Mobilosoft: le retail, trop passif face au m-commerce?

Portrait
Par · 06/09/2012

Une surface commerciale peut-elle encore faire l’impasse sur une présence Internet visible à partir de tout terminal? En ce compris donc mobiles? Selon Mobilosoft, jeune start-up bruxelloise qui a justement choisi cette cible du retail pour lui proposer des services de marketing mobile (en ce compris la conception de sites Internet optimisés), la réponse est négative.

De l’avis de Georges-Alexandre Hanin, cofondateur de la société (et ex-Citobi, société néolouvaniste spécialisée dans le CRM), le secteur du retail en Belgique est encore trop frileux, trop peu conscient des potentiels – et des besoins – en informations “mobilisées”. Il en veut pour preuve certains chiffres que met en avant une étude conjointe Google/Ipsos, datant de mai 2012, sur l’utilisation du commerce électronique via mobiles (ce qu’on appelle le “m-commerce”). Voir à cet égard, en fin d’article, certains chiffres que Georges-Alexandre Hanin met en évidence et l’analyse qu’il en fait.

Un marché naissant

Pour valider l’opportunité de son positionnement et vérifier que Mobilosoft pouvait en effet répondre à un besoin, les cofondateurs de la société se sont livrés à une étude de marché d’une durée de six mois. Elle a démontré, selon Georges-Alexandre Hanin, combien les retailers, en Belgique, ont besoin de mieux se profiler et de s’exposer aux clients potentiels férus de mobilité. Sites Internet classiques, applications n’offrant pas de réelle valeur ajoutée, difficulté à chercher des contenus via Google… Tels sont les grosses lacunes qu’il identifie.

“Les fonctions qui intéressent le plus les retailers sont un localisateur de magasins, la gestion des promotions, un catalogue électronique etdes informations sur la société.”

“Via les sites optimisés que nous développons pour eux [à destination des plates-formes iOS, Android ou Windows], nous proposons aux retailers les quatre fonctions de base qui les intéressent le plus. A savoir: un localisateur de magasins, la gestion des promotions, un catalogue électronique dont l’objectif n’est pas de susciter des achats impulsifs mais plutôt d’optimiser le référencement SEO en multipliant les mots pertinents sur Google, et, enfin, des informations sur la société. En ce compris avec des liens vers les réseaux sociaux afin de jouer la carte de la communauté, du cercle d’amis qui recommandent des produits, partagent des infos…”

A cela est venue s’ajouter, début de l’été, une nouvelle fonction (encore optionnelle): la publication d’informations géolocalisées sur Google Places, Facebook Places et FourSquare. “Nous avons en effet constaté que le référencement des retailers sur les moteurs de recherche manquait cruellement de précision. Le taux d’exactitude varie entre 20 et 50% sur Google Maps. Sur FourSquare, l’abondance des signalements par les internautes provoque doublons, triplets…” Quand à Facebook, c’est la cata totale: 5% d’exactitude!”

En cause, des changements d’adresse, l’ouverture de nouveaux sites, des modifications dans les heures d’ouverture ou des données de contact qui n’ont pas été actualisées. “Le point de vente devrait procéder aux modifications pour chaque plate-forme.” Il oublie donc, voire renonce à le faire. “Ceux qui passent par des agences voient le degré d’exactitude s’améliorer mais il continue de plafonner entre 55 et 80%.”

Sur base des données actualisées qu’elle détient, Mobilosoft propose donc, au départ de sa base, de

créer des liens qui “poussent” automatiquement l’info vers ces trois acteurs du Web. “Plus tard, nous y ajouterons catalogues et promotions”, annonce Georges-Alexandre Hanin.

Des besoins standard… pour l’instant

Pour ses débuts (la société est née en octobre 2010 et son premier produit n’est disponible que depuis septembre 2011), la société a proposé un catalogue de fonctions limité: “les besoins de la cible sont largement standardisés, notamment compte tenu du fait que l’interface des dispositifs mobiles, de par leurs dimensions, impose des contraintes et une nécessaire simplification.”

Cela lui a permis de mutualiser les frais de développement et de concocter une solution qu’elle peut rapidement déployer en clientèle. Mais les retailers ne peuvent qu’en demander plus à l’avenir. Ne serait-ce que pour se différencier de la concurrence.

Aujourd’hui, le seul fait d’avoir un site Web optimisé pour mobile sert, en soi, de différenciation mais cet état de choses ne durera plus guère longtemps. “Nous ajouterons donc des modules pour coller davantage à des besoins plus spécifiques. Premier module imaginé: une fonction qui optimise les programmes de fidélité en envoyant automatiquement le solde des points et le détail des dernières transactions pour avertir le client qu’il a droit à une réduction ou promotion.

Autre module futur (déjà développé mais non encore activé): une fonction qui optimisera la rotation des stocks, par promotion automatique sur les produits qu’on veut vendre davantage. Cela impliquera bien entendu à la fois un ERP sous-jacent qui gère quasi en temps réel les stocks et une intégration fine entre mobile et back-office.

Dans l’immédiat, la société planche sur l’amélioration du localisateur de point de vente et envisage une fonction de partage de produits sur Facebook.

Modèle “lean”

La solution de site optimisé mobile de Mobilosoft est proposée aux enseignes sous licence, selon une gradation tarifaire qui dépend du nombre de points de ventes et de visiteurs sur le site mobile.

Au-delà de ce volet développement, la société propose également des services à ses clients. Tels la mise à jour de leur site, par injection de contenus réactualisés (listes de prix, promotion de la semaine…).

Parmi ses clients: Red Market, Auto 5, De vin en vin, Renmans, Total, Decathlon, Ixina… La société estime que ses outils sont utilisés par quelque 2.000 points de ventes dans 6 pays (Belgique, France, Grand-Duché, Allemagne, Pays-Bas et Italie).

Dès février 2012, Mobilosoft a ouvert un bureau commercial à Paris afin d’y chercher de nouveaux clients. Aux yeux de Georges-Alexandre Hanin, le marché français n’est guère mieux loti que le marché local. Mais pour d’autres raisons qui ont trait à la fois à une grande diversité régionale qui n’est pas prise en compte et à la mainmise des agences de publicité qui ont jusqu’à présent privilégié la piste des applications mobiles sur celle de sites optimisés.

Ce débarquement en France est-il le signe d’une croissance passant dès à présent par l’international? Pas forcément. “Nous désirons tout d’abord asseoir notre métier, nous concentrer sur la centralisation des adresses et la création de sites mobiles. Et, bien entendu, réussir notre entrée sur le marché français. L’objectif premier est le break-even. Ce n’est que lorsque nous aurons atteint une rentabilité positive que nous penserons à pénétrer un autre marché.”

Pour progresser, la société ne rejette pas totalement l’idée de l’entrée d’un investisseur au capital mais “nous ne sommes pas en recherche active. Nous le ferons si cela nous fait gagner 6 mois ou un an. Mais nous serons prudents face aux exigences. Pas question d’être sous perfusion. Nos principes sont ceux d’une lean start-up. Une société qui vend des produits répondant réellement à un besoin de la clientèle. Un investissement plus massif n’est possible que lorsqu’il y a suffisamment de traction sur le marché.”

 

Chiffres éloquents

“Il s’avère que 79% des utilisateurs belges de smartphones ont recherché des informations locales. [Ndlr: chose importante, le taux de pénétration de ces engins serait actuellement de 22% dans la population]

84% ont effectué une action suite à leur recherche. 52% ont contacté l’entreprise. 63% ont rendu visite à l’entreprise. 20% en ont parlé à d’autres. Et… 26% ont effectué un achat.”

Pour ce qui est du type d’utilisation, il relève ce qui suit:

– 65% des détenteurs belges d’un smartphone ont effectué une recherche sur un produit ou un service via leur GSM

– 17% l’utilisent pour comparer les prix et se renseigner sur les produits

– 16% ont déjà changé d’avis à propos d’un achat qu’ils envisageaient de faire en magasin, dans la vie réelle donc, d’un produit ou d’un service et ce, après avoir consulté des informations sur leur smartphone

– le pourcentage est strictement identique lorsqu’on mesure les changements d’avis portant sur un achat possible en ligne.

Autre angle d’analyse intéressant à ses yeux: le lien direct entre consultation d’informations via un mobile et décision d’achat: “suite à une recherche sur smartphone, 23% ont effectué un achat sur ordinateur. A noter toutefois qu’il s’agit principalement de contenus multimédias, du genre films, musiques, livres… 21% ont effectué un achat en magasin et 14% des détenteurs de smartphones ont déjà effectué un achat de produit ou de service via leur mobile. Cette dernière tendance semble être en nette progression puisque, selon l’étude Google/Ipsos de mai, 52% de ces 14% ont procédé à un achat via smartphone au cours du mois ayant immédiatement précédé la tenue de l’enquête.”