Rentrée académique UNamur sous le signe du numérique

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Par · 01/10/2015

Pour sa rentrée académique 2015, l’Université de Namur avait choisi le thème du numérique, à la fois pour redire l’importance qu’occupe cet axe dans son propre ADN (faculté d’informatique, centres de recherche Crids, Precise, Naxys…) mais aussi pour faire passer certains messages à l’heure du Plan Marshall 4.0 et du futur Plan du Numérique wallon.

Message envoyé de manière d’autant plus directe que Paul Magnette, Ministre-Président de la Région, avait été invité à prononcer un discours et donc à recevoir les messages, doléances et autres preuves d’engagement.

Nous ne nous arrêterons pas sur les signaux et appels du pied à un meilleur financement de l’enseignement et à une formulation de décret qui soit mieux analysée et plus “efficiente”. Tous les intervenants de l’Université les ont émis, sous une forme ou une autre. Attardons-nous plutôt sur le volet ICT et numérique de la séance.

L’UNamur, contributrice du futur Digital Wallonia Hub

Avec ses 200 chercheurs “qui s’intéressent” à l’ICT et au numérique (CRIDS, Precise, Naxys – voir encadré ci-dessous), l’UNamur entend jouer le jeu du futur Digital Wallonia Hub, ce futur organisme (dont l’identité et la forme restent à définir) qui aura pour tâche de structurer et potentialiser collaboration et transferts entre la recherche (notamment académique) et le monde des entreprises.

Le recteur de l’UNamur, Yves Poullet, rappelait par quelques faits l’importance des ressources numériques que peut mobiliser l’université:

200 chercheurs impliqués d’une manière ou d’une autre dans le numérique; 1.800 étudiants formés à la Faculté d’Informatique; des formations aux divers métiers numériques: informaticiens, informatique médicale, analystes…; les ressources des centres de recherche, en ce compris dans le domaine du big data, via Naxys (centre spécialisé en systèmes complexes); la chaire e-gov ou encore la participation de l’UNamur dans le Namur Creativity Office, lancé cette année, et qui a pour ambition de faire s’approprier de nouvelles méthodes managériales, teintées de nouvelles technologies (cocréation, idéation, participation…), par les prestataires de services publics, tant administratifs qu’institutionnels sans oublier les acteurs de l’enseignement, des soins de santé…

Yves Poullet commençait par saluer l’esprit dans lequel ce futur Digital Wallonia Hub est imaginé: “Il est important que le projet de Plan du Numérique souligne la nécessité de mettre l’ensemble des acteurs autour de la table: entreprises, universités, centres de recherche agréés mais aussi et peut-être plus encore les administration et les citoyens.”

Le fait le plus intéressant, selon lui, se trouve du côté de l’idée et de la volonté de fédérer tous les acteurs autour de divers thèmes de recherche, de la mutualisation des forces de la recherche.

Un regret: que le thème de la “société numérique”, autrement dit de la réflexion qui doit intervenir sur l’impact qu’a et aura le numérique en termes économiques, juridiques, sociétaux, réglementaires, éthiques…, n’ait pas été repris, ni dans la proposition élaborée par le Conseil du Numérique, ni dans le rôle recommandé pour le Digital Wallonia Hub. Nous reviendrons plus en détail sur ce point (et d’autres) dans l’interview que nous publions, dès demain, d’Yves Poullet.

Comment l’UNamur envisage-t-elle de se positionner, de s’insérer dans ce probable futur Digital Wallonia Hub? “L’approche que nous proposons [à l’UNamur] est l’interdisciplinarité. Les technologies de l’information ne peuvent être envisagées que par le prisme des différentes disciplines, en ce compris l’acceptation sociétale.”

Il affirmait ainsi son souhait que l’UNamur progresse encore dans sa démarche et mette en oeuvre un “Namur Digital Center” “qui prenne en compte cette dimension.” Ici aussi davantage de détails sur ce porjet dans l’interview à paraître demain.

Yves Poullet: “Les technologies de l’information ne peuvent être envisagées que par le prisme des différentes disciplines, en ce compris l’acceptation sociétale.”

Pour ce qui est de la collaboration avec le monde des entreprises, il citait notamment deux passerelles: l’Infopole Cluster TIC (dont l’UNamur est l’un des fondateurs) et un legal lab au sein duquel des étudiants procurent aux entrepreneurs des informations, sous forme d’aide préliminaire, “de premières indications”, sans concurrence, dès lors, avec des cabinets juridiques.

Paul Magnette: “colonne vertébrale du Plan Marshall”

Si les responsables de l’université et l’assistance attendaient un message clair de la part de Paul Magnette en matière de volonté numérique de la Région, ils l’ont reçu – sans que le Ministre-Président dévoile toutefois en quoi que ce soit la manière dont cela pourrait se traduire (le Plan du Numérique, rappelons-le, doit encore être dévoilé).

Paul Magnette: “Nous devons saisir la nouvelle vague numérique à pleines mains. […] Le numérique est la colonne vertébrale du Plan Marshall 4.0.”Mais Paul Magnette, dans son exposé, réaffirmait le rôle que l’actuel gouvernement wallon veut prêter au numérique dans le redressement et l’expansion économique. De son passé, de son lustre économique d’antan – hélas très affaibli -, la Wallonie a gardé, selon lui, “une ouverture au monde, à la diversité de cultures” qui est le fondement sur lequel “chercher à continuer d’innover”.

Si les progrès de la Wallonie sont jusqu’ici essentiellement dus à sa réussite dans le domaine des biotechnologies, “c’est là la démonstration que nous sommes capables de nous redresser pour créer une nouvelle vague de créativité. Mais nous devons saisir la nouvelle vague numérique à pleines mains.

L’une des raisons d’être du Plan Marshall est d’obliger industrie et université à travailler ensemble autour d’une même compétence, de faire progresser en parallèle industrie et recherche, d’être sur la brèche en termes de rupture technologique. Pour l’actuel gouvernement, cette rupture, c’est le numérique. Il est la colonne vertébrale du Plan Marshall 4.0.”

Le numérique oui, mais pas sans l’humain

Il y eut aussi – dans la grande tradition namuroise – ce message formulé par Annick Sartenaer, présidente de l’Assemblée générale de l’UNamur: face à l’omniprésence des technologies dans toutes les facettes du quotidien, privé ou professionnel, et face aux rôles croissants qu’elles assument en remplacement des activités, responsabilités et initiatives humaines, “il est urgent de ménager un temps suffisant pour la réflexion et la recherche afin de pouvoir informer et éduquer”, déclarait-elle en substance. “La réflexion, l’anticipation, est nécessaire pour préparer à l’arrivée de nouvelles technologies”. Et de prendre deux exemples.

Lorsque des coeurs robotisés implantables seront devenus pratique courante, quid de certaines implications éthiques? Par exemple, “qui décidera d’arrêter ce robot?”

Quand, demain, le quotidien et l’accompagnement des personnes âgées seront pris en charge par les technologies et des robots, dans une société toujours plus poussée vers l’individualisme, le risque sera de voir disparaître la notion-même de collectivité.

Ce message “danger”, Paul Magnette l’a capté au vol. Il terminait en effet son exposé par cette phrase: “le numérique nous oblige aussi à penser à de nouveaux défis en termes de responsabilités, dont une qui a trait à la sociabilité.”