De l’animateur multimédia au médiateur numérique

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Par · 18/06/2012

Le profil de la fracture numérique évolue. Celui du rôle joué par les EPN aussi. Alors que l’on s’approche de la reconnaissance du statut d’animateur multimédia et d’une intégration de celui-ci dans les barêmes communaux, le terme même semble ne plus totalement couvrir le faisceau des activités de formateurs et d’accompagnateurs souvent appelés à jouer un rôle de “passeurs numériques”. Le métier a changé.

L’environnement aussi.

C’est le constat opéré lors des Rewics 2012 par Philippe Cazeneuve, sociologue, consultant-formateur: “On est bien face à un nouveau paradigme. A l’origine des EPN, il y a le concept de fracture numérique. Aujourd’hui, la principale disparité dans l’usage des TIC, celle qui diminue le moins, c’est l’âge, avant les disparités culturelles et sociales. A l’époque, l’indicateur de la fracture numérique était la connexion: en France, par exemple, 84% des foyers n’avaient pas accès à Internet. Maintenant, 75% des foyers sont reliés [Ndlr: en Belgique, l’estimation se situe à 77% pour 2012]. Or, le discours des EPN n’a pas changé. On a sacrifié la notion d’accompagnement aux usages à la connectivité”. 

Médiation des usages numériques

Les EPN sont des lieux d’accès public gratuit à Internet dont la principale caractéristique est de proposer un accompagnement gratuit qui s’exercent par le biais de différents services et animations. Eric Blanchard, coordinateur des EPN de Wallonie en donne la définition sur leblog des Espaces Numériques de Wallonie : “En presque 10 ans, les usages en matière de TIC ont considérablement évolué, le public atteint par l’exclusion numérique est aujourd’hui plus difficile à atteindre, si ce n’est par les professionnels de l’action sociale. La réalité de terrain des EPN de Wallonie ne correspond plus, dans sa majorité, que partiellement à cette définition. Etc… Bref, il devenait important de songer à une nouvelle orientation du dispositif des EPN de Wallonie pour que celle-ci colle mieux à la réalité du terrain et pour ancrer davantage ces lieux d’inclusion numérique dans l’avenir.”

C’est pourquoi une nouvelle définition s’imposait. La voici:

“Un espace public numérique est un espace d’apprentissage et de médiation des usages numériques, qui a vocation de favoriser la participation citoyenne de tous à la Société de l’information. L’espace propose des services diversifiés d’accès, de formation et d’accompagnement, adaptés aux besoins de ses publics. Spécialisé ou généraliste, fixe ou mobile, l’espace est intégré à la vie locale et contribue à l’animation numérique de son territoire.”

4 défis

En 2008, le service public fédéral de programmation (SPP) Intégration sociale a commandé à la Fondation Travail Université (FTU) une recherche action dans le cadre du plan d’action national de lutte contre la fracture numérique. Cette étude a permis de rencontrer une quarantaine d’animateurs EPN, francophones et néerlandophones.

Périne Brotcome et Gérard Valenduc: “Face à la diversité des besoins et des projets d’usages des utilisateurs, les EPN proposent une palette élargie d’activités encadrées tant collectivement que dans le cadre de médiations individuelles. La multiplication des initiatives proposées au sein des EPN rend difficile l’identification d’une palette de services propres à ces espaces. Les offres d’accompagnement y sont généralement en évolution et en redéfinition constante.

Périne Brotcorne, Responsable recherche FTU : "La fracture numérique se situe aujourd'hui au niveau des usages : est-on en capacité d'augmenter sa participation dans les différentes sphères de la vie via Internet ?

Leur objectif pédagogique spécifique est l’apprentissage de savoir-faire précis, en lien avec le quotidien des usagers, plutôt que l’enseignement d’un programme complet de formation.

Les formations offrent ainsi des chemins alternatifs d’apprentissage au mode traditionnel d’enseignement, qui privilégie les dimensions informelles et ludiques. Dans certains cas, les EPN, notamment ceux qui s’adressent aux publics les plus démunis, travaillent à l’abaissement des seuils d’accès aux formations TIC, afin de lever les barrières qui entravent l’acquisition d’aptitudes de base nécessaires à l’appropriation des technologies. Objectif: améliorer la situation sociale des individus, leur développement personnel ou leur insertion sur le marché du travail. L’accompagnement des TIC devient alors davantage un moyen d’émancipation qu’une fin en soi.”