Les premiers initiés à la programmation du Wagon témoignent

Hors-cadre
Par · 20/04/2015

La plupart n’avaient aucune notion de programmation et aucun don spécifique pour l’IT avant de s’engager dans le bootcamp d’initiation à la programmation Le Wagon. Par contre, la plupart avaient un intérêt, voire une passion non encore exprimée pour ce monde-là. Et beaucoup sont venus avec une expérience professionnelle. Avec des parcours et des curriculum variés: biologiste, diplômé en sciences économiques ou en management, avocate d’affaires, graphiste… Avec des intentions variées. Certains pour acquérir des compétences qui leur semblaient utiles dans le cadre d’une activité existante. D’autres en quête de réorientation de carrière. D’autres encore par curiosité ou envie de mieux découvrir un monde inconnu qui leur semblait prometteur.

Cet article sera scindé en deux parties. Premier volet aujourd’hui, avec ce que les participants espéraient trouver au Wagon et ce qu’ils en ont retiré. Dans la deuxième partie, les perspectives futures. Celles du programme proprement dit du Wagon et celles qu’envisagent les participant(e)s, notamment pour le projet qu’ils et elles y ont initié.

Des profils hétérogènes

A de rares exceptions près, les participants de la première session du Wagon n’ont rien de “nerds prédestinés”. Pas de prédisposition particulière à tripatouiller du code.

Jeune diplômée, pure novice mais gagnée par le virus du “bidouillage” informatique, Laure Lemercinier — la benjamine de la première fournée du Wagon — s’est inscrite au Wagon parce qu’elle s’était aperçue combien, depuis un an, la passion de la programmation, encore en pur amateur et autodidacte, la tenaillait plus qu’aucune autre activité menée jusqu’ici. Son but était donc d’en faire quelque chose de plus structuré, un acquis qu’elle puisse valoriser à l’avenir.

Celle qui allait devenir l’une de ses partenaires pour le prototype de fin de stage mais aussi pour le lancement effectif du projet (on y reviendra plus tard dans la seconde partie de cet article), Marguerite Tinawi, s’était elle aussi frottée à l’univers informatique. Mais en s’apercevant qu’elle n’y comprenait rien. Frustration intense.

Québécoise d’origine et avocate spécialisée dans les litiges commerciaux, “Margo” a débarqué en Europe avec une grosse envie de “faire autre chose, sans trop savoir quoi”. Seule conviction: devenir entrepreneure.

Margo Tinawi: “Il faut quelques connaissances techniques pour avoir un minimum de crédibilité.”

Le hasard l’a tout d’abord amenée à travailler pour une start-up tchèque pour qui elle mettait à profit ses compétences juridiques pour le lancement d’une solution d’échange d’informations et de documents qui s’adressait notamment aux cabinets d’avocats. “J’étais incapable de tenir une conversation avec le directeur technique. Comme je voulais tout comprendre, je lui ai demandé de m’expliquer les choses.” Mais c’était évidemment loin d’être gagné. “Finalement, j’ai quitté la start-up en ayant l’intention de rester dans l’IT. Mais je savais aussi qu’il faut quelques connaissances techniques pour avoir un minimum de crédibilité.” Le Wagon tombait donc à pic…

Jacques de Liedekerke, lui, a une formation et un passé de… biologiste et de graphiste. Actif un temps dans le monde de la publicité, il s’est impliqué dans le lancement du site PopThisPlace, une “sorte de AirBNB proposant des espaces disponibles pour aménagement de magasins éphémères” [les fameux “pop up stores”]. Lui aussi a voulu être en mesure de mettre un tant soit peu les mains dans le cambouis et de démêler les secrets du code. “J’avais quelques notions de programmation mais j’ai découvert un nouveau monde. C’est comme d’apprendre une nouvelle langue en 9 semaines. J’ai enfin pu faire ce que je voulais tant lorsque je participais à la création de simples sites-vitrine. Par exemple, apprendre à associer des bases de données à un site…”

Philippe de Liedekerke, cousin de Jacques, a pour sa part fait des études en sciences économiques et est un fan de musique. D’où son projet Trackathon de plate-forme de création et de partage de créations musicales. Un projet pour lequel il a participé, avec un acolyte, au programme d’accélération Nest’Up mais sans être convaincu par le “pivot” qui lui a été conseillé à cette occasion. Et sans avoir glané les compétences techniques qu’il estime nécessaires pour la suite des opérations.

Naike Nembetwa, elle aussi, est arrivée sans bagage de programmation. Après une licence en management, elle a travaillé dans un programme de coopération à l’international, au Congo. “Mais je me suis rendue compte que j’avais besoin de compétences techniques pour réaliser un projet.” Au départ, l’idée était de créer un réseau social, “du genre Yelp”, pour travailleurs humanitaires. Ensuite est venue l’idée d’une solution de création et de gestion – mode 2.0 – de tontines [groupements d’épargne, très courants en Afrique, dans lesquels des personnes s’associent pour investir dans un actif financier ou un bien]. “En transposant les tontines sur Internet, il devient possible de mettre les gens en réseau, à la fois entre eux, mais aussi de les mettre en contact avec les acteurs bancaires.”

Qu’est-ce qui l’a motivée à se lancer dans une formation à la programmation? Un besoin de compétences techniques pour créer un MVP (minimum viable product), entre intérêt et nécessité: “il faut avoir certaines compétences pour pouvoir discuter avec un développeur. C’était en outre l’occasion d’acquérir des bases solides sur lesquelles bâtir mon avenir.”

