemmens (ex-Apple et Belgacom, Edge Consulting), Edouard Seynave (Wepika), Quentin Verhaege (Djengo/Djump) – qui y vont aussi de leur poche (à hauteur, chacun, de 10 à 15.000 euros) mais dont la contribution se concrétisera surtout en termes de conseils et d’encadrement.

Environ 50% des coachs déjà embrigadés opèrent pour Nest’Up. “Le pool de coaches n’a volontairement pas encore été complété”, souligne Benoît Lips, “parce que nous voulions rester ouverts à d’autres candidatures possibles après l’annonce du lancement du Fonds.”

Tous – business angels ou coachs – entrent à égalité de voix dans le Fonds. Autrement dit, les décisions d’investissement et les futures sorties se décideront à parité.

A noter que la Province de Brabant wallon pourrait rejoindre le Fonds, à hauteur de la participation d’un investisseur privé. Les contacts sont en cours mais non encore finalisés.

Deux niveaux d’investissement sont prévus:

  • 30.000 euros pour les projets et start-ups sortant tout juste de programme d’accompagnement, d’incubation ou d’accélération; à raison de “5 à 7 start-ups” financées par an;
  • 100.000 euros (sans doute 2 ou 3 mises de fonds de ce genre par an) pour des projets déjà plus mûrs et plus évolués mais se situant toujours dans cette période “pre-seed” (amorçage).

L’objectif est donc de “boucher le trou” – entre les capitaux propres de départ et l’arrivée à bord de financiers plus classiques – qu’il s’agisse de banque, de fonds d’investissements ou d’invests publiques.

Le Fonds a été créé pour une durée de 10 ans. Il n’y a pas réellement de règle pour ce qui est de la durée pendant laquelle le Fonds compte rester à bord des start-ups financées. “En moyenne sans doute 5 ans”, estime Benoît Lisp.

L’idée est donc de “porter” un projet jusqu’à ce qu’il ait atteint une maturité et les galons (chiffrés) nécessaires pour inspirer confiance à de plus gros investisseurs. “Notre intervention – en ce compris en conseils – devra permettre de valider le plus possible les projets. Et pourquoi pas de pousser d’autres acteurs à co-investir ou à s’engager dans le tour suivant de financement.” Les responsables de LeanFund cite en exemple des noms tels que St’Art, MeusInvest, Volta Ventures “ou même quelques fonds français qui se sont dit intéressés par notre démarche.”

Des fonds… et des conseils

Le rôle de “valideur” et de “bouche-trou” que veut jouer LeanFund ne se limite pas au seul manque de capitaux. Il y a aussi des besoins en compétences et connaissances que les incubés sont loin d’avoir assouvis une fois qu’il en ont fini avec leur programme d’accompagnement (Nest’Up, BoostCamp ou autre).

Voilà pourquoi le LeanFund se double d’un “LeanReactor”, une filiale à part entière du Fonds qui consiste en un programme de coaching personnalisé, avec interventions du pool de coachs qui se sont engagés dans le fonds.

Et cet accompagnement par le “Reactor” sera obligatoire pour toute start-up bénéficiant de financements du LeanFund. Pendant 9 mois, ils seront suivis par un ou plusieurs coachs (selon la spécificité de leurs besoins). Objectif: “valider les opportunités de marché, proposer des services d’aide à l’entrepreneuriat, amener les porteurs de projets à se rencontrer et à échanger un maximum d’expériences avec des homologues.” Mais aussi accompagner les start-ups sur le terrain dans leurs démarches.

Exemples concrets pour les deux start-ups qui ont déjà bénéficié d’une mise de fonds (DoEat et ShareBox): “nous avons aidé DoEat à trouver des distributeurs à l’étranger. Notamment aux Pays-Bas. Pour ShareBox, nous avons négocié avec eux les droits télé [Rtbf] pour la série transmédia 1001 Belges.”

Les formes que prendra l’accompagnement sont encore en phase d’expérimentation mais l’un des fils conducteurs sera la méthode “lean”. En l’occurrence, des itérations courtes: un cycle mensuel pour tester les hypothèses opérationnelles (commerciales, stratégiques ou autres), avec, entre-temps, des réunions hebdomadaires entre starters et coachs.

Appels à projets

Pour marquer son lancement, le fonds d’investissement lance un appel à projets “Power3”. A la clé: trois chèques de 50.000 euros (ou, plus exactement, trois prêts convertibles – ce n’est pas tout-à-fait la même chose), qui iront à trois start-ups pouvant présenter un projet tenant la route, portés chacun par une “vraie” équipe de trois personnes. Ils bénéficieront de l’accompagnement de 3 coachs du LeanReactor pendant 3 trimestres. Les candidatures doivent être déposées sur le site (encore partiellement en construction) du Fonds.

(1) Par “start-up innovante”, les initiateurs du Fonds entendent toute jeune pousse qui fait preuve d’innovation: que ce soit par les produits ou services proposés, par sa démarche commerciale ou ses procédés de production, par exemple. [ Retour au texte ]