Xavier Bastin (MIC): prouver l’utilité de l’IT par l’exemple

Portrait
Par · 10/08/2015

Un an que Xavier Bastin a pris la direction du Microsoft Innovation Center (MIC) de Mons. L’occasion de faire avec lui le bilan de l’année écoulée et de voir en quoi il a apporté ou non une impulsion nouvelle ou fait évoluer certaines des activités du Centre.

Xavier Bastin a en fait repris le témoin tendu par Ben Piquard à un moment où le MIC avait déjà effectué son virage, abandonnant à d’autres acteurs le soin de favoriser la naissance de projets et de start-ups – notamment par le biais de “bootcamps”. Désormais, le MIC se consacre davantage à des activités dites de prototypage. Relire l’article que nous y avions consacré. 

Portrait-minute de Xavier Bastin

Avant de rejoindre le MIC, Xavier Bastin était le directeur du CEI (centre d’entreprise et d’innovation) La Maison de l’Entreprise de Tournai.

Il est membre du conseil d’administration de Wallonie Design et d’HoccInvest, l’invest publique de la Wallonie picarde.

Diplômé de l’ULB (master en économie), de la Solvay Business School (direction de PME) et de la Louvain School of Management (gestion de l’innovation), il a fait ses débuts dans le monde du conseil, notamment comme analyste métier chez LEK Consulting et consultant chez Arthur D. Little, à Paris.

Le raisonnement suivi? Il y a, sur le marché, un besoin non encore assouvi de donner la possibilité à des entreprises qui n’en ont pas forcément les moyens en solo, de vérifier la faisabilité (technique, commerciale, voire financière) et d’initier la première phase de projets basés sur des technologies de pointe. Le MIC se propose donc de jouer les pionniers et les guides pour entreprises (PME en particulier mais aussi start-ups ou simples porteurs de projet), à la découverte d’une meilleure maîtrise des nouvelles technologies et des avantages qu’elles peuvent en retirer.

Dans ce registre prototypage, Xavier Bastin a hérité, à son arrivée (voir son bref portrait en encadré ci-contre), d’un catalogue d’instruments qui ont commencé à être mis en oeuvre en 2014: stages encadrés d’étudiants en dernière année de bachelor en informatique, amenés à travailler sur des projets soumis par des entreprises, weekends de développement en mode hackathon pour projets imaginés par des entreprises ou associations…

Son bilan après un an?

Poursuivre et étendre

Trop tôt encore pour tirer des conclusions sur l’efficacité ou la pertinence de certains de ces instruments. Pour d’autres, par contre, un premier bilan se dessine.

“Tous les outils que nous avons initiés sont, en soi, efficaces mais ont leurs particularités. Les stages de 15 semaines permettent d’aboutir à un prototype évolué, assez poussé. La seule contrainte est l’agenda scolaire: ils doivent se dérouler de février à mai, avec soumission des projets en septembre de l’année précédente.

Premier Softlab Summer Camp, en 2014

Les Summer Camps se déroulent sur deux jours et demi en mode hackathon. Le temps imparti est toutefois utile pour permettre aux sociétés, notamment, qui les proposent aux participants d’ouvrir les yeux sur les potentiels de la technologie et aux participants de montrer quelque chose… Le public est plus large: les porteurs de projets viennent de multiples horizons – entreprise, associations, soins de santé, enseignement… Les participants, eux, ont des compétences très variées: univers Microsoft ou autre, backend, front end…”

Côté stages, le MIC a accueilli cette année 12 étudiants qui ont planché sur 5 projets. “Mon apport personnel dans le cadre de ce programme fut d’y inclure la dimension du design, de faire en sorte que cette problématique soit abordée”, déclare Xavier Bastin. “L’introduction de la dimension design s’est faite grâce à un partenariat avec Design Innovation qui a encadré 4 designers en formation qui ont travaillé avec les 12 étudiants en informatique sur les projets. Leurs compétences se situaient dans le domaine du graphisme et du web design. Visuellement, cela a apporté un vrai plus sur le résultat final. Mon espoir est d’améliorer encore les résultats obtenus en incluant un travail sur l’ergonomie, la facilité d’utilisation grâce à l’intégration de stagiaires designers qui cherchent à se spécialiser en User Experience (UX).”

“L’impact de ces stages n’est pas négligeable vu la pénurie de main d’oeuvre IT qualifiée qui sévit sur le marché”, ajoute-t-il. “Ils permettent de faire travailler des jeunes sur des projets et d’en faire des juniors sur des outils de développement modernes…”

Xavier Bastin: “les stages permettent de faire des jeunes étudiants des juniors maîtrisant des outils de développement modernes…”

Xavier Bastin envisage-t-il de diversifier les formules de prototypage mises en oeuvre? “Pas vraiment. Il s’agit plutôt d’approfondir les formules existantes. L’objectif 2016 est par exemple de doubler le nombre de stages et, si possible, de toucher d’autres régions que celle de Mons. Le Summer Camp sera à nouveau organisé, l’été prochain.”

