Pierre De Muelenaere: “je ne crains pas une évaporation d’IRIS”

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Par · 11/02/2013

En septembre dernier, Canon annonçait son intention de prendre intégralement le contrôle d’IRIS (Louvain-la-Neuve), société spécialisée dans la numérisation et la gestion intelligente de documents et de flux de traitements documentaires.

Pierre De Muelenaere (IRIS): “Il n’y a pas de stratégie possible si acquéreur et société rachetée ne travaillent pas au sein d’une même équipe.”

L’OPA, initiée ce 6 février et qui se clôturera le 20 mars, est considérée comme amicale par l’ensemble du comité directeur et du conseil d’administration d’IRIS. Cette dernière considère en effet que le fait d’être versée dans le giron d’un acteur de l’envergure de Canon est propre à lui apporter les moyens nécessaires pour accélérer encore davantage sa pénétration du marché, à l’échelon international, et ses développements technologiques.

Lors de la conférence IRISlink, qui s’est tenue la semaine dernière à Louvain-la-Neuve, Pierre De Muelenaere, fondateur et CEO d’IRIS, redisait sa conviction que l’acquisition, si elle se produit, est porteuse de nouvelles perspectives pour la société: “Canon a clairement des ambitions dans le domaine de la gestion de l’information. Mon but, personnellement, est d’amener la croissance d’IRIS vers un nouveau palier.”

Marc Bory, directeur Solutions Sales & MPS (produits multi-fonctions) chez Canon Europe, confirmait: “Canon a déjà procédé à de semblables acquisitions, axées vers des technologies d’avenir complémentaires. Nos précédentes acquisitions [dont une qui concerne un autre acteur belge] continuent de croître. En matière d’information management, notre volonté est de devenir un leader. Il nous faut donc investir davantage pour ajouter à notre catalogue des solutions qui nous apporteront de nouveaux potentiels. Le rachat d’IRIS est un investissement stratégique, tourné vers l’avenir, pas un investissement capitaliste.”

Le groupe japonais a par ailleurs réaffirmé son intention de faire d’IRIS une filiale autonome, conservant son socle de compétences ainsi que son nom. Lors d’un événement récent, Christophe Limpens, directeur Solution Business Consultancy chez Canon Belux, expliquait en outre que les diverses acquisitions (ou prises de participation majoritaire) de Canon respectent une même philosophie, à savoir “préserver chaque acquisition dans son domaine d’expertise mais en s’assurant que ces différentes entités collaborent et opèrent en synergie”. Pour IRIS, par exemple, cela impliquera sans doute des liens privilégiés non seulement avec OSL (Océ Software Labs) mais aussi avec la société allemande NTware, détenue à 70% par Canon et auteur de la solution UniFlow, et avec l’autrichienne Therefore, spécialisée en gestion documentaire, dans laquelle Canon a pris une participation de 49%.

“Pas de destruction de valeur”

“Je suis conscient que 50% des acquisitions débouchent sur de la destruction de valeur pour la société rachetée”, déclarait encore Pierre De Muelenaere. “Certaines acquisitions sont ridiculement surévaluées, en termes de conditions financières. Le prix qui est mis sur la table ne se justifie pas et on court souvent alors au désastre. Notamment parce que les espérances sont irréalistes. Ce n’est pas le cas de Canon et d’IRIS. L’acquisition est pensée dans une perspective de développement d’activités. Nous collaborons avec succès depuis déjà de nombreuses années. Les complémentarités sont nombreuses. Je ne crains pas une évaporation de ce qui a fait la force d’IRIS. Mais la réussite dépend toujours du plan et de la vision stratégique mise en oeuvre. Et il faut des gens qui y croient…”

Par ailleurs, ajoutait-il, aucune stratégie n’est possible si acquéreur et société rachetée ne collaborent pas au sein d’une équipe unifiée. “Il faut travailler sur le long terme. C’est nécessaire pour le développement des activités et l’innovation.” Voilà pourquoi Pierre De Muelenaere et les dirigeants actuels d’IRIS n’ont pas l’intention de quitter la société, si elle devait devenir une filiale de Canon dans quelques semaines. Autre condition sur laquelle Pierre De Muelenaere insiste pour que l’acquisition soit couronnée de succès: “l’équipe Acquisition de l’acheteur doit travailler étroitement avec les équipes en place.”

Les secrets de la longévité

Interrogé sur les raisons qui, selon lui, ont permis à IRIS de survivre et de rester un acteur en vue, sur le terrain concurrentiel de l’OCR, depuis 25 ans, Pierre De Muelenaere déclarait: “je ne me suis jamais considéré comme un entrepreneur belge, qui limite sa vision au marché local. Dès le départ, j’ai voulu proposer des produits qui puissent se vendre en Asie, aux Etats-Unis… Pourquoi des sociétés sont-elles des entreprises globales? Parce que leur portefeuille est global. Avec les ventes et le marketing qui vont de pair. Il y a, sur le marché, beaucoup de créateurs de produits [OCR] mais beaucoup ne rencontrent pas le succès en matière de conception, de marketing, de positionnement international. Ce qui a fait la différence, c’est notre potentiel de développement technologique et notre envie d’être reconnus comme acteur planétaire.”