Solution SeeZam: Systemat joue à nouveau la carte stratégique du Grand-Duché

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Par · 23/09/2013

Systemat a pris une participation de 38% dans la jeune société luxembourgeoise SeeZam, auteur d’une solution de “coffre-fort virtuel”, à savoir d’espace numérique privatif qui procure un haut degré de sécurité pour tous les documents et fichiers qui y sont stockés.

Si la prise de participation n’est encore que minoritaire, la convention passée s’inscrit dans une volonté d’acquisition. “C’est d’ailleurs déjà le cas en termes opérationnels”, souligne Pierre Focant, CEO de Systemat. “Nous avons d’ores et déjà les droits de distribution exclusive et disposons de la propriété intellectuelle sur toutes les solutions de SeeZam. Et l’équipe de SeeZam a déjà emménagé dans nos locaux, au Grand-Duché. Nous nous sommes en fait ménagé les droits pour acquérir 100% des parts de la société dans un délai donné [Ndlr: délai qui sera “de 2 à 3 ans”] à mesure que le business se développe.”

En phase de croissance, SeeZam était en fait en quête d’une manière de développer son envergure commerciale et d’étendre sa clientèle. Systemat a saisi l’opportunité au vol pour mettre la main sur une technologie et une solution qui l’intéressaient pour renforcer son propre catalogue. Dans son positionnement comme “intégrateur cloud” (voir l’article que nous avons publié à ce sujet), la société cherche en effet avant tout à “enrichir la nature de ses solutions et services afin de se différencier de la concurrence”. Les solutions de sécurisation de SeeZam remplissaient ces conditions.

L’“exception” luxembourgeoise

La solution de “coffre-fort virtuel” de SeeZam repose sur la mise en oeuvre de techniques de sécurisation renforcée: chiffrement des documents stockés “de classe militaire” (2.048 bits), accès sécurisé via identifiant, mot de passe et authentification forte, stricte compartimentage des espaces de stockage, granularité des droits d’accès…

“SeeZam présentait une caractéristique unique. Cette société n’aurait pas pu mettre en oeuvre une telle solution ailleurs qu’au Grand-Duché de Luxembourg grâce à une politique qui autorise les mécanismes de chiffrement renforcés.” Le plus à l’abri possible des yeux indiscrets. “Là où par exemple les dispositions du Patriot Act refusent les chiffrements à plus de 128 bits.”

Cela implique d’ailleurs que le lieu du stockage doive se situer au Grand-Duché. Il serait donc impossible à un client potentiel de requérir un stockage ailleurs, “que ce soit par exemple en France ou, a fortiori, aux Etats-Unis. Cela nous empêcherait de lui proposer le même niveau de chiffrement.”

Pierre Focant (Systemat): L’exception sécuritaire du Grand-Duché se mue en argument commercial…

Pour Systemat, l’offre SeeZam représente une couche “valeur ajoutée” supplémentaire par rapport aux arguments que lui offre déjà le Grand-Duché en termes d’hébergement de solutions informatiques. Notamment le fait que le client, en cas de défaillance de son prestataire, a la garantie de récupérer ses données, cette obligation étant inscrite dans la loi luxembourgeoise.

La solution SeeZam y ajoute la “couche” d’inviolabilité et d’inaltérabilité des documents. Avec, à la clé, les garanties de force probante que cela implique. Un argument que Systemat compte bien exploiter commercialement pour attirer des clients opérant dans des pays au-delà de son terrain de chasse actuel (Belgique, Luxembourg, essentiellement).

L’hébergement des coffres-fort SeeZam est actuellement pris en charge sur l’infrastructure de P&T Luxembourg. Et Systemat n’a pas l’intention, dans l’état actuel des choses, de transférer l’infrastructure vers les infocentres de LuxConnect, son propre partenaire datacenter où elle sous-loue des espaces. “Un transfert n’est pas à l’ordre du jour”, déclare Pierre Focant. “La priorité est de relever le défi commercial d’une extension de la clientèle des solutions SeeZam.”

Les solutions d’authentification forte mises en oeuvre exploitent par exemple les mécanismes LuxTrust (sécurisation via token, carte à puce, clé de signature USB, confirmation par code SMS…) ou Entrust. Systemat envisage d’y adjoindre une authentification via eID (“des discussions sont en cours”, indique Pïerre Focant).

Autre particularité: les solutions mises en oeuvre n’imposent pas au prestataire de services de détenir les clés de cryptage. Les utilisateurs disposent ainsi d’une garantie supplémentaire: des détournements et comportements illicites sont impossibles, ou en tout cas largement minimisés, dans le chef de l’hébergeur et de ses collaborateurs.

Le coffre à secrets

Le coffre-fort virtuel, tel que conçu par SeeZam, est un espace sécurisé personnel en ce sens que chaque coffre est lié à une personne spécifique qui peut ne l’utiliser que pour le stockage d’un type de documents bien déterminés ou au contraire en faire un espace où l’on retrouvera tous ses documents confidentiels: fiches de paie, polices d’assurances, certificats en tous genres…

Plusieurs prestataires ou organismes peuvent donc venir y placer, dans des compartiments distincts, des documents. Le “propriétaire” du coffre-fort est celui qui paie le service presté par SeeZam. Cela pourrait donc par exemple être un particulier, une entreprise ou… une banque qui inclurait ce service pour ses propres clients.

Un client de cette banque serait toutefois, nominativement, le dépositaire du coffre, pouvant l’utiliser à d’autres fins que la seule réception de ses extraits bancaires, par exemple. “Si le client décide de changer de banque, il peut faire transférer la location du coffre vers lui-même ou un autre prestataire.”

Chaque compartiment du coffre-fort peut être géré selon un système de droits d’accès adaptés au type de documents stockés. Accès réservé au seul propriétaire pour un premier compartiment, ouvert à sa famille pour un deuxième, réservé à ses collègues ou à son comptable pour un troisième, accessible par lui seul et sa compagnie d’assurance pour un quatrième, et ainsi de suite.

B-to-B-to-C

En adjoignant ce produit à son catalogue, Systemat vise à renforcer sa présence auprès de clients qui attachent une importance toute particulière à la confidentialité de leurs données et documents (rapports d’activités, comptes bancaires, résultats médicaux, fiches de salaire numériques, brevets, processus métier…). Qu’il s’agisse par exemple de banques, de compagnies d’assurances, de fiduciaires, de conseils d’administration…

“Notre modèle commercial est celui du B2B2C”, indique Pierre Focant. En clair, la société proposera cette solution SeeZam à une clientèle professionnelle: banques, compagnies d’assurance, opérateurs énergétiques… Ces clients géreront les coffres-fort SeeZam loués et, à leur tour, les mettront à disposition de leurs propres clients. “Une banque pourra s’en servir pour déposer, dans chaque coffre nominatif de client, les extraits de compte qui le concerne. Autre exemple: une compagnie d’assurance, qui a déjà signé un contrat portant sur plusieurs dizaines de milliers de coffres-fort virtuels, s’en servira comme argument de différenciation, proposant une meilleure couverture à ceux parmi ses clients qui déposeront dans cet espace confidentiel des documents tels qu’expertise de bijoux, facture d’achat d’oeuvre d’art… Le mécanisme lui permet en effet de mieux évaluer les risques qu’elle court et, en retour, de proposer une meilleure couverture à ses clients.”

“BDO, la principale fiduciaire luxembourgeoise, utilise SeeZam pour distribuer les fiches de paie via ses coffres-fort virtuels.”

D’autres clients professionnels pourraient se servir de ces coffres privatifs sécurisés pour des besoins plus internes. Telle cette compagnie active dans le secteur de l’énergie qui les utilisera comme lieu d’échanges confidentiels entre les membres du conseil d’administration et ses différents services. “Ce type de solution devrait donc intéresser des acteurs tels que des banques d’affaires ou des entreprises en phase de fusion ou d’acquisition dans la mesure où cela leur évite de procéder par échanges non sécurisés, via mail par exemple.”

Et les particuliers?

Les solutions SeeZam visent également une clientèle de particuliers. SeeZam leur propose par exemple de lui confier des documents sensibles ou de valeur, tels que testaments, copies de passeport, déclaration de volonté de don d’organes, copies de factures… voire liste de mots de passe pour accès à la pléiade de sites et de services qui requièrent un… sésame.

Cette catégorie de clientèle n’est pas véritablement celle de Systemat. Du moins pas en direct (son modèle B2B2C n’implique le “C” que via l’intermédiaire de ses clients professionnels).

Qu’adviendra-t-il dès lors de la clientèle privée (encore essentiellement luxembourgeoise) à laquelle s’adresse aussi SeeZam?

“L’offre reste ouverte et valable”, déclare Pierre Focant. “Toute la procédure de réservation, location et utilisation de coffre-fort virtuel s’effectuant on-line, cela ne pose guère de problèmes de poursuivre le service.”

Il indique pourtant que l’analyse stratégique (opportunité pour Systemat de maintenir à long terme cet axe d’activités, voire de le développer) n’a pas encore été effectuée.

Tarification

SeeZam propose deux types de coffres-fort: un coffre privé (espace confidentiel mono-utilisateur), au tarif de 34 euros par an. Une version professionnelle, à fonctionnalités plus riches, avec un coffre-fort pouvant être segmenté en 10 espaces privatifs. Coût: 1.300 euros par an.

Micro-portrait

SeeZam a été créée en 2009. Site d’implantation: Capellen (Luxembourg)

La société emploie actuellement 5 personnes.

Elle fut la première société grand-ducale à obtenir une prime à l’innovation de l’Etat luxembourgeois. En 2010, elle reçoit le Prix de la Start Up de l’année. Deux ans plus tard, elle décroche le « Security Innovation Provider of the Year » tandis qu’Accenture lui décerne le Prix du Public  lors des Luxembourg Accenture Innovation Awards.