Belgian AI Week: au-delà des aspects purement technologiques, les enjeux multi-facettes de l’IA pour notre pays

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Par · 12/03/2021

Du 15 au 19 mars, à travers tout le pays, une panoplie d’acteurs et d’intervenants – publics, privés, académiques, issus de la société civile – interviendront lors de la Belgian AI Week, une initiative que coordonne le SPF Bosa (Stratégie et Appui), mais qui est surtout le fruit du travail de la “coalition” AI 4 Belgium qui, aujourd’hui, compte quelque 250 membres (entreprises, chercheurs, fournisseurs…).

Caractéristique notoire: il s’agit bel et bien d’une semaine belge, effaçant les traditionnels compartimentages entre fédéral-régions ou entre régions. Nombre de sessions, d’ateliers, de débats feront ainsi intervenir des acteurs venus des différentes régions. Et le soutien politique, lui aussi, gomme cette fois les frontières traditionnelles puisque, parmi les dix ministres ou secrétaires d’Etat – pas moins ! – qui feront une apparition lors des différentes sessions, on en trouve venant du fédéral et des Régions (citons Alexander De Croo, David Clarinval, Thomas Dermine, Willy Borsus, Petra De Sutter, Mathieu Michel…)

Objectif de cette Semaine de l’IA (organisée en virtuel intégral)? Nathanaël Ackerman, coordinateur d’AI 4 Belgium, en épingle quatre.

Tout d’abord, toucher, informer le public, l’amener à participer au débat et répondre à ses questions. L’un des messages prioritaires de la Belgian AI Week est en effet de faire comprendre que “l’IA est bien plus qu’une question de technologies. C’est aussi et avant tout un choix de société”, souligne-t-il. “Il s’agit dès lors d’améliorer l’acceptabilité et de faire comprendre les enjeux. Ce que la Semaine veut démontrer, au travers des différents événements inscrits au programme, c’est que les experts ne sont pas uniquement là pour pousser les technologies mais également pour accompagner les entreprises et les individus dans la transition.”

Deuxième objectif: renforcer les liens et les interactions entre secteur privé, secteur public, monde académique et société civile. “Il s’agit aussi d’exposer tout le potentiel qui existe bel et bien en Belgique. En Belgique, on a trop eu pour habitude de se regarder de manière négative, d’estimer que nous manquions de potentiel. Tout au contraire, la masse de compétences est importante au vu de la dimension du pays.”

Programme complet et inscriptions via le site de la Belgian AI Week.

Ce qui nous amène au troisième objectif: positionner plus clairement la Belgique et ses potentiels en AI sur la carte européenne. “Nous démontrons ainsi que la Belgique est en train de trouver sa place en Europe et dans le cadre du plan coordonné européen d’une IA “de confiance”. Une journée sera plus particulièrement dédiée à la présentation des écosystèmes IA dans plusieurs pays européens (Belgique, France, Luxembourg, Suisse, Danemark, Hongrie…) et à la manière dont une collaboration entre pays européens peut s’instaurer dans le cadre de ce plan coordonné.”

Quatrième objectif: offrir une vitrine multi-publics où les trois Régions du pays puissent venir exposer les initiatives, voire stratégies, définies en matière d’IA. “La Flandre a un plan très structuré et solidement financé. La Wallonie a suivi, allouant notamment un budget en fin d’année dernière. De nombreuses initiatives naissent aussi à Bruxelles, qu’il faudra sans doute encore mieux structurer…”

Découvrir les ressources et initiatives locales

“En soi, l’organisation de la Belgian AI Week est la preuve et le résultat de la mobilisation de l’écosystème belge de l’Intelligence Artificielle. La preuve qu’il grandit et se mobilise de plus en plus.

En organisant cette Semaine, nous avons vu se créer de nouvelles rencontres, de nouvelles collaborations – entre intervenants privés, publics et académiques mais aussi entre régions. Des acteurs ont soudain découvert l’existence d’autres acteurs. Ainsi AI4growth [Ndlr: une communauté d’acteurs IA née en Flandre, composée de fournisseurs, d’entreprises, d’acteurs académiques, et qui se concentre essentiellement sur l’IA pour la santé et les biotech, l’industrie, l’agroalimentaire et les médias et services] s’est aperçue de l’existence du Réseau AI, en Wallonie. A telle enseigne que tous deux ont fait cause commune pour animer conjointement une session.

La richesse des compétences belges se trouve aussi… du côté de la diaspora. A l’occasion de la Belgian AI Week, les organisateurs ont ainsi rameuté plusieurs expats ou personnalités qui, dans le cadre de leurs fonctions et activités, ont au minimum un pied à l’étranger et dont la réputation n’est plus à démontrer. Parmi eux, Patti Maes (MIT Media Lab), Gregory Renard (Brain, Institut SETI), Luc Van Gool (ETH Zurich), Frank Dellaert (Georgia Institute of Technology, Google)…

Pour férus d’IA mais aussi pour le tout-venant

Certes, certaines sessions s’adressent de manière plus spécifique à des professionnels, à des responsables d’entreprise, mais l’intention de la Belgian AI Week est aussi de toucher le “grand public”. Le panel de thématiques, de problématiques et d’enjeux qui seront abordés est en effet large et varié: avenir de l’emploi, questions éthiques, perspectives pour la santé, la gestion de l’énergie, la mobilité, la logistique…

Au rayon plus “sérieux” et techno, citons par exemple des sessions sur le partage des données, le web décentralisé et l’ère du “post-big data”, IA et efficience énergétique, l’intelligence embarquée distribuée au service du monde industriel…

En soirée ou début de soirée, plusieurs débats citoyens seront par ailleurs organisés, abordant des sujets à la fois plus proches des préoccupations quotidiennes. En voici quelques exemples:
lundi 15 mars, à Namur: IA, fantasmes et boule de cristal – l’intelligence artificielle est-elle vraiment intelligente? existe-t-il une législation pour cette technologie? les fantasmes d’aujourd’hui deviendront-ils la réalité de demain?
– pendant ce temps, à l’UMons, débat sur l’IA comme levier potentiel de construction d’une société plus efficace, durable et juste
– et à Gand, une séance cinéma un rien spéciale, avec visionnement de séquences de films avant l’IA comme acteur
– mardi 16: animé par Molengeek, un débat sur les opportunités de l’IA pour l’éducation et l’emploi
– mercredi 17: compétences et emplois seront discutés à Anvers (The Beacon) tandis que l’UMons accueillera notamment la ministre Valérie Glatigny pour aborder l’IA comme vecteur de transformation de l’enseignement.

D’autres thèmes, plus “intrigants”, seront abordés au fil de la semaine: vêtements intelligents, émotions et interactions avec les robots, biais de l’IA envers les femmes…

La Belgique en pointe?

Si la Belgique doit encore, officiellement et en tant qu’entité trans-fédérale, se positionner et annoncer ses orientations stratégiques en matière d’IA, un processus de prise d’initiative à l’échelon supranational est en cours de se formaliser en coulisses et au travers des actions que met en oeuvre le SPF Bosa.

Certains des travaux et des exercices de réflexion des groupes de travail thématiques (santé, secteur public, éthique…) organisés par AI 4 Belgium commencent à accoucher d’outils ou de canevas qui pourraient inspirer et être adoptés par d’autres pays, voire être adoubés par l’Europe. C’est en tout cas l’espoir de Nathanaël Ackerman, qui épingle notamment un outil d’évaluation du caractère éthique d’une solution IA, un outil de cartographie permettant d’évaluer et de placer sur un radar les start-ups et scale-ups IA (en suivant des paramètres autorisant une réelle comparaison à travers l’Europe), un framework permettant d’identifier les applications AI destinées ou utilisées dans le secteur public… 

 

Nathanaël Ackerman (AI4Belgium, BOSA): “La Belgian AI Week se veut une vitrine de ce que la Belgique peut faire. D’autres pays ont déjà salué l’initiative et l’espoir est d’organiser, au printemps 2022, une semaine européenne de l’AI, sous forme d’action commune, avec les mêmes objectifs.”

 

“Nous sommes réellement en train de prendre le lead sur une série de matières. L’espoir est de positionner la Belgique en force de traction, pour impulser la collaboration avec d’autres pays européens. Avec L’Estonie, par exemple, nous sommes en train de prendre le lead dans le cadre d’une Coalition of the willing impliquant plusieurs pays…”