Espoirs et objectifs

Beaucoup étaient venu(e)s avec une idée de projet en tête. Certains ont finalement laissé ce projet de côté pour plancher sur un autre, proposé par un autre participant, voire par un acteur venu de l’extérieur. Ce fut le cas pour Jacques de Liedekerke et son comparse suisse qui ont rencontré Filip Maertens, fondateur de Sentiance (nouveau nom d’ArgusLab), venu donner une conférence. Ils ont fini par travailler sur un projet de site proposé par ce dernier. A savoir, un site Internet (SharkRank) qui permet aux porteurs de projet et jeunes entrepreneurs d’évaluer la “qualité” des investisseurs et, dès lors, de mieux pouvoir sélectionner ceux auxquels ils désirent faire appel lors d’une recherche de fonds. Les investisseurs y sont classés en fonction d’un certain nombre de critères: réputation, termes des conventions proposées, interactivité, compétences, engagement vis-à-vis des fondateurs de start-ups, importance des sommes investies…

Filip Maertens n’est pas intervenu lors de la réalisation du projet mais est revenu dans la boucle une fois l’exercice terminé. Si tout se déroule bien, un site bêta devrait se lancer début mai.

Philippe de Liedekerke avait pour sa part déjà participé au programme d’accélération NestUp et cherchait à développer sa plate-forme de création et de partage de créations musicales. “J’avais rencontré quelques développeurs mais aucun n’avait de temps à consacrer à mon projet. Il me restait donc à le faire moi-même…”

Entrepreneur ou développeur?

Les participants du Wagon se sentent-ils désormais prêts à affronter le monde, mieux armés? Jusqu’où vont leurs compétences en programmation?

Laure Lemercinier: “Avant d’intégrer ce programme, je n’aurais jamais imaginé faire un tel parcours, lancer un projet. Aujourd’hui, je ne m’imagine plus sans cela. Le Wagon est un carrefour parfait pour prendre une nouvelle direction.”

Margo Tinawi ne serait toujours pas en mesure de parler d’égal à égal avec le CTO de son ancien employeur mais a fait de sérieux progrès: “je comprend désormais les concepts. J’ai acquis suffisamment de connaissances pour ne pas me faire berner. Mais il ne faut pas espérer devenir un véritable développeur en si peu de temps. C’est comme suivre un bootcamp en droit et espérer en sortir avocat…”

Pour elle, en tout cas, pas de doute: “mes futures activités s’appuieront sur ce que j’ai fait au Wagon”.

Quant à Laure Lemercinier, elle se dit certaine “que les compétences acquises sont très recherchées sur le marché. Des compétences que peu de personnes possèdent.” Son espoir? Trouver un travail dans la sphère de l’Europe (elle a suivi des études européennes) ou auprès d’une grande entreprise “mais un travail qui soit lié à la technologie, à la gestion des données.” Dans l’immédiat, elle continue à travailler avec sa collègue sur l’évolution du projet Kidzeum (nous y reviendrons dans la deuxième partie de l’article) qu’elles ont lancé pendant leur formation.

Celle-ci a d’ailleurs permis au 3ème membre de leur trio, de trouver un emploi… auprès d’une société allemande spécialisée dans l’Internet des Objets.

Jacques de Liedekerke dit être ressorti du Wagon avec “une claire envie de continuer”. Eventuellement en combinant ses nouveaux acquis avec son autre passion qu’est l’architecture paysagère. “J’espère poursuivre avec le projet SharkRank. Sinon, pourquoi ne pas proposer mes services, en tant que junior developer.

Jacques de Liedekerke: “J’espère poursuivre avec le projet SharkRank. Sinon, pourquoi ne pas proposer mes services, en tant que junior developer.

Et, bien sûr, continuer à apprendre et développer de nouveaux talents, me perfectionner en programmation. Je ne suis pas un pur développeur, davantage un entrepreneur. Cela m’amuse davantage de développer un projet.”

Philippe de Liedekerke: “J’ai acquis de bonnes bases. Je peux désormais lire et écrire en quelque sorte. A moi, désormais, de m’entraîner.”

Il se voit, à terme, mi-entrepreneur mi-développeur. “L’un ne va pas sans l’autre. De par mon expérience personnelle, je peux témoigner d’une bonne dose de frustrations quand on ne dispose pas des compétences nécessaires pour développer un produit. Je suis désormais plus à l’aise. Je ne serai jamais le meilleur développeur qui soit mais mon niveau technique est suffisant pour commencer, pour tester la viabilité d’un projet, pour sortir un MVP. Avec l’aide de gens qui sont meilleurs que moi…”

Naike Nembetwa compte se perfectionner en programmation. “Quand on se lance dans cette formation, on sait qu’elle ne se terminera pas après 9 semaines. Il faut avoir envie de continuer. En tant qu’entrepreneur, on est souvent tenté de laisser cela aux programmeurs. Ce n’est pas une erreur en soi, parce qu’il faut choisir ses priorités, mais c’est regrettable. Quand on crée une société, il faut se concentrer sur ses points forts mais ne pas négliger par ailleurs d’autres choses. Et puis, la programmation devient une passion…”

Dans la deuxième partie de cet article, les perspectives futures. Celles du programme proprement dit du Wagon et celles qu’envisagent les participant(e)s, notamment pour le projet qu’ils et elles y ont initié.