Baromètre AWT 2012 (3ème volet): les entreprises

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Par · 15/06/2012

L’entreprise wallonne, parent-pauvre de l’équipement IT? L’AWT rejette cette idée. Ou, plus exactement, dit vouloir objectiver le débat en comparant pommes et… pommes. “A caractérisation économique équivalente, les entreprises locales ne sont pas en retard sur leurs homologues flamandes ou étrangères”, prétend Hélène Raimond, économiste auprès de l’AWT. “Le tissu wallon est surtout porté par le secteur de la construction, l’industrie et le commerce de détail. Ce sont là, surtout pour les deux premiers, de secteurs moins intensivement utilisateurs de technologies de pointe. Le commerce de détail, lui, commence d’ailleurs à s’y mettre…”

Selon les chiffres de l’AWT (qui portent, pour rappel, sur l’année 2011):

– 90% des entreprises disposent d’au moins un ordinateur

– 83% sont connectées à Internet (1% de plus par rapport à 2010)

– 19% utilisent l’Internet mobile, en progrès de 9% par rapport à 2010.

“Les entreprises de la région ne sont pas en retard en termes d’équipement et de connexion. Par contre, le bilan est différent quand on regarde ce qu’elles en font”.

Ces scores ne sont guère éloignés de la moyenne européenne (chiffres Eurostat). Si l’on prend les mêmes critères qu’Eurostat (qui analyse les sociétés de plus de 10 personnes), la moyenne local pour les connexions Internet est en parfaite égalité avec la moyenne européenne. 96% de PME et grandes entreprises locales sont connectés. Soit 1% de moins que leurs consoeurs françaises ou allemandes et 2% de moins que les hollandaises.

Côté Internet mobile, 19% des TPE sont au rendez-vous (+ 9%), 31% des PME (+ 13%) et 70% des grandes entreprises (+20%). Les plus à la traîne, tant en termes absolus qu’en termes de progression, restent donc les petites entités ou micro-entreprises. Celle que le radar Eurostat ne prend pas en compte, ce qui empêche donc toute comparaison objective.

Si on se limite, ici encore, aux sociétés de plus de 10 personnes, on constate que les sociétés wallonnes se défendent plus qu’honorablement par rapport à la moyenne européenne (27%). Bien entendu, la comparaison pâlit sérieusement si on prend pour repère les pays nordiques où les pourcentages oscillent entre 40 et 68% !

Et les sites Internet?

34% des entreprises wallonnes, toutes tailles confondues, ont un site Internet (hausse de 2% par rapport à 2010). La proportion en PME et grandes entreprises est de 64%. Là encore pas trop de différence avec la moyenne européenne même si on se fait clairement distancer par les entreprises néerlandaises (81%) et allemandes (84%).

“Les entreprises de la région ne sont donc pas en retard en termes d’équipement et de connexion. Par contre, le bilan est différent quand on regarde ce qu’elles en font”, pointe Hélène Raimond.

De sérieux progrès restent à faire du côté des sites d’e-commerce, “surtout en matière d’interactivité et de support à la vente en-ligne”.

Quelques constats et critiques:

  • 64% des sites n’existent qu’en français, ce qui est dommageable pour leur visibilité extra-locale
  • les sites optimisés pour le mobile “demeurent marginaux”, avec seulement 6% des sites. Il y a donc là un effort, urgent, à faire. “Quand on sait qu’en France et en Belgique, la part de marché des smartphones vient de dépasser les 45% des achats de téléphones portables, on comprend l’urgence d’adapter les sites au m-commerce”, déclare Hélène Raimond. On pourra enfoncer le clou en rappelant aussi qu’il se vend désormais plus de smartphones et de tablettes que de PC fixes
  • le référencement et la promotion d’échanges avec des concullègues ou partenaires (pour optimiser les taux de liens entrants, au départ d’autres sites) sont sous-exploités
  • les possibilités de contact direct ou d’interaction avec un service client font trop souvent défaut
  • seuls 13% des sites proposent un blog, un forum ou des fils RSS
  • la diffusion de contenu via réseaux sociaux n’est implémentée que dans moins d’un-tiers des cas
  • 42% des sites seulement affichent leur état de stocks
  • les interactions informatisées avec les systèmes d’autres sociétés ne concernent encore que 9% des sociétés; elles se font essentiellement via extranet (47%). mais il s’agit là de la moyenne globale, tirée vers le bas par la situation des TPE; le score est de 18% pour les PME et de plus de 50% pour les grandes entreprises;
  • enfin, l’intégration au back-office fait encore souvent défaut: “les achats des entreprises wallonnes sont principalement des achats de fourniture (66%), contre 44% pour les achats de matières premières. Mais ce processus d’achat n’est pas intégré au back-office.” De même, “54% des entreprises qui reçoivent des commandes électroniques doivent les réencoder dans leur comptabilité.” La charge administrative et opérationnelle demeure donc – inutilement – pesante.

Une question de génération?

Les patrons wallons auraient-ils l’excuse de l’âge pour ne pas adopter davantage les technologies de pointe? C’est en tout cas l’une des explications que suggère Hélène Raimond. “66% des dirigeants d’entreprises wallonnes ont plus de 45 ans. Ils n’ont donc pas été formés à l’IT. Si on compare cela à la génération Y, nul doute que l’approche managériale de l’ICT est différente.”

Mais cette explication ne vaut pas raison et surtout pas excuse ou alibi. Les contraintes concurrentielles n’en ont d’ailleurs pas cure. Et elle commence dès la frontière sud franchie: “les dirigeants luxembourgeois sont plus jeunes, mieux formés, davantage orientés à l’international”. Les carences en compétences ou en “culture” IT des patrons wallons coexistent, sans doute de manière révélatrice, avec d’autres points faibles tels un monolinguisme quasi généralisé. Résultat, notamment: les sites Internet n’existent souvent qu’en français (37% seulement sont multilingues). Et tant pis pour la visibilité ou l’attraction de clients ou partenaires flamands ou étrangers et tant pis pour la représentativité à l’international ou l’e-commerce hors frontières. “La chose est d’ailleurs confirmée par les chiffres: les principaux clients des sociétés wallonnes, en e-commerce, sont des clients belges.” Une exception: les acteurs du secteur ICT qui sont davantage tournés vers l’exportation.

 

Voir aussi:

Volet 1: le secteur ICT wallon.

Volet 2: les communes.