“Twiplomatie”, une analyse décalée de l’influence politico-diplomatique

Hors-cadre
Par · 30/06/2014

La question mériterait une étude politico-sociologique plus poussée mais l’agence de communications Burson-Marsteller vient de sortir une étude qui fait un bilan chiffré de l’usage que font les leaders et chefs d’Etat, à travers le monde, du réseau social Twitter.

Entre interaction avec les citoyens/électeurs, volonté de visibilité et tissage de réseaux d’influence, les dirigeants de la planète sont de plus en plus présents sur Twitter. L’agence de communicartions, qui en est à la troisième édition de son étude “Twiplomacy”, a ainsi relevé une progression de 28% du nombre de comptes depuis un an.

Barack Obama – cela n’étonnera personne – est le champion toutes catégories du tweet (personnel ou politique). Le compteur de son peloton de suiveurs affiche… quelque 43 millions d’unités. Il est aussi l’un des premiers politiciens à avoir utilisé ce canal de communication. Et ce dès 2007.

Chez nous, Elio di Rupo fut aussi l’un des plus précoces, s’y manifestant dès 2007 également, souligne l’étude de Burso-Marsteller. Son score évidemment fait pâle figure, face à l’engouement obamien puisqu’il affiche (un score plus qu’honorable à l’échelle belge) 120.000 suiveurs.

Autres stars Twitter: les Présidents indonésien et indien. Doublon moins personnel qu’Obama lui-même, le compte Twitter de la Maison Blanche affiche 4,9 millions de ‘followers’.

Autre chef d’Etat, mais portant plusieurs “casquettes”, le Pape François se défend plus qu’honorablement puisqu’il totalise 14 millions de suiveurs (répartis sur 9 comptes publiés dans différentes langues).

Des “suivis” passifs

Pas moins de 5 chefs d’Etat sud-américains figurent dans le Top 20 des leaders les plus suivis. A savoir: les dirigeants argentin (Cristina Fernández de Kirchner), colombien, mexicain, brésilienne et vénézuélien.

Les auteurs de l’étude font remarquer que les mieux suivis ne sont pas forcément les plus suiveurs.

Et, à cet égard, le cas de la Maison Blanche est étonnant, voire interpellant. Seulement trois autres haut dignitaires sont suivis: Erna Solberg, la Première ministre de Norvège, Dmitry Medvedev, le Premier ministre russe, et le gouvernement britannique.

Pourquoi ces trois-là en particulier et pas d’autres?

Parmi les leaders mondiaux qui utilisent le plus activement Twitter pour faire passer opinions et idées: le nouveau Président indien Narendra Modi.

Le plus ‘retweeté’, après le Pape François, est le président vénézuélien Nicolas Maduro.

Le plus “interactif” – au sens de dialogue engagé avec ses suiveurs – est le Premier ministre ougandais (Amama Mbabazi): “95% de ses tweets sont des réponses apportées à des questions d’autres utilisateurs du réseau”

D’autres chefs d’Etat ou hauts responsables semblent utiliser Twitter que de manière plus ponctuelle, voire uniquement en période d’élection. Certains – faute de temps dans leurs nouvelles fonctions? – s’arrêtent soudain de tweeter. L’étude signale ainsi le cas de Manuel Valls qui n’aurait plus utilisé son compte depuis sa nomination à Matignon.

Une toile diplomatique d’un nouveau genre

Outre les chefs d’Etat, l’étude s’est aussi intéressée aux habitudes twitteuses des patrons de la diplomatie mondiale.

Petite surprise sans doute, c’est le Ministre français, Laurent Fabius, qui apparaît comme “le ministre des Affaires étrangères le mieux connecté” – en termes de toile sociale (virtuelle) tissée. C’est lui en effet qui rassemble le plus grand nombre de “suiveurs” parmi ses homologues: 91 leaders internationaux dans son réseau.

Suivent le service d’action extérieure de l’Union européenne (@eu_eeas), avec 71 connexions, et le ministre suédois des Affaires étrangères, Carl Bildt (68 connexions).

Petit détour belgo-belge (ces chiffres ne viennent pas de Burson-Marsteller mais d’une petite vérif’ perso): Didier Reynders (mais il a, lui aussi, plusieurs casquettes) a quelque 39.500 suiveurs et 10.250 tweets à son actif.

Maxime Drouet (Burson-Marsteller): “Les entreprises et PDG ont beaucoup à apprendre des politiques, aussi bien de la façon dont ils se sont appropriés les outils digitaux de communication que de la manière dont ils échangent et établissent des liens avec leurs pairs et les influenceurs.”

Commentaire de Burson-Marsteller: “Plus que le grand nombre de followers, cette étude démontre combien les connexions entre les leaders politiques sur Twitter ont pris de l’importance. Il est intéressant de voir comment les ministres des Affaires étrangères sont parvenus à créer de vastes réseaux digitaux sur Twitter, réseau sur lequel leurs messages ne sont pas toujours validés par des juristes ou des responsables presse. Les entreprises et PDG ont beaucoup à apprendre des politiques, aussi bien de la façon dont ils se sont appropriés les outils digitaux de communication que de la manière dont ils échangent et établissent des liens avec leurs pairs et les influenceurs.”

Quelques chiffres en vrac révélés par l’étude de Burson-Marsteller:

  • l’étude a été effectuée au début du mois de juin auprès de 644 comptes Twitter gouvernementaux dans 161 pays
  • 83% des gouvernements de pays représentés à l’ONU sont présents sur Twitter, soit une augmentation de 28% (en nombre de comptes) par rapport à 2013
  • 68% des chefs d’Etats et de gouvernements de ces pays disposent de comptes Twitter personnels
  • 32 pays (essentiellement africains, asiatiques et de la zone Pacifique), n’ont aucune présence sur Twitter
  • score cumulé de tous les responsables internationaux présents sur Twitter: 1 932 002 billets (calcul clôturé au 2 juin 2014), avec, en moyenne, 4 tweets par jour. Le compte de la présidence mexicaine est, de loin, le plus prolifique: quelque 78 tweets par jour
  • les 644 comptes répertoriés à travers la planète totalisent plus de 156 millions de ‘followers’.