Pictyear: retour au papier pour éviter le gaspillage numérique

Portrait
Par · 10/07/2015

Une fois n’est pas coutume, nous vous parlons d’une société qui n’a pas encore beaucoup de liens avec le marché local, si ce n’est quelques financiers de la première heure.

Mais le fait est que Pictyear, jeune société établie près de San Francisco et créée par un trio de Français, est entrée en contact avec la Belgian Trade Commission de San Francisco – “extrêmement efficace” selon le trio de fondateurs et, par son entremise avec l’AdN (lors d’une mission IT Tour). Elle envisage désormais d’ouvrir une antenne chez nous à l’occasion d’un prochain tour de table financier devant intervenir au quatrième trimestre 2015.

Petit appel du pied donc envoyé pour préparer le terrain: “si d’éventuels investisseurs institutionnels ou groupes d’investisseurs belges venaient à entrer dans notre equity, nous envisagerions d’ouvrir une antenne en Belgique, voire plus si les investisseurs en faisaient la demande explicite.”

Pas mort, l’album photo

Le slogan de Pictyear? “Shoot , swipe, print”. En clair, une appli (pour iOS) qui permet de créer et d’imprimer, le plus simplement possible, des albums photo “collaboratifs”.

La start-up veut en quelque sorte réinventer ou redonner ses lettres de noblesse au bon-vieil-album-photos afin que la frénésie, la débauche de clichés ne se résume plus, comme c’est si souvent le cas, par une mise au rebus numérique ou par un encombrement inutile de zettabytes sur des serveurs vaporeux.

Les albums photos dématérialisés, hébergés dans le cloud, ne sont qu’un mirage, estime Pictyear: “80 % des personnes qui commencent un album photo sur un site Web, abandonnent avant même d’avoir terminé.” Voir quelques statistiques en encadré.

La start-up veut donc faire le pari que c’est le manque de facilité qui empêche les gens de rester des collectionneurs actifs.

Des études récentes ont démontré que si le commun des mortels, toutes catégories d’âge confondues (certaines plus que d’autres, évidemment), prend de plus en plus de clichés numériques (sur appareil photo, tablette ou smartphone), la majorité de ces clichés ne sont jamais consultés.

Une étude d’OpinionWay, effectuée cette année pour Fujifilm en France (auprès de 1.050 personnes, âgées de 18 ans et plus), indique que si 90% des Français stockent leurs photos, 47% d’entre eux s’en désintéressent ensuite totalement.

Les albums, surtout imprimés, n’ont plus guère la cote. Selon certains chiffres, les photos ne seraient plus imprimées que dans 10% des cas. Désormais, elles se partagent davantage sur les réseaux sociaux.

Le sondage d’OpinionWay indiquait ainsi que près d’un tiers des Français publient leurs photos en ligne. 26% les impriment et 15% les réunissent dans des livres album.

Chez nous, iVox a sondé un millier de Belges, à la demande de Seagate. Les principaux enseignements?

  • 26,6% des Belges procèdent à une sauvegarde de leurs photos (numériques) de vacances avant de rentrer chez eux; 56% le font après leur retour
  • 53% déclarent que la perte de leurs photos de vacances serait une catastrophe
  • 18,5% veulent en garder une trace imprimée; la catégorie d’âge ne semble pas avoir d’incidence sur le pourcentage; par contre, les femmes sont plus “papier” que les hommes (21,6% contre 15,4%)
  • côté partage de photos, l’album photo reste le moyen privilégié, avec 84,5% des réponses, devant le courriel (82,3%), les clés USB (72,7%) et les médias sociaux (65,5%). Les services cloud arrivent bons derniers.

Pictyear ne veut pas mettre un frein, bien au contraire, à la prise de photos sur smartphone. L’idée est plutôt de surfer sur la vogue des clichés numériques pour permettre de les conserver de manière plus pratique. Un petit geste de balayage à l’écran et les photos se retrouvent dans l’album. Ce dernier devient même participatif si des amis ou connaissances, ayant téléchargé la même appli, s’en mêlent et viennent prêter main forte à sa création. Et pas seulement en y ajoutant des clichés mais aussi en procédant à la mise en page et personnalisation. Exemples de fonctions proposées: modification du format, mise en page, ajout d’un thème ou d’un commentaire en mode légende…

Une fois terminé, quiconque (dans la bande) est intéressé peut commander une version imprimée (une vraie de vrai) et recevoir un exemple de l’oeuvre collective. Autre possibilité (activée en cette mi-juillet): préférer une version électronique, sous forme d’e-album, la partager sur les réseaux sociaux…

Coût d’un album imprimé (par Pictyear): entre 12,90 et 32,90 euros en fonction du format et du nombre de pages (de 21 à 81).

Des prix qui varient peu selon l’endroit où l’on passe commande dans la mesure où Pictyear travaille avec divers partenaires. “Nous avons des imprimeurs en Europe (France, Royaume-Uni), aux Etats-Unis, au Canada et en Australie. Et nous intégrons progressivement d’autres pays ou continents (Asie, Amérique du Sud)…”, explique la société.

Nouvelle version annoncée

Disponible actuellement pour plates-formes mobiles iOS, Pictyear sort en version 2 à la mi-juillet et en profite pour s’adresser également à l’environnement Android.

Parmi les nouvelles fonctions annoncées, citons la compatibilité avec Apple Pay; la possibilité de sélectionner des photos depuis un compte Instagram, Dropbox, Flickr ou Google Photos; un lien marchand inséré sur la page Web de l’e-book qui permettra d’acheter l’album imprimé sans passer par l’appli; une fonction de recherche et d’invitation d’amis pouvant participer à l’élaboration de l’album; la visualisation de celui-ci dès la première photo sélectionnée; ou encore l’intégration d’un indicateur de progression du téléchargement des photos “pour éviter que les utilisateurs quittent l’appli avant que le transfert des photos soit terminé.”

La Californie comme terre natale

D’emblée, le trio de fondateurs – Jérôme Tricault, Emmanuel Sordoillet et Nicolas Moirignot – a décidé d’aller s’établir en Californie (à Sausalito, sur la baie de San Francisco), pour le business mais aussi pour y trouver des fonds. “Nous aurions effectivement pu trouver des fonds en Europe. Néanmoins, nous avons constaté que les contacts décisionnaires concernant notre secteur d’activité sont quasiment tous basés en Californie”. Et de citer les noms bien connus: Google, Facebook, Apple, HP, Spotify, Netflix, Autodesk…

Les investisseurs de la première heure, eux, sont cosmopolites.