La logistique, aspect critique de l’e-commerce

Tribune
Par Damien Jacob · 27/05/2016

Si l’acheteur emporte immédiatement ses achats à la sortie de la caisse d’un magasin physique, en e-commerce par contre, la logistique doit être assurée par le vendeur. L’expédition, le picking, l’emballage… Avec tout ce que cela implique comme “détails” à régler, outils, solutions et services à mettre en oeuvre, responsabilités à assumer.

Un colloque consacré à l’e-logistique, volet essentiel de l’e-commerce, fut l’occasion de lister toute une série de conseils ou de bonnes pratiques à mettre en oeuvre, permettant à un e-commerçant de mettre un maximum de chances de son côté afin de rendre ses processus logistiques les plus efficaces possibles.

La responsabilité repose sur l’e-commerçant

Petit rappel pour commencer: un certain nombre d’obligations légales pèsent sur le vendeur en-ligne:

  • il est responsable jusqu’à prise de possession du bien par l’acheteur (sauf si celui-ci a expressément souhaité un autre transporteur que celui proposé par le vendeur)
  • c’est lui (et non le fabricant) qui doit accorder la garantie légale de 2 ans minimum
  • enfin, il doit permettre au consommateur d’exercer un droit de rétractation (14 jours à dater de la réception), ce qui nécessite de prévoir un flux retour de colis et souvent un reconditionnement d’emballage.

La logistique est un talon d’Achille pour l’e-commerçant

En cas de défaillance, pas question de dire à l’acheteur que c’est la faute du transporteur et qu’il faut s’arranger avec ce dernier. Le vendeur devra résoudre le problème à ses frais, par exemple avec un deuxième envoi ou un remboursement. Bien sûr, le vendeur pourra se retourner vers le transporteur si celui-ci n’a pas effectué la livraison correctement. Mais il apparaît que dans la pratique les transporteurs limitent contractuellement fortement leur responsabilité et les dédommagements.

La logistique se révèle donc être un talon d’Achille pour l’e-commerçant.

Mode de livraison

Le choix du mode de livraison est une exigence croissante de l’acheteur en-ligne. Et l’e-vendeur est bien avisé d’obtempérer. Livraison à domicile, au bureau, retrait chez un tiers servant de point-relais ou dans des consignes automatiques…

De plus en plus, l’acheteur s’attend même à la gratuité de la livraison et à pouvoir choisir le créneau horaire de livraison.

De sérieux défis à relever pour l’e-commerçant… Car, pour lui, la logistique, c’est évidemment livrer, mais aussi stocker et préparer les commandes (opérations regroupées sous le terme de fulfilment) et, plus en amont, rigoureusement gérer l’approvisionnement en provenance des fournisseurs, sans oublier une gestion efficace des retours. Faire un bon choix de fournisseur – souvent plusieurs – est dès lors primordial.

Bien choisir ses prestataires logistiques

Si, évidemment, le prix est un critère fondamental (à négocier en tenant compte que des rabais sont généralement accordés en fonction de seuils de volume annuel d’expédition par pays), les délais maximum de livraison, les créneaux de livraison, la fiabilité (taux de perte), les assurances, et les services annexes comme le tracking ainsi que l’intégration avec la plate-forme d’e-commerce (coordination entre les flux physiques et les flux informationnels), doivent être pris en considération.

Comme le diable se cache souvent dans les détails, l’attention que porte le partenaire logistique au conditionnement, à la sécurité d’acheminement, revêt un caractère essentiel. Selon le type de colis, il peut par exemple s’avérer vital pour l’e-commerçant de trouver un prestataire fiable pouvant gérer des expéditions fragiles, d’investir dans des emballages spécifiques, même plus coûteux, mais aptes à diminuer le taux de casse.

Autre point d’attention majeur: s’adapter aux attentes du consommateur, attentes qui peuvent varier d’un pays à l’autre. Il faut donc veiller à proposer des moyens de livraison qu’attendent les consommateurs des différents pays. Ainsi, le Français apprécie particulièrement la possibilité de retirer son colis dans un “point-relais”, tandis que l’Italien apprécie la “livraison contre remboursement”.

L’internaute souhaitant une option gratuite de livraison, il peut être judicieux de proposer l’alternative du retrait dans le hall de stockage, ou dans des magasins partenaires.

Internaliser ou externaliser la logistique d’un e-shop?

Les frais logistiques se répartissent en moyenne pour environ la moitié pour les coûts d’expédition et l’autre moitié pour le fulfilment. Lorsqu’un certain seuil d’expédition de colis par jour est atteint (la question se pose souvent au delà d’une trentaine de colis/jour), le gérant de l’e-commerce peut difficilement continuer à assurer le fulfilment.

Faire appel à des sous-traitants comme Logvad, SprintPack ou même B-Post Fulfilment peut être judicieux, car ces acteurs peuvent niveler les pointes de travail sur plusieurs contrats.  En outre, vu les volumes qu’ils traitent, ils bénéficient de tarifs d’expédition réduits, ce qui compense en partie le surcoût de la sous-traitance. Certains assurent également l’injection directe des colis dans les réseaux postaux des pays frontaliers. Evidemment Amazon est également à prendre en considération si l’activité est essentiellement tournée hors Belgique.

Autre option: recourir à des espaces de mutualisation de la logistique, comme il en existe par exemple dans la région Nord-Pas-de-Calais en France, où l’on trouve aussi des incubateurs spécialisés pour e-shops, soutenus par les pouvoirs publics.

A noter toutefois que passé le seuil de plusieurs centaines de colis par jour, la balance revient souvent vers l’internalisation (constitution d’une équipe de travailleurs logisticiens internes), économiquement plus intéressante.

Bien gérer les retours et bien communiquer vers le consommateur

Outre un choix avisé des prestataires, il est important d’être bien organisé, en particulier au niveau de la gestion des retours (par exemple avec  un système de bordereau de retour avec code-barres, que le client peut aisément imprimer et apposer sur le colis avant de le déposer à un point-relais ou un bureau de poste).

Il est aussi prudent de se réserver une preuve de livraison pour les paniers conséquents, et de s’abonner au service “reporting de colis posant problème” du prestataire de transport afin de pouvoir proposer d’emblée une alternative à l’acheteur avant même qu’il ne se plaigne.

Mais il est aussi essentiel de bien communiquer vers le consommateur, afin de lever les inquiétudes de ce dernier avant la commande (information sur l’état des stocks, mention des noms des prestataires, garantie du type “délivrée dans les x jours sinon dédommagement accordé”…), lors de la confirmation, ainsi que pendant la période d’attente de la livraison (ex: numéro de tracking) et en cas de rupture de stock, perte de colis, ou autre aléas.

Pour en savoir plus sur le contenu du colloque:

Le colloque était organisé à l’initiative de l’intercommunale IDEA et de l’association “Cap Numérique, avec le soutien du pôle de compétitivité Logistics in Wallonia, du centre Forem Logistique et de la Ville de La Louvière.  [Retour au texte]

Damien Jacob opère comme consultant expert en e-commerce (Retis). Il est en outre chargé de cours et de formation en Belgique et en France.