Le MIC pourrait par ailleurs relancer le concept de “POC3K”, un projet de proof of concept doté d’un budget de 3.000 euros. Le projet, proposé par une société par exemple, est évalué par le MIC (évaluation rapide de faisabilité ou de potentiel de l’idée), qui établit le cahier de charges et en confie la réalisation, pendant 5 ou 6 jours, à des membres de la communauté qui évolue autour de lui.

test rapide et économique qui permet au porteur de projet d’apprendre sur la faisabilité ou le potentiel de son idée et de la faire ainsi évoluer.

Cet instrument, estime Xavier Bastin, est actuellement sous-exploité. “Nous devons le mettre davantage en exergue. Il nous faudra expliquer davantage aux autres organismes pro-entrepreneuriat de la Région avec qui nous collaborons, et par qui les idées de projets doivent nous parvenir, la valeur que le MIC peut apporter en la matière.”

La sous-exploitation de la formule est due, à ses yeux, à une méconnaissance de son existence. Même s’il ne rejette pas a priori la possibilité de devoir faire évoluer la formule…

Les nouveautés de 2015

Cette année, le MIC de Mons offre la possibilité aux porteurs de projets de procéder à une première évaluation préliminaire d’opportunité par le biais d’un MOOC (massive on-line course) baptisé “Mon projet de start-up tient-il la route?”

Ici encore, c’est un “héritage” de Ben Piquard, qui en est l’auteur (il le propose d’ailleurs aussi au LeanSquare de Liège où il travaille désormais – relire cet autre article). Le MOOC, explique Xavier Bastin, “permet à un porteur de projet de faire rapidement le tour des bonnes questions qu’il faut se poser quand on lance un projet. Cela lui permet de pré-structurer l’idée”. De quoi, dès lors, éviter qu’une certaine dose de projets ou de motivations non matures vienne encombrer les propositions qui sont soumises au MIC… “Nous en sommes encore au stade de l’expérimentation de l’outil. S’il s’avère concluant pour faire progresser un porteur de projet, nous pourrons proposer de l’étendre à d’autres opérateurs wallons du monde de l’entrepreneuriat.

Et pour l’avenir…

Au-delà de ses activités “prototypage”, le MIC de Mons veut également opérer sur le terrain de la sensibilisation aux nouvelles technologies (par exemple, des tendances actuelles telles que l’Internet des Objets ou le big data). Une réflexion est en cours.

A noter au passage que le thème de l’Internet des Objets fera l’objet de plusieurs séminaires (de type ateliers pratiques) d’ici la fin de l’année, avec, en guise de point culminant, un hackathon, organisé en décembre.

“Il se pourrait également que nous tentions quelque chose du côté de l’accélération de l’adoption des nouvelles technologies par les sociétés, où la Wallonie souffre d’un retard. Cela figurera peut-être dans notre plan d’action 2016.

[Ndlr: le plan d’action 2016 sera défini, en principe, d’ici la fin octobre. Il intégrera sans doute certaines des priorités qui doivent être définies par la Région pour son Plan numérique, “en cohérence avec les décisions politiques qui seront prises”. N’oublions pas en effet que le MIC est le résultat d’un partenariat public-privé, le partenaire étant la Région wallonne].

Nous devons nous pencher sur la valeur ajoutée potentielle avant de contacter nos partenaires pour mettre quelque chose en oeuvre.”

Le MOOC fera aussi l’objet d’une évaluation, dans quelques mois, “afin de déterminer l’opportunité qu’il y aurait à le partager, à l’adapter éventuellement pour en faire un véritable outil d’accompagnement des start-ups.”

Notons encore que l’open space du Softlab, sorte de session de coworking hebdomadaire pour développeurs, designers etc., pourrait devenir itinérant. Ou, plus exactement, faire la démarche d’aller à la rencontre d’entreprises dans différents points du territoire. Il a déjà fait escale à Charleroi et Liège. D’autres villes pourraient être concernées.

Train the trainer

Il est encore une autre initiative qu’a lancée le MIC de Mons: des stages d’une semaine (10 demi-journées, en fait) destinés à des jeunes du dernier cycle du secondaire intéressés par l’informatique et la programmation. L’idée? Semer chez eux le virus de la programmation, leur en enseigner les ficelles et en faire des ambassadeurs qui essaimeront leur passion parmi leurs camarades. “Nous leur donnons également les moyens de continuer à apprendre, à compléter leurs connaissances par eux-mêmes.”

Quatre de ces sessions ont été organisées à ce jour. Trois autres sont prévues jusqu’à la fin de l’année.

“L’espoir est de voir naître des Clubs d’informatique au sein des écoles.” A condition qu’un professeur décide de s’y impliquer et de convaincre l’établissement d’y allouer du temps, un budget, un local, un accompagnement…

Résultats de l’initiative à ce jour? “Variables”, reconnaît Xavier Bastin. “Nous avions tout d’abord accueilli, au sein d’une même session, des étudiants venant de plusieurs écoles mais ce n’est pas forcément la bonne formule. Désormais, le principe est plutôt de travailler, par session, avec une école en particulier qui envoie 10 élèves. Les établissements sont satisfaits de l’expérience mais il nous faut encore nous assurer qu’une suite réelle lui est donnée, afin qu’une dynamique s’instaure et qu’il y ait essaimage. Peut-être serait-il intéressant d’organiser un événement qui réunirait tous les participants passés. Il nous faut aussi, de notre part, trouver un moyen d’allouer suffisamment de ressources humaines à la formule si elle prend de l’ampleur…”