Carte de l’e-commerce belge: est-ce grave, docteur?

Pratique
Par · 05/09/2016

Dans le cadre de ses activités de consultance en e-commerce et e-business, Damien Jacob (Retis) s’est livré à une analyse de la réalité de l’e-commerce en Belgique, s’appuyant pour ce faire sur les données de la Banque-Carrefour des Entreprises (statistiques datant de 2014). Il en résulte un dossier qui passe en revue les implantations – et concentrations géographiques des e-commerçants belges, les statistiques d’emploi, les lieux à plus fort degré d’échec, les opérateurs spécialisés en formations e-commerce…

Combien d’e-commerçants B2C belges?

2.200 dont 1.426 indépendants. Et plus de 95% des e-commerçants ne sont pas des employeurs. Toutefois, ils font appel à des indépendants et prestataires externes, de quoi susciter activités et emplois indirects.

A noter que la BCE ne s’intéresse ici qu’aux commerçants qui ont fait des plates-formes en-ligne leur principal vecteur de vente. La cartographie ainsi dressée ne tient donc pas compte de tous les commerçants, grands ou petits, qui vendent bel et bien en ligne mais dans une proportion minoritaire voire marginale par rapport à leurs activités de vente “physique” traditionnelle. Le “multi-canal” est donc mal documenté… Rappelons aussi que ce chiffre de la BCE est clôturé à fin 2014. Damien Jacob estime que le score se situe sans doute désormais davantage aux alentours des 3.000.

Au chiffre de 2.200, il faut encore rajouter quelque 853 enseignes ou vendeurs étrangers, inscrits à la BCE (une inscription obligatoire à partir d’un total de 30.000 euros de ventes en ligne).

La région la plus e-commerçante?

Sans surprise, il s’agit de la Flandre: plus de deux fois plus d’’e-commerçants répertoriés à la BCE qu’en Wallonie (1.375 contre 627). Chose significative, la Flandre a davantage tiré parti de l’essor de l’e-commerce, qui a connu une augmentation sensible entre 2010 et 2013. Le nombre de (quasi purs) e-commerçants flamands a en effet plus que triplé, pendant cette période, alors que la progression en Wallonie et à Bruxelles était plus modeste.

“Taux d’abandon: de 13% par an. Soit une entreprise sur 8, au lieu d’une entreprise sur 13 pour l’ensemble de l’économie belge. Le secteur est donc sensiblement plus volatile et certainement pas un eldorado.”

Les zones qui concentrent le plus d’e-commerçants? Province d’Anvers, Tournai, Turnhout, Huy. Le plus mauvais score (urbain) en termes de rapport nombre d’e-commerçants/densité de population: Charleroi.

Damien Jacob relève également une faiblesse de l’e-commerce rural – contrairement à ce que connaît la France. Et, par conséquent, une opportunité de (re)dynamisation économique qui n’est pas suffisamment exploitée. Relire à ce propos notre article “Ruralité et numérique” LIEN https://www.regional-it.be/2016/06/15/ruralite-et-numerique-qui-investira-dans-le-tres-haut-debit/

Intensité e-commerce et formation: “Les 2 établissements d’enseignement supérieur qui proposent en Wallonie depuis 2002 un Bachelor en e-business sont justement situés à Tournai – Haute-Ecole Condorcet – et à Seraing – e-business HE de la Province de Liège, près de l’arrondissement de Huy. Soit une bonne adéquation géographique avec la demande potentielle en main-d’oeuvre spécialisée en la matière.”

Problème de longévité?

Si le taux d’échec d’un e-commerce semble encore supérieur à la moyenne d’échec des entreprises, la Wallonie semble être plus fragile que les autres régions du pays en la matière. “La proportion création/radiation est de 1,5 au lieu d’une moyenne de 2 et quasiment exclusivement dans les structures unipersonnelles.”

 

Le dossier complet “Analyse statistique du secteur de l’e-commerce belge” est accessible via ce lien.

 

Damien Jacob ne se risque pas à une explication, se contentant d’appeler à “des actions publiques, dans le cadre du Plan du Numérique, en complément aux aides de consultance, pour aider les entrepreneurs en e-commerce à renforcer leurs activités, compte tenu de la moyenne de longévité trop basse actuellement des entreprises wallonnes en e-commerce.”

Perche est donc tendue à quiconque veut se saisir du sujet pour une analyse plus poussée, objective et par ailleurs nécessaire, des raisons qui expliquent cette plus grande fragilité ou instabilité côté sud du pays.

Pourquoi les efforts consentis par le passé ne se traduisent-ils pas dans les chiffres et la réalité de terrain? Pourquoi tant de projets demeurent-ils si mal ficelés dès le départ? Pourquoi le taux d’abandon est-il si important du côté des indépendants (un phénomène qui n’est pas spécifiquement wallon mais qui y est plus marqué)? Pourquoi aucun e-commerçant n’a-t-il réellement réussi un essor ces dernières années?

Autant de questions qui attendent réponses…

Chiffres partiels, à prendre avec un brin de prudence

L’étude, estime Damien Jacob, a pour avantage de s’appuyer sur des chiffres concrets et non des estimations ou des sondages.

Par contre, ces chiffres ne sont que partiels puisque seul le B2C est pris en compte [or, le B2B pèse sans doute autant dans l’économie belge] et que l’on ne prend en considération que les “entités économiques qui ont principalement une activité de commerce de détail en ligne”.

Qui “ont une activité” ou, plus exactement, qui “déclarent”… En effet, les chiffres sont ceux collationnés par la BCE, sur base des déclarations des commerçants. A charge donc pour eux de cocher la/les bonne(s) case(s) dans la liste des secteurs dont ils doivent se réclamer. Comme le dit Damien Jacob, rien ne dit qu’un commerçant coche, en plus de la case commerçant, la case “click & mortar” ou “commerce en ligne”. “Ce n’est généralement que les sociétés et indépendants opérant dans un secteur autre que le retail qui ont le réflexion de cocher aussi la case “commerce en-ligne”.