Les (ro)bots sont les nouvelles applications

Hors-cadre
Par Menno van Doorn · 05/08/2016

Un nouveau rapport de SogetiLabs consacré à l’intelligence artificielle a eu pour thème “The bot effect, friending your brand”. Conclusion? Les bots et robots sont les nouvelles applications.

L’étude présente les prévisions de l’ère post-appli, caractérisée par l’augmentation des interactions et de la confiance entre l’homme et les machines, mais également par des niveaux de service considérablement plus élevés. Une bataille de micro-moments devrait bientôt développer le commerce conversationnel : dès lors, la possibilité d’avoir un bot manager ou collaborateur n’est plus de la science-fiction.

L’ère post-appli dans laquelle nous entrons se caractérise par la transition des applications vers le mode conversationnel, celle des applications vers les plates-formes de messages et de discussions et celle des magasins d’applications (app stores) vers les magasins de bots. Ces évolutions sont soutenues par la montée en puissance de l’intelligence artificielle. La fin des apps marque le début de l’omniprésence des plates-formes de discussions.

La possibilité d’avoir un bot comme manager ou collaborateur n’est plus de la science-fiction.

Les machines sont aujourd’hui de plus en plus capables de comprendre le langage naturel (voix, parole). Il était autrefois impossible de dialoguer avec elles, sauf bien sûr dans les films de science-fiction. La fiction devient aujourd’hui réalité: grâce aux évolutions du matériel, à la création de nouvelles puces neuromorphiques et à l’avènement du big data, les machines peuvent désormais apprendre et s’améliorer.

Quelques exemples?

  • Mark Zuckerberg, PDG de Facebook, a annoncé le 12 avril dernier qu’il souhaitait fournir l’accès à grande échelle des bots à Facebook Messenger. Selon Zuckerberg, la plate-forme est désormais suffisamment importante pour que se construise un nouvel écosystème autour d’elle. En plus des amis et de la famille, vous pourrez donc converser avec des ‘amis artificiels’. Ces prétendus amis prendront la forme de services offerts par des entreprises.
  • Changer ses réservations sans quitter la fenêtre de discussion.

    La plate-forme chinoise de messagerie WeChat s’était déjà ouverte aux bots. Depuis l’environnement de messagerie WeChat, les Chinois peuvent ainsi payer une facture, transférer de l’argent, commander un taxi ou réserver une table dans un restaurant. 200 millions des 7 milliards de Chinois qui utilisent WeChat disposent ainsi, quotidiennement, d’un bot de paiement numérique.

  • Les clients de KLM peuvent depuis peu raccorder un assistant virtuel à leur Facebook Messenger ou à WeChat. Pratique, car non seulement les billets mais aussi les changements, comme par exemple de hall de départ, sont automatiquement transmis. Jusqu’ici, il fallait pour ce faire utiliser l’application de KLM ou de l’aéroport. Voilà qui illustre bien le potentiel de conversations en mode bot avec les entreprises.  Changer ses réservations sans quitter la fenêtre de discussion. Sans quitter sa fenêtre de discussion, on peut ainsi sans problème changer de siège. Les clients posent des questions avec leurs propres mots et le bot les résout à leurs places. On peut réserver son vol d’une façon simple et rapide tout en discutant avec les amis et la famille.

Des enjeux majeurs

En termes de possibilités, ce changement (la possibilité des machines à apprendre et à s’améliorer) représente un enjeu majeur, aussi bien pour les entreprises cherchant à gagner en efficacité que pour la psychologie de l’être humain. Dans une période marquée par la fin des apps, je prévois l’apparition de quatre phénomènes :

La personnification anthropomorphique de l’IT

Certaines activités autrefois réservées à l’être humain – par exemple, mener une conversation, écouter des arguments ou anticiper des intentions – sont désormais possibles grâce aux nouvelles technologies. Etant donné que les caractéristiques humaines des machines s’améliorent, nous traiterons probablement bientôt les ordinateurs comme de véritables personnes.

“Dialoguer” avec un robot logiciel pouvant satisfaire le moindre désir, même non formulé. Source: Medium.

Les chatbots tels que Little Bing en Chine en sont la preuve. Cette personnification anthropomorphique, comme nous aimons l’appeler, pourrait même avoir des conséquences néfastes sur les conversations entre êtres humains. Lorsque les bots seront à l’écoute en permanence, qu’ils auront plus de connaissances que nous et qu’ils nous rendront toujours service avec le sourire, accepterons-nous encore que des personnes n’expriment pas d’intérêt et ne soient pas aimables? En plaçant la barre très haut, les bots établiront une nouvelle référence.

L’émergence de “l’économie des majordomes”

La possibilité d’engager une conversation avec un robot entraîne l’apparition d’une relation maître/majordome. Dans la plupart des situations, ce domestique toujours prêt à nous servir poliment et discrètement impacte considérablement l’exigence sur la qualité du service. Certaines de nos tâches quotidiennes pourront bientôt être gérées par des robots, ce qui marquera la fin du concept de “recherche” que nous connaissons aujourd’hui: il sera en effet inutile, à l’avenir, de faire appel à Google s’il suffit de poser la question au bot majordome.

Certaines de nos tâches quotidiennes pourront bientôt être gérées par des robots, ce qui marquera la fin du concept de “recherche” que nous connaissons aujourd’hui.

Une bataille de micro-moments

Les conversations font partie de la vie de tous les jours, et dans le commerce conversationnel, une grande partie des activités commerciales s’effectue lors de moments perdus, c’est-à-dire les moments où les utilisateurs éteignent leur smartphone et vaquent à leurs activités quotidiennes.

Ces micro-moments sont essentiels à la stratégie des entreprises, qui pourra également être soutenue par les capacités conversationnelles.

Les bots dans le milieu professionnel

Les principes du commerce conversationnel s’appliquent également au lieu de travail: c’est ce qu’on appelle “l’entreprise conversationnelle”. Il est fort probable que nos prochains collaborateurs ou responsables soient des bots.

Au Japon, l’entreprise de publicité et de marketing McCann vient de désigner son premier directeur créatif en chef (Chief Creative Officer), avec un siège au sein de son conseil d’administration.

Demain, les médecins et les avocats travailleront conjointement avec leurs homologues artificiels. Les agents de centres d’appels sont déjà en train d’être remplacés par des robots.

Menno van Doorn

directeur de recherche SogetiLabs

Le rapport de Sogeti “The bot effect, friending your brand” peut être téléchargé à partir de cette adresse.