Mission économique: entre découvertes et déconvenues

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Par · 28/06/2013

Ils furent nombreux parmi les participants à apprécier tout particulièrement le programme de visites ciblées concocté par l’AWT et l’ABE.

Des visites de “majors” perçues comme trop formatées…

Pour beaucoup, le menu du programme officiel, qui comportait des visites chez HP, Cisco ou encore Google était certes attrayant sur papier mais a pêché par un “formatage” un peu trop rigoriste et un menu qui laissait sur sa faim.

En cause, notamment des exposés trop vagues, trop “standard” de la part des sociétés visitées. Ou encore le fait que débarquer à 100 ou plus dans une société n’est pas fait pour créer une proximité et permettre une information ciblée ou personnalisée.

“Avec 300 personnes, cela devient vite impersonnel”, déclare par exemple David Boulanger, directeur de Now.be. “Les présentations des grandes sociétés sont restées trop généralistes, trop commerciales”, confirme Vincent Keunen, directeur de Manex.

La même critique a également été exprimée pour les rencontres prévues avec les venture capitalists.

Merci à la mission “parallèle” 

Le programme plus personnalisé préparé par l’AWT et l’ABE avait prévu ce piège. Résultat: même lorsqu’une visite était inscrite au programme officiel et impliquait donc l’armada de participants belges, des “apartés” avaient été concoctés par l’ABE et l’AWT. Ainsi, lors de la visite de Google, certains participants francophones ont eu l’occasion de rencontrer en petit comité le patron du projet Chrome (navigateur et OS). “Très intéressant”, estime Jacques Gripekoven, patron d’Eyepea.

L’objectif de la “mission parallèle” préparée par l’AWT et l’ABE était de faire découvrir de petites sociétés, encore méconnues chez nous, mais qui sont actives dans des domaines qui font le buzz.

Deux perles…

C’est ainsi que la société Total Immersion avait été portée au programme.

Créée en 1993, cette société née en France s’est implantée à Los Angeles et s’est spécialisée dans les solutions de réalité augmentée. Objectif de la visite: “explorer de visu la manière dont la réalité augmentée est d’ores et déjà appréhendée par certains acteurs et peut ouvrir de nouveaux horizons. “Correctement implémentée, la réalité augmentée (RA) peut générer beaucoup de valeur ajoutée et est bien plus qu’un gadget”, souligne par exemple Juan Bossicard (ABE). “Elle peut être un excellent complément à l’impression 3D. Une fois le modèle réalisé, la RA permet de le visionner en situation afin de passer au stade de la production.”

Même si, ajoute-t-il, “cette technologie demeure difficile d’accès en raison des multiples ressources de traitement et compétences qu’elle exige pour être maîtrisée. Mais, en soi, cela s’appelle aussi une opportunité pour quiconque veut s’y lancer.”

C’est par contre une technologie encore très onéreuse qui, telle qu’implémentée par Total Immersion, ne convient pas encore à certaines applications. Comme celles d’e-learning qui intéressaient plus particulièrement David Boulanger de Now.be.

Autre visite décoiffante, aux yeux de certains: Semantic Research, éditeur d’une solution de recherche sémantique “qui permet d’associer des objets et leur relations et de les mapper selon une série de critères”, explique Jacques Gripekoven, directeur d’Eyepea. “Il s’agit en fait de puiser de l’information dans une série de sources publiques (comme Google, LinkedIn, Facebook…) mais aussi privées (comme des bases de données de la Défense, du fisc…), de construire les relations entre différents objets (personnes, actions, lieus, temps…), de mapper tout cela selon un template prédéfini et de sortir des rapports.

Il est clair que le client numéro 1 de Semantic Research est la Défense américaine. Le 11 septembre les a propulsé au sein de l’armée, qui utilise leur logiciel afin d’analyser des données et d’en tirer des informations stratégiques.

Ils ont aussi des clients comme le Fisc américain à qui ils permettent de corréler les déclarations fiscales avec des éléments de train de vie et d’en sortir ce qui semble ne pas correspondre.”

… et un caillou

Par contre, les visites en délégation générale des sociétés HP, Cisco, Microsoft ou Google ont laissé nombre de participants sur leur faim. Trop convenu, dans l’ensemble. “Trop classique, trop formaté. Chez Microsoft, les réponses n’étaient pas claires. Chez Google, ils se sont largement limités à nous parler de Google+. Léger… Surtout que, quelques jours plus tard, ils lançaient le Google Loon [ces ballons à haute altitude destinés à opérer en réseau pour diffuser du W-Fi dans des zones reculées ou peu équipées en connectivité classique]. Ils n’en ont rien dit. Incompréhensible. A quelques heures près, leur silence ne peut s’expliquer par des raisons de secret…”, déplore David Boulanger (Now.be).

Même constat pour Stéphane De Biolley, directeur commercial de Freedelity: “Les visites en grosse délégation, telle celle qui était organisée chez Google, sont très formatées” et n’apportent donc guère de choses, en finale. “Je préfère- et de loin- les visites de petites start-ups, qui permettent de côtoyer, chez eux, tous ces jeunes qui se décarcassent.” Coup de chapeau, au passage aux organisateurs (ABE et AWT). “Sans un Carmelo Zaccone, par exemple, le voyage aurait été 50% moins intéressant.”

Perdus dans la masse

David Boulanger (Now.be): “L’aura de la mission princière qui ouvre bien des portes.”

L’un des regrets le plus exprimé est bel et bien l’impossibilité à avoir pu nouer des contacts plus directs, particuliers, avec les sociétés visitées. “L’AWEX peut faire une différence pour aider une entreprise belge mais cela demande une approche dossier par dossier.” Autre commentaire encore: “L’AWEX et le FIT (Flanders Investiment and Trade) ont été victimes du succès de la mission en nombre de participants et n’ont pu organiser les one-to-one attendus par différents participants. Ceux qui avaient préparé eux-mêmes la mission étaient par contre satisfaits de leurs contacts.”

Ce fut par exemple le cas pour David Boulanger. “Contrairement à une mission antérieure pour laquelle j’étais parti sans préparation, la fleur au fusil, j’avais pointé plusieurs cibles. Que ce soit des relais ou des leaders d’opinions dans le monde académique ou de l’e-learning. J’ai pu les rencontrer sans difficultés, grâce notamment à l’aura de la mission princière qui ouvre bien des portes.”

Autre regret: un manque de coordination entre l’AWEX ou la FIT, Agoria et le duo AWT-ABE.

Le programme était en outre à ce point chargé qu’il y a eu quelques petits conflits d’agenda. Résultat: certains participants ont dû parfois sacrifier une visite pour participer au programme parallèle (ou vice versa). Ou sacrifier les deux au profit d’un contact qu’ils avaient planifiés eux-mêmes. Question d’orchestration de l’agenda de chacun. Pas simple avec une délégation de plusieurs centaines de personnes…