Chris Anderson, Serial entrepreneur du Desktop Manufacturing

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Par Jean-Luc Manise · 27/11/2013

Chris Anderson inaugurant le Maker’s Lab déployé sur la place Saint-Lambert, c’était le raccourci idéal pour lancer la Semaine de la Créativité. Débarqué de l’aéroport et conduit dans les locaux de l’ID Campus de la Place Saint Denis, l’auteur des célèbres livres “Makers” et “The Long Tail”, reconverti avec succès dans le business des drones domestiques (il est le fondateur de DIY Drones et la patron de 3D Robotics), a pu mesurer sa popularité dans l’auditoire Opera de l’ULg.

Chris Anderson choisit bien ses images pour nous faire entrer dans l’ère de la production industrielle personnelle. En quelque sorte, explique-t-il, nous allons vivre une expérience similaire à celle de la Publication Assistée par Ordinateur. “Vous souvenez-vous de l’époque où les magazines étaient conçus à partir d’environnements fermés, transmis de la tour d’ivoire du graphiste à celle de l’imprimeur? Et puis est apparu l’imprimante laser personnelle et les programmes de Desktop Publishing. Cela a été une révolution. On pouvait prototyper le média sur son écran et le sortir en deux dimensions sur l’imprimante. C’est comme cela que le magazine Wired est né. Nous étions libres de nos mouvements, nous étions maîtres de notre production. C’est cette révolution là que nous allons vivre, en trois dimensions cette fois.”

La fin du hit-parade

La première révolution a été industrielle. La deuxième viendra du Web. On est passé de la force de la démultiplication mécanique à la celle de la puissance créative. Ce “jus de crâne”, comme l’appelle Francis Pisani, nous ouvrira les portes de la révolution Web.

“La date-charnière de ce tournant est pour moi le 21 mars 2000. C’est le jour où le groupe Nsync culmine dans les charts américaines avec son tube “No strings attached”.

“The Long Tail” – le modèle de la longue traîne dans lequel une infinité de petites productions peut toucher un très grand nombre de minorités.

Après, ce sera la dégringolade, la fin des hit-parades. Le Web aura multiplié les canaux de diffusion et les mass médias s’y casseront les dents. Il y aura beaucoup moins de tubes mais beaucoup plus de chansons dans beaucoup plus de médias. C’est le modèle de la longue traîne dans lequel une infinité de petites productions peut toucher un très grand nombre de minorités. “Ce qui nous arrive aujourd’hui avec les “makers”, c’est la combinaison des deux premières révolutions.”

Desktop Manufacturing

Chris Anderson: “Nous allons devenir autant créateur que consommateur.”

“Nous entrons dans l’ère du “Digital Manufacturing” avec une démocratisation accélérée des dispositifs de production et de distribution.” Après le Desktop Publishing, voici donc le Desktop Manufacturing.

“Nous allons devenir autant créateur que consommateur. Regardez ce verre d’eau. Je le photographie avec mon iPad, puis je le retravaille avec une petite application 3D librement téléchargeable sur le Web. Je n’ai plus qu’à l’envoyer dans un labo pour une production en petite série, disons 30 unités. Je les mets en vente sur mon site et le tour est joué. Tous les outils sont là. Il y a les cartes informatiques open source Arduino, les logiciels de conception 3D gratuits d’Autodesk ou les bibliothèques d’objets téléchargeables Thingverse.

Avec les imprimantes 3D MakerBot, les magasins d’auto-fabrication TechLab ou TechShop, les boutiques de composants électroniques en-ligne Sparkfun ou les services de découpe laser et de fabrication numérique à distance, on passe du bit à l’atome. Il existe des imprimantes 3D capables d’imprimer des circuits électroniques en quantité énorme mais il existe aussi des équipements capables d’imprimer en béton un immeuble de plusieurs étages.

Avec la logique participative du Web, on va pouvoir créer des objets de façon collective, un peu à l’image d’un billet wikipédia qui s’écrit à plusieurs mains. Chez Local Motors, on conçoit des voitures collaboratives!”

La première minute de l’ère des Makers

C’est sur ce modèle que Chris Anderson a trouvé son nouveau job. Avec son fiston, il conçoit des drones domestiques via son société 3DRobotics qu’il commercialise sur un site communautaire DIY Drones qu’il destine aux amateurs de robotique aérienne. “DIY Drones, c’est 45.000 membres, 2 millions de pages et 8.000 visiteurs par jour. C’est bien la preuve que quelque chose a changé de manière radicale. La plate-forme DIY Drones marche parce qu’elle permet de concevoir très facilement des robots pour un prix très attractif (.000 dollars au lieu de 10.000 dollars), dans un mode participatif et ouvert: tous les plans publiés le sont sous Creative Commons.

En background, nous proposons à ces passionnés un catalogue de pièces détachées et, s’ils le souhaitent, des drones déjà prêts à voler via notre société 3D Robotics. C’est un modèle business parmi d’autres. Tout reste à inventer. Nous ne sommes qu’à la première minute de l’ère des Makers.” Et, en plus, cela permet de travailler en famille…