Pôle wallon “technologies immersives” HITT: vers un lancement effectif en 2023?

Article
Par · 27/09/2022

Source: Wallimage

N’ayant pas réussi à s’insérer dans la liste des projets et thématiques retenus et (co-)financés dans le cadre du budget 2022 du Plan de Relance wallon et/ou du plan Digital Wallonia, le projet HITT (Human Interaction and Technology Transfer), qui concerne l’exploitation de technologies immersives (AR, VR, XR…) et interactives dans divers secteurs d’activités, vise toujours 2023 pour un lancement effectif.

Nous vous en avions déjà parlé dans un précédent article, pour vous en présenter les grandes lignes et motivations.

Entre-temps, le scénario a légèrement été adapté – histoire de tenir compte des obstacles rencontrés mais aussi se coordonner avec d’autres initiatives naissantes du côté des technologies XR (extended reality) et immersives. Et – et ce n’est pas la moindre des raisons – pour composer avec les impératifs de mise en oeuvre concrète, avec étalement de l’agenda d’action selon un calendrier thématique plus structuré.

Le consortium

Petit rappel rapide.
Parmi les acquis, il y a tout d’abord le fait que l’initiative HITT a bel et bien été retenue et adoubée parmi les 20 IIS (Initiatives d’Innovation Stratégiques) identifiées par la Région wallonne, début 2022.

Le consortium qui s’est constitué pour porter le projet HITT se compose de quatre acteurs: Digital Station (Sambrinvest), l’UMons (via le Click – Creative Innovation Center), l’UCLouvain (via le MIIL- Media Innovation and Intelligibility Lab) et la Rtbf. Pas ou pas encore d’acteurs privés. Les modalités d’inclusion de sociétés – industrielles ou autres, start-ups ou acteurs “historiques” – doivent en effet encore faire l’objet d’une analyse, en fonction notamment des modes de financement qui seront possibles. 

Les activités

L’ambition, pour le consortium HITT, est de devenir l’organe-coupole animant et orchestrant l’écosystème XR/technologies immersives wallon qui, courant 2023, devrait recevoir l’adoubement public définitif sous la forme de l’étendard “DigitalWallonia4XR”.

Rappelons ici que les “secteurs DIS”, ou “domaines d’innovation stratégiques” , identifiés comme tels par la Région sont:
– l’industrie manufacturière (modes de conception et de production agiles)
– la santé (biotech, e-santé, m-health, prévention…)
– l’économie circulaire (matériaux, économie du réemploi, logistique…)
– les systèmes énergétiques et l’habitat durables
– la gestion innovante de l’environnement et des chaînes agro-alimentaires.

L’objectif, tel que le formulent les initiateurs, est donc de “devenir la plate-forme de transfert des technologies immersives et interactives et des compétences numériques pointues liées à ces technologies vers les secteurs industriels prioritaires (DIS) (voir encadré ci-contre), et d’opérer comme un levier d’accélération de la XR au service des Plans de Relance et des territoires”. 

Autrement dit, le but est de réaliser en matière XR ce qui a déjà vu le jour en matière d’intelligence artificielle, avec TrAIL (Trusted AI Labs), et sur le terrain de la cybersécurité, via CyberWal.

La copie ne sera pas forcément 100% conforme – nombre de modalités de fonctionnement et spécificités éventuelles devant encore être précisées – mais, dans l’ensemble, le modèle de fonctionnement et les actions entreprises s’inspireront de ce qui a déjà été mis en oeuvre côté IA et cybersécurité. 

L’un des principes que devrait dès lors appliquer HITT est celui des appels à projet pour identification de cas d’usages et de projets et en vue du développement de prototypes. A la manière de ce qui se fait, en deux étapes, du côté de l’IA avec les mécanismes Start IA et Tremplin IA…

Où en est-on actuellement?

Quand on lui pose la question ou, plus exactement, une série de questions sur les modalités de mise en oeuvre, sur le mode de fonctionnement et la gouvernance de l’initiative HITT, Mathieu Demaré, responsable développement innovant pour le pôle Media & Creative Industries de Sambrinvest, qui en est actuellement la figure de proue, ne peut que formuler la réponse suivante: “plusieurs éléments sont encore en cours de finalisation avec les autorités et nous ne pouvons pas nous avancer de réponse définitive actuellement. Les prochaines semaines seront instructives, notamment du côté de la réponse des jurys IIS (Initiatives d’Innovation Stratégiques) et du côté de la programmation Feder. Ces réponses aideront à définir les secteurs prioritaires. Entre autres choses…”

Voilà qui souligne bien le stade actuel qui est encore celui du souffle que l’on retient. Mais sans pour autant rester inactif…

Les premières démarches de concertation avec les acteurs de terrain (entreprises industrielles, concepteurs de solutions immersives, consultants, chercheurs…) ont en effet été lancées. Ainsi, un premier atelier en mode brainstorming et récolte de désidératas a été organisé, le 20 septembre, dans le cadre de la conférence XR Connect Wallonie.

 

L’ambition et la raison d’être de HITT: “Dynamiser les secteurs économiques stratégiques de la Wallonie en s’appuyant sur les compétences et l’excellence de ses acteurs dans le domaine des technologies immersives et interactives”.

 

Au stade actuel, le quatuor du consortium dit vouloir finaliser la cartographie des acteurs XR existants “qui peuvent potentiellement s’engager dans la réalisation de prototypes destinés aux secteurs pouvant tirer parti des technologies immersives et interactives”.

Les domaines d’action prioritaires

Potentiellement, on l’a vu, la “XR” peut trouver des champs d’applications dans nombre de secteurs économiques – industrie, santé, formation, économie circulaire…

Mais HITT/DW4XR ne chassera pas tous les lièvres en même temps. Telle qu’imaginée jusqu’à présent, l’approche sera itérative. En commençant par une exploration des potentiels et une activation de projets dans le secteur manufacturier. Ce devrait être la thématique-clé au cours du premier semestre 2023. A suivre sans doute par celle de la formation à distance. Mais encore à confirmer…

Une fois ce double travail d’identification de secteurs-cibles et d’acteurs XR, l’étape n° 2 consistera dans le lancement d’appels à projets et la collecte de cas d’usages (industriels dans un premier temps). Et il y a là aussi un gros travail de fond, d’“évangélisation” et de mobilisation à opérer. “Lors de l’édition 2021 de XR Connect Wallonie, on avait clairement identifié comme obstacle le fait que les besoins et l’apport potentiel de la XR étaient encore très mal identifiés au niveau des acteurs de terrain”, rappelle Mathieu Demaré. Nous vous invitons d’ailleurs à relire l’article que nous avions publié dans la foulée de cette conférence XR Connect 2021.

“Le rôle du consortium sera d’évaluer la pertinence et la faisabilité des cas d’usages proposés”, indique Mathieu Demaré. “Des experts académiques évalueront par exemple le degré de maturité des technologies nécessaires à leur mise en oeuvre et les coûts que cela impliquerait. Idem pour la faisabilité et l’utilisabilité par les destinataires potentiels.”

Cette première sélection effectuée, on pourra passer à l’étape “Tremplin” pour la création de proofs of concept. Là aussi, le consortium se profile comme l’acteur pouvant valider le caractère finançable du POC, la capacité de la solution imaginée à trouver preneurs – y compris à l’étranger.

 

Mathieu Demaré (Digital Station / consortium HITT): “Créer un début de masse critique [en XR], en s’alliant éventuellement avec des acteurs flamands tels que XR Valley, afin de peser et d’attirer l’intérêt de l’international.”

 

Le principe de ce cheminement est celui du “test before invest”: “L’industriel [via le mécanisme éventuel de Tremplin XR] aura testé le potentiel de la solution. Une fois cette étape franchie, il pourra investir dans son lancement [voire son industrialisation], que ce soit sur fonds propres ou en en appelant à une aide publique éventuelle, via la DGO6 ou la Sowalfin, par exemple…”

Et d’ajouter: “Nous devons nous inscrire dans une démarche de produits [solutions XR concrètes] qui peuvent s’exporter. On en manque en Wallonie, où les acteurs d’envergure internationale sont rares. L’idée est aussi potentiellement d’aller chercher des acteurs internationaux qui seraient prêts à collaborer avec des acteurs wallons et qui voudraient déployer leur offre chez nous…”

Veiller au terreau

Au-delà de l’identification et de la concrétisation de cas d’usages, l’action du consortium HITT visera d’autres leviers pour la construction et la maturation de l’écosystème XR wallon.

Ainsi le souhait est de désigner, voire de créer, un démonstrateur (lieu d’expérimentation et d’appropriation) pour chacun des secteurs utilisateurs visés (industrie manufacturière, santé…).

Par ailleurs, l’idée est de travailler également sur un axe “innovation et recherche” qui se positionnerait plus en amont sur le cycle de vie d’une technologie, c’est-à-dire davantage en recherche fondamentale. En explorant et développant des technologies de type métavers, 5G, méta-humanisme, nouvelles interfaces interactives… Mais sans pour autant travailler “hors sol”: “il s’agit de tester ces technologies moins matures en environnement réel, d’explorer par exemple la manière de faire collaborer des gens dans un métavers professionnel ou en milieu industriel pharmaceutique…”

Autre gros point d’attention de l’initiative HITT: la formation et les compétences. “Une grosse frustration quand on regarde l’écosystème [XR] wallon est celle du brain drain”, pointe Mathieu Demaré. “Nous disposons d’une belle réserve de compétences, bien formées par exemple par les établissements positionnés dans les jeux vidéo, mais ces compétences partent à l’étranger.”

D’où l’idée d’une XR Academy Wallonia – dossier porté par le centre de compétences TechnoCité (Mons) et la Haute Ecole Condorcet. Un certificat inter-universitaire pour “développeur interactif”, réunissant cinq Hautes Ecoles, est en cours de finalisation. Gestionnaire du dossier: l’Université Ouverte. Le but est d’identifier et d’ouvrir les parcours de formation selon les matières proposées (codage, 3D temps réel, digital marketing…) “pour constituer un canevas complet de formation, en alternance, répondant aux besoins et pour aiguiller les apprenants vers les formations complémentaires qui leur ouvriraient des postes à pourvoir